Nous étions plus de 500 000 dans toute la France à manifester ce samedi contre le projet de loi sur la sécurité globale et contre les « violences policières ».

L’agression barbare dont a été victime un producteur et l’évacuation sans ménagement de réfugiés place de la République ont été les gouttes d’eau qui ont fait déborder le vase du liquide des dysfonctionnements, des bavures et, pour tout dire, de la haine dont ont trop fait preuve des policier.es dans l’exercice de leurs fonctions.

Le Président de la République s’est dit choqué par les images de l’agression de Michel Zecler. Mais il y a un an c’était les termes « violences policières » qui était choquant pour lui, comme celui de répression. Le faible nombre avancé de dérapages ramené à celui de l’ensemble des interventions de police ne saurait dédouaner leurs auteurs ni minimiser les conséquences délétères qu’ils provoquent dans la société tout entière. Il ne saurait en aucun cas nous interdire d’interroger la réalité et :
- les changement des doctrines de maintien de l’ordre dans un but répressif,
- la gangrène de la police par des idées et des forces d’extrême-droite,
- la décision de couvrir le plus possible les violences policières,
- un ministre de l’intérieur mis en place pour attirer l’électorat le plus conservateur, qui qualifie de déconnade ce qui est un crime abject et se fait le porte-parole de certains syndicats qui ont depuis longtemps dérivé vers l’extrême-droite,
- un préfet de police de Paris qui se définit comme faisant partie d’un camp bien précis.

Le principe démocratique qui veut que les fonctionnaires exercent leurs missions de façon neutre (nonobstant les réelles difficultés du travail) n’existe plus dans la police. Pourtant, y compris dans la police, d’autres voix existent et essaient de se faire entendre. Nous pensons notamment aux analyses de nos camarades de Sud Intérieur que vous pouvez trouver ici :

https://sudinterieur.fr/2020/11/02/proposition-de-loi-relative-a-la-securite-globale-une-etape-de-plus-dans-le-delire-securitaire/

https://sudinterieur.fr/2020/06/09/racisme-dans-la-police-lanalyse-de-sud-interieur/

Qu’est-ce qui peut bien pousser certains fonctionnaires à abuser de leur position pour sortir des clous de la déontologie et de l’esprit même du service public dans l’exercice de leurs missions ?

La question se pose, certes, à l’aune des dérapages et des bavures qui nous sont révélés et qui impliquent des membres des forces de sécurité, mais elle peut concerner tout fonctionnaire et générer d’autres dérives comportementales, moins violentes et moins visibles, mais tout aussi condamnables. Par exemple, le traitement différencié de déclarations de revenus de personnes étrangères, parfois sans papiers, existe bel et bien chez nous.

L’article 24 de la loi de sécurité globale écrite par certains syndicats de police, rédigée par le Ministère de l’Intérieur, était justifié par la majorité parlementaire pour soi-disant protéger et anonymiser les interventions des forces de l’ordre.

Tout fonctionnaire a droit à cette protection, comme il devrait avoir droit à plus de moyens pour exercer ses missions, à une meilleure formation initiale et en cours de carrière, voire pour certains à une « éducation » aux principes du service public qui régissent leur profession.

À la DGFiP, nous n’acceptons pas que les agents soient insultés ou menacés et nous faisons tout pour que les auteurs de tels faits soient sanctionnés et les personnels protégés et dotés de dispositifs d’alerte. Nous avons par exemple obtenu, suite à un terrible événement ayant touché un vérificateur, et après force de conviction et d’interpellation, une anonymisation réglementaire pour certains agents.

L’exercice du maintien de l’ordre est une mission difficile, mais elle ne sera acceptée et respectée par toutes et tous que si ceux et celles qui exercent cette mission le font dans les valeurs qui nous animent : la déontologie et le respect des personnes sans discrimination (pas de contrôle au faciès). Une refonte de la police est nécessaire, une autorité indépendante doit être créée en remplacement de l’IGPN.

Mais c’est une tout autre chose que de museler les droits de la presse et ceux des citoyens en leur interdisant de filmer par exemple une intervention policière. C’est ce que prévoit notamment un article (art. 24) de la loi sur la sécurité globale. Ses défenseurs arguent du fait qu’ils veulent réprimer la publication du visage, de l’identité, de l’adresse d’un policier ou d’un gendarme sur les réseaux sociaux par exemple, publication qui pourrait être ou serait accompagnée d’un message haineux ou d’appel à la violence. Personne ne peut ignorer l’effet de tels messages, c’est évident, et ils sont déjà réprimés par la loi. Qui et comment seront décelées les intentions d’un journaliste ou d’un simple citoyen qui filme tel ou tel événement ? Le simple fait de filmer devient une infraction, voire un crime, et cela est inacceptable dans un état de droit. Place de la République ou dans le 17e arrondissement, ce sont les images qui ont permis de dénoncer les agressions policières. Que se serait-il passé, sans ces images ? Combien de personnes sont aujourd’hui mises en cause quand des policiers font des faux en écriture publique ? 

La loi sur la sécurité globale comporte bien d’autres dispositions pour le moins dangereuses, reléguant un peu l’article 24 au rang d’épouvantail ou de symbole. Et ce sont bien de telles initiatives parlementaires, teintées de basses préoccupations électoralistes, comme l’attitude des pouvoirs publics et des hiérarchies qui, en ce qui concerne les forces de l’ordre, peuvent être de nature à faire naître un sentiment d’impunité chez certains fonctionnaires qui laissent alors leurs bas instincts s’exprimer.

Quant aux violences exercées en fin de manifestations par des groupes infiltrés, elles ne peuvent pas être simplement renvoyées en miroir aux agressions et aux actes délictueux des forces de l’ordre. Ce n'est qu’une poignée de personnes qui tente d'imposer par la force leur stratégie de contestation à des centaines de milliers d’autres manifestants pacifiques. Ces violences sont le fait d’idiots utiles du conservatisme qui brouillent le message, celui de garder nos droits démocratiques, exprimé par une large majorité de manifestant.es.

À force de dérives autoritaires vers l’extrême-droite, le gouvernement et le président de la République, nous font naviguer dans des eaux troubles, sous un vent mauvais, vers des rivages où la liberté se restreint.

Ce sont au contraire les chemins du respect, de l’égalité des droits, des libertés et de la résolution des problématiques sociales, économiques et démocratiques qui mèneront à une société apaisée.

En lien, le communiqué de la coordination StopLoiSécuritéGlobale : https://www.snj.fr/article/le-peuple-de-la-libert%C3%A9-march%C3%A9-partout-en-france-contre-la-loi-s%C3%A9curit%C3%A9-globale-651242016