Pour justifier la cure d'austérité qu'il compte imposer au plus grand nombre (en épargnant les 10 % les plus riches) le gouvernement, évoque tour à tour et/ou en même temps, le déficit, le trop plein de dépenses publiques auxquelles les Français seraient addicts, et la dette.

La dette, mais quelle dette ?

Avec la problématique de la hausse, jugée inconsidérée, de la dépense publique, celle de la dette est régulièrement invoquée pour exiger de la plus grande masse de nos concitoyens, d’incommensurables sacrifices.

Le niveau des dépenses publiques d'une année, rapporté sur une même période au PIB, est relativement stable en France depuis 2010 (entre 56 et 57 %).
En 10 ans, entre 2007 et 2017, la dépense publique a augmenté de 3,7 points.
Dans le même temps, le PIB réel a augmenté de 7,81 %.
La dépense publique peut donc être facteur de croissance
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Rappelons aussi que le haut niveau de dépenses publiques constaté en France est le fruit de choix politiques : mutualiser et socialiser les dépenses d'intérêt général. Ailleurs, elles sont prises en charge (en partie) par la dépense privée. C'est pourquoi les comparaisons internationales doivent être abordées avec prudence, d'autant que les structures administratives sont différentes selon les pays : ces différences pèsent à hauteur de 5,5 points dans le niveau des dépenses publiques en France.

La culpabilisation n'est jamais loin de la dramatisation dans le discours politico-médiatique porté par les apôtres du néo-libéralisme.

Contrairement à ce qui est fréquemment avancé pour dramatiser la question de la dette chaque nouveau-né n’hérite pas que d’une dette. Il hérite aussi d’un patrimoine. La France est l’un des pays qui détient le plus d’actifs financiers (estimés fin 2009 à 873 milliards d’euros, soit près de 47 % du PIB) : si l’on considère, comme le fait le « discours ambiant », que chaque nouveau-né hérite de 29 500 euros de dette publique, alors il faut en toute honnêteté préciser qu’il hérite aussi de 22 200 euros d’actifs non financiers publics, et de 14 000 euros d’actifs financiers publics et donc, au final, d’un « net » de 6 700 euros…

Difficile d'y voir clair et de décrypter pleinement les analyses où s'entremêlent savamment les concepts de dette, de déficit public et de dépenses publiques.

Personne n'est par exemple capable d'affirmer qui sont nos créanciers ? Personne ne nous indique quand et comment nous devons rembourser cette dette, de quoi elle est composée.

Un audit public de la dette serait ainsi utile à la clarification du débat.

La dette est par ailleurs toujours comparée au PIB, la richesse produite en une année, mètre étalon des analyses économiques. Effectivement, le rapport entre une dette globale, dont le remboursement s'étale sur plusieurs années, et la richesse produite en une année, conduit à une conclusion triviale : la faillite ! Ici, la comparaison avec un ménage (puisque le ministre de l'économie l'utilise, pourquoi pas nous !) peut-être intéressante : c'est comme si vous compariez le montant de vos salaires d'une année au montant de votre crédit immobilier sur l'intégralité de sa période d'amortissement : vous seriez ruinés ! Contrairement à un état, qui ne s'en prive pas, l'accès au crédit d'un ménage est fortement lié à ses capacités d'endettement…

En clair, la dette publique ne provient pas d’une « dérive » inconsidérée et irresponsable de la dépense publique, mais d’une série de facteurs plus « classiques », parfaitement explicables et aisément justifiables :
il y a une hausse réelle des besoins qui, dans certains pays comme la France, sont pris en charge par la dépense publique là où ailleurs, c’est la dépense privée qui intervient (notamment en matière de protection sociale : assurance maladie, retraites…),
la part de l’investissement public est significative (or, s’endetter pour investir est normal),
cette hausse des dépenses n’a pas été intégralement financée du fait des baisses d’impôt notamment,
le mode de financement de la dette publique a mis les comptes publics sous la pression des marchés financiers.

Nous ne sommes donc pas face à de simples choix économiques et/ou budgétaires empreints de pragmatisme et d'une certaine orthodoxie (les 3 % sont un prétexte bien facile), mais confrontés à des choix politiques et donc idéologiques. Chacun est à même de juger de la nocivité des orientations du gouvernement qui pourraient trouver une première et sévère traduction dans la loi de finances pour 2018, à nous de savoir si nous y souscrivons, ou si nous les combattons.

Pour Solidaires Finances Publiques, le temps est à la résistance et au combat pour une société plus juste et plus solidaire.

Solidaires Finances Publiques s'associe ainsi à l'appel à la grève lancé pour le 12 septembre. Il appelle tous les agents de la DGFIP à se réunir pour décider d'y participer et des suites à y donner.

pdfL'austérite en point de mire (III)