L’Union Européenne est à la croisée des chemins. L’échec du débat sur le « traitement » des dettes nées de la crise (mutualisation des intérêts, caractère perpétuel de cette dette) a montré toutes les fragilités et le poids des dogmes. Au-delà des mesures d’urgence prises au sein de l’Union Européenne, le risque est immense de subir une vague d’austérité et de voir se poursuivre une concurrence fiscale et sociale dévastatrice qui pourrait à terme l'emporter.

Une véritable sortie par le haut implique une autre orientation. Outre le débat sur le traitement de la dette née de la crise, nécessaire pour éviter des années de politiques austéritaires, la politique fiscale doit également changer de cap.

Le serpent monétaire européen limitait les écarts entre les monnaies : un « serpent fiscal européen » tel que notre organisation le propose de longue date pourrait limiter les écarts entre les systèmes fiscaux et engager un processus d’harmonisation qui neutraliserait la concurrence fiscale et sociale européenne. En l’absence d’unanimité, requise en matière de fiscalité, il pourrait s’engager dans le cadre d’une coopération renforcée.

Plusieurs mesures doivent être prises en ce sens :

  • l’harmonisation des assiettes de l’impôt sur les sociétés (IS) couplée à l’instauration d’un taux effectif d’IS "plancher" (calculé sur la base harmonisée) intégrant les activités numériques. Il s’agit d'éviter les transferts artificiels de richesse et de bénéfices pour imposer la richesse là où elle est créée.
  • l’harmonisation de la TVA avec l’instauration d’un taux "plafond" afin d’éviter une dérive à la hausse, ce qui permettrait par ailleurs d’en finir avec la fraude carrousel qui exploite les failles du système de la TVA intracommunautaire.
  • le renforcement de la coopération et des moyens pour mieux lutter contre la fraude fiscale.
  • la création d’impôts européens (impôt sur les sociétés, impôt sur la fortune européen, taxe sur les transactions financières…) qui permettraient de revaloriser le budget européen. Ceci permettrait de financer des investissements publics en matière de besoins sociaux et de transition écologique par exemple.

Ces mesures ne seraient pas seulement budgétairement rentables. Elles montreraient que l’Union Européenne n’est plus une zone de concurrence qui met les systèmes sociaux et les services publics sous pression. Elles permettraient aussi de renforcer le consentement à l’impôt, pilier des démocraties. Elles seraient tout simplement le signe que le « monde d’après » sera plus juste.