Un CTM (Comité Technique Ministériel) s'est tenu le 3 juillet 2020.

liminaire

Dans cette crise, nous en sommes peut-être à une forme de « mi-temps ».

Le terme est du registre sportif, mais il est aussi impropre. Car, lors d’une mi-temps, on ne marque pas de points. Or, la Covid, elle, est restée sur le terrain… En fait, nous ne savons pas non plus si la deuxième mi-temps aura bien lieu. Mais des avis autorisés (à commencer par l’OMS) se prononcent plutôt en ce sens. Tout ceci n’empêche évidemment pas de procéder à une analyse de la première période de ce match État versus Covid-19.

Elle fut évidemment terrible. Pour continuer à filer la métaphore sportive, l’adversaire nous a cueillis à froid. Il nous a outrageusement dominés et nous avons trop rarement pris le jeu à notre compte.

Passons les lignes de notre équipe en revue (on vous laisse choisir dans chaque cas s’il s’agit de l’attaque, du milieu ou de la défense, voire du banc de touche...).

A titre général, il est clair que l’équipe État était en impréparation assez totale. La stratégie du manque a diffusé du plus haut sommet de l’État aux confins des directions territoriales.
Il y a là, à la fois, une question d’organisation, de comportement et de matériel. On parle ici tout autant, dans ce dernier cas, des matériels de protection comme des systèmes et équipements informatiques.
Nos politiques et autres élites n’ont pas brillé dans l’anticipation de cette crise. Il s’agit là d’une forme d’euphémisme ultime… Dans la gestion, le message fut parfois brouillé, voire brouillon. Il y eut bien sûr des actes, des décisions et des personnes qui furent plutôt à la hauteur des enjeux. Mais on ne peut dire que ce fut, tout au long, une ligne de but cohérente et convaincante. Ici, nous pouvons citer par exemple l'un de nos Ministres nous disant que le Président de la République n’avait pas ordonné le confinement. Certes, le mot n’avait pas été utilisé lors de « l’allocution de guerre ». Mais le sens général était bien celui-là.

Dans la série des décisions un peu étranges, nous citerons cette histoire de prime spéciale. Bizarre de voir qu'au moment où fédérer, de jouer en équipe, est encore plus un élan vertueux, on nous pousse plutôt à partir vers la fragmentation… et l’individuel.

Dans la rubrique des mesures franchement déplorables, nous ne pouvons évidemment pas passer à côté de l'ordonnance sur les retraits de congés et RTT. Elle restera dans les annales de l'administration kafkaïenne, qui arrive à mettre dans une même colère (pour des motifs différents toutefois) agent.es et haut-encadrement.

S'agissant des directions, de manière globale, elles ont fait à peu près ce qu'elles ont pu dans le contexte décrit ci-dessus. Certaines décisions furent plus appréciées que d'autres, dirons-nous, pour tenter de couvrir l'ensemble des cas. Nous retiendrons que le fait d'avoir massivement placé les agent.es en ASA et en télétravail restera un acte fort qui s'est inscrit dans la mobilisation contre la pandémie. En plus du confinement général, ceci a sûrement eu pour effet d'inverser une courbe, celle des contaminations, qui prenait des proportions plus qu'inquiétantes.

Si DGFiP, DGDDI, INSEE et Administration Centrale ont pu apprécier le fait de constituer des « têtes cohérentes », la DGCCRF a pu encore mesurer à quel point son état « d'administration écartelée » est tout sauf un atout. Nous y reviendrons plus largement à la fin de notre propos liminaire.

En ce qui concerne les hiérarchies locales, le bilan est plus contrasté. Le pire a parfois côtoyé le meilleur. Nous avons vu de l'intelligence (au sens premier du terme) et du pragmatisme. A l'inverse, il nous arrivé aussi de déplorer une incapacité à s'adapter, allant parfois jusqu'à un crétinisme débridé. Ainsi, quand on minimise le danger, face à une pandémie, c'est un comportement aussi inadmissible que fautif. Et c'est malheureusement arrivé ici et là.

Bercy est parfois jalousé pour sa médecine de prévention, ses ISST et ses structures de la « galaxie sociale », si on peut employer ce raccourci commode. Dans la crise, tout le monde a pu constater combien ces dispositifs sont encore plus utiles, même si ici aussi, attitudes et comportements ont été marqués du sceau d’une fragile hétérogénéité.

Retour à la rhétorique sportive : si le milieu de terrain devait être incarné dans notre cas, ce serait peut-être par le dialogue social et le rôle joué par les organisations syndicales ministérielles, directionnelles et locales. Toutes ont pris leurs responsabilités, effaçant même, pour ce qui concerne singulièrement SOLIDAIRES Finances et ses syndicats, dans l’intérêt bien compris de la santé des personnels et de la continuité de l’action publique, certaines de leurs revendications. Même les plus farouches opposants (sous cape, il y en a …) en la matière, en ont découvert ou redécouvert les vertus. Là-aussi, c'est une leçon à méditer pour l'avenir.

Et ce serait fort utile par les temps à venir, d'y mettre du contenu et non plus de multiplier les réunions souvent vides de portée, où le but est simplement de cocher la case « dialogue social ».

A SOLIDAIRES nous continuons de porter l’idée que le dialogue social doit évoluer dans sa forme et dans son contenu. Le chemin peut paraître étroit, mais Bercy s’enorgueillirait à trouver cette voie qui permettra, d’une manière ou d’une autre, la prise en compte réelle de la parole syndicale. Dans cet exercice, nous continuons d’affirmer que le rôle et la place pris par la DGAFP sont délétères. D’un autre côté, l’excès de déconcentration peut troubler le jeu de la même manière. Des équilibres sont à trouver, Bercy et ses administrations, au cœur et au centre de l’appareil d’État, sont bien placés pour y parvenir.

Et, si au final, il y a bien un joueur-une joueuse à mettre en avant, c'est le-la travailleur-travailleuse de l'ombre, le-la soutier du quotidien, terme aussi vulgaire que magnifique. En clair : l'agent-e. Il ne faut en oublier aucun-e, y compris au sein des fonctions support et des services informatiques, comme de toutes celles et tous ceux qui au quotidien travaillent à l’entretien de l’ensemble des locaux.

Ce message s'adresse tant à celles et à ceux qui étaient en présentiel qu'à celles et ceux qui ont été amené·es à rester chez eux, pour quelque raison que ce soit. Ils et elles formaient un tout qui a permis la solidification d’une organisation exceptionnelle, dans une période exceptionnelle. Toutes et tous ont participé à cette « administration dans la tempête » et ont vécu la crise professionnellement et personnellement. Nous associerons à cela les termes d'engagement, parfois d'abnégation et même de courage. Et aimerions que celles et ceux qui se plaisent à pourfendre les Services Publics et ces odieux et odieuses fonctionnaires, s'en souviennent, ne serait-ce qu'un peu.

Et maintenant ?

Notre responsabilité (collective) est et demeure forte.

Il s'agit de :
- protéger les collègues,
- veiller à les mettre dans les meilleures conditions pour l'accomplissement de leurs missions,
- construire une administration capable de s'adapter et de faire face aux risques.

Dans ce but, les locaux, le matériel et l'informatique seront à l'évidence des sujets phares.

Le télétravail sera aussi une donnée importante. Bien sûr, il faudra y mettre un cadre et de solides garde-fous A l'inverse, il faudra pratiquer une pédagogie « musclée » à l'encontre de celles et ceux qui estiment que le télétravail est le paravent d'affreuses feignasses. Nous savons qu'une partie de la hiérarchie vit dans l'obsession du contrôle et sombre dans des affres d'angoisse, dès lors que l’agent.e n'est pas une peluche consolatoire à portée de main. Pas sûr que ce soit les cadres les plus modernes soit dit en passant…

A ce titre SOLIDAIRES a produit un document cadre qui exprime notre vision du télétravail. Nous souhaitons évidemment, avec les éléments que pourront sans doute produire les autres fédérations et les syndicats, que cette contribution serve à la réflexion collective. Dans ce domaine comme dans d’autres, il nous semble qu’un cadrage ministériel, une ligne ministérielle, seraient souhaitables, voire indispensables afin de fixer un socle commun à toutes les administrations. Pour SOLIDAIRES le télétravail ne doit pas être considéré comme un outil au service des restructurations ou de la politique immobilière de l’État, mais bel et bien comme un objet d’amélioration des conditions de travail des personnels. Nous n’accepterons pas qu’il puisse conduire à de nouveaux reculs de leurs droits et garanties, une tendance bien trop pesante dans la période.

Les leçons de la crise dans les évolutions de l'administration et les restructurations, dont nous n'aurons pas la naïveté de croire qu'elles sont suspendues, devront être tirées. Nous pensons ici notamment au phénomène de concentration des structures, à leur implantation (maillage) et au dossier des modes et temps de déplacement.

Pour finir sur la note sportive, nous serons bien évidemment attentifs au « score » lorsque retentira le coup de sifflet final. Le terme est trivial certes, mais il est parlant pour rappeler combien votre responsabilité est grande, pour ne pas dire écrasante.

La mi-temps est parfois le moment pour opérer des changements de joueurs-joueuses. Par nature, la plupart de ces dernier-es reviendront sur le terrain dans notre cas. Par contre, nous voulons porter un puissant message pour un changement de tactique de jeu, ou de cap si on veut être plus précis. A notre sens, c'est une nécessité pour la collectivité que nous servons. La Covid-19, virus microscopique et immense, en a apporté une preuve aussi éclatante que cinglante. Reste à voir si celles et ceux qui décident, en tireront les conséquences que beaucoup attendent.

Point particulier sur la CCRF
Concernant la DGCCRF, cette crise sanitaire a mis en évidence deux points que nous souhaitons évoquer aujourd’hui :
- la question des habilitations pour effectuer les enquêtes ;
- l’inefficacité de l’interministérialité particulièrement pendant les périodes de confinement et déconfinement.

Sur la question de la compétence juridique, dès le début de la crise, les enquêteurs et enquêtrices ont été envoyés sur le terrain pour contrôler le prix des gels hydro-alcooliques alors que qu’ils/elles n’étaient pas habilité·es pour le faire.

Puis ce fut au tour du contrôle des gestes barrières !!! A notre grand étonnement, notre Directrice Générale nous a répondu que cela n’était pas un problème et que l’on se devait d’effectuer ces contrôles même sans compétence juridique !!! Pour une administration chargée de faire appliquer strictement des réglementations cela est difficilement audible et nous considérons qu’il s’agit d’une injonction contradictoire !!!

Pour ce qui est de l’interministérialité, les difficultés de cette organisation sont ressorties de manière patente pendant le confinement : difficultés opérationnelles, notamment en matière de télétravail (manque d’ordinateurs, problèmes d’accès aux applications et à la documentation), chaîne de commandement embourbée dans les méandres hiérarchiques, directives et instructions qui arrivent (ou pas d’ailleurs) avec délai,…

Lors des audios hebdomadaires avec la Direction Générale, toutes questions sur ce thème étaient évacuées par un « on ne peut rien faire, nous ne pouvons pas intervenir, c’est du ressort des hiérarchies locales, … ».

Il manque donc un·e interlocuteur-trice, qui a l’autorité hiérarchique, et qui peut donc gérer au quotidien et surtout nationalement les problèmes relatifs aux missions.

A titre d’anecdote il n’y a qu’à examiner les données chiffrées sur la situation administrative des collègues CCRF en DDI et en DIRECCTE – DIECCTE pour comprendre que chaque chef de structure est monarque en son royaume. Ils faisaient, ou pas.

Au sujet des remontées chiffrées il est bizarre d’ailleurs que la Fonction Publique arrive à donner des chiffres de grève dès 10 h alors même que certaines de ses administrations n’arrivent pas à donner, en période de crise, des chiffres en fin de journée… Les chiffres de grève seraient-ils bidonnés ?

L’inefficacité patente de l’interministérialité que SOLIDAIRES dénonce, depuis sa mise en place dans le format actuel, a été mise en exergue à cette occasion.
SOLIDAIRES Finances au cours de l’audio-conférence qui s’est déroulée le 5 mai dernier, en présence du Ministre de l’Economie Bruno Le Maire, l’avait d’ailleurs rappelé. A cette occasion, le Ministre avait déclaré ne pas être satisfait de l’organisation actuelle de la DGCCRF et qu’il souhaitait saisir l’opportunité qu’offrira la sortie de cette crise pour rouvrir le débat sur l’interministérialité. C’est pourquoi, aujourd’hui nous disons reprenons donc ce débat et le plus tôt possible sera le mieux !!!!

Pour SOLIDAIRES Finances la réponse à cette problématique est simple : sortie de l’interministérialité et retour à une administration nationale avec des services déconcentrés de plein exercice…

liminaire ctm 3 juille t2020