CAP 22, une révolution qui fait voler en éclats notre modèle social et son garant : la Fonction Publique !

Si le comité considère que ses conclusions ne remettent pas en cause la place et les grandes missions de service public, il préconise une nouvelle trajectoire et une transformation qui n’a pas connu de précédent. Et pour cause, ce rapport dilapide le modèle social à la française considérant ce dernier, basé sur les solidarités, comme coûteux et archaïque et ne répondant plus à la logique de rationalisation, d’innovation et de performance !

Le monde change, le Service Public doit s’adapter :

Un moyen pour surfer sur la modernité, la révolution numérique, qui transforme les métiers et la vie du citoyen. Le big data et les systèmes d’analyses de données vont permettre de personnaliser les services et de fluidifier l’expérience usager, tout cela en renversant la charge de la mission et la déversant de l’agent sur l’usager… un peu comme les caisses sans caissièr-e ou les plateformes de vente, comme vous scannez vos achats, vous effectuerez vous-même des missions de service public, et plus vous êtes consommateur de services publics, qui ont un coût, actuellement supporté par la société dans son entièreté, et bien là, plus vous paierez ! ! Bravo le libéralisme.

Autre constat des experts : la métropolisation augmente les besoins de services dans les aires urbaines et fragilise la pérennité des services dans les zones rurales vidées, là on est d’accord, mais bon faut pas être expert pour constater ce qui est évident !

Réponse du comité :

Les citoyens ont une attente forte de service public plus accessible et plus personnalisé, là aussi on est d’accord mais, là où tout bascule, c’est dans les perspectives d’évolutions contenues dans le rapport qui vont faire basculer le service public et la fonction publique dans le no man’s land de la concurrence capitaliste où le plus gros écrase le plus faible.

Le projet action publique 2022 est uniquement bâti pour répondre à l’idée libérale de baisse des dépenses publiques. Il revoit, mais nous vous l’avions déjà écrit, la remise en cause de la société et de ses fondements solidaires basés sur la redistribution des richesses et la répartition.

Pour CAP22, les responsables de tous nos maux sont :

  • le régime des retraites
  • la protection sociale
  • le système de santé

Dès lors, on nous annonce comme capital de créer des ruptures ! En commençant par le service public pour tous dont l’objectif d’égalité ne doit plus conduire à un traitement indifférencié, uniforme des usagers. On doit désormais reconnaître que les usagers et les territoires ont des besoins différents auxquels il faut répondre de manière différenciée.

Changer de modèle :

Comment, une paille en revoyant la gestion publique, l’essence même des missions de service public donc. La gestion étant jugée court-termiste et sur des micro-pilotages. Là où le rapport encense la décentralisation, il devient bipolaire parfois en prônant son contraire ; la relecture du rapport a dû elle aussi être court-termiste et micro-pilotée parce qu’incohérente. Au-delà, la gestion publique est régie par des textes qui insistent trop sur la responsabilité personnelle des agents publics plutôt que sur la prise de risque. Et ouais, là encore c’est la base même de la Fonction Publique qui se doit, de par sa déontologie, d’être neutre et qui par cette même déontologie, accorde droits mais aussi obligations et règles aux agents.

Même remise en question du pilotage basé sur une culture du contrôle (effectivement c’est notre job de contrôler le budget, sa conformité et son emploi), pour le comité c’est lourd et freine l’efficience de l’État ! Mensonges et billevesées… qui sans même se cacher remettent en question la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable public (de la DGFiP) lequel est, mais plus pour longtemps, responsable en cas d’erreur, de manquement ou de négligence.

Il nous faudra donc connaître un changement de gouvernance qui fixerait l’action publique, ses objectifs et ses moyens via des contrats pluriannuels.

Il faudra aussi donner de la souplesse en matière de recrutement, car le statut est lui-aussi un carcan puisqu’il oblige à un pilotage par effectifs (ce qui assure aussi les niveaux de recrutement, d’avancement, et de valeur du point d’indice) à un pilotage par masse salariale, lequel permet de contourner le statut, et de générer le recours au contrat.

La mission publique de l’État est jugée trop centralisée, hiérarchique et pyramidale. Le comité d’experts souhaite revoir cette organisation en bâtissant un nouveau contrat social, Rousseau s’il lisait ces lignes se retournerait dans sa tombe !

Rigidité toujours, le cadre RH est trop rigide, bridé par le point d’indice dans les 3 Fonctions publiques. Il faut donc le faire sauter, tout comme le statut qui vole en éclats au point de lire le recours aux contrats de droit privé et à l’apprentissage comme variable d’ajustement ! Ben oui, créons de la précarité en faisant passer ça pour de la modernité ! Le monde change !

La Fonction publique et les managers locaux doivent mettre en œuvre une gestion active de l’emploi qui devra favoriser la reconversion et les départs en cas de restructurations. Collègues, préparez-vous, parce que la DGFiP côté restructurations, elle est force de propositions, et dans le rapport, ils ont plein de bonnes idées nous concernant !

Le rapport préconise la fin des CAP, trop chronophages, organisées lourdement par corps en anticipation des mouvements et non juste en règlements de litiges ! La défense des droits et garanties, ça suffit, ça nuit à l’efficience. Non, le modèle sera celui-ci, bien meilleur, plus efficace :

Un dialogue social local effectué par le manager local qui peut recruter, favoriser l’avancement voire la rémunération et tout cela par seule dérogation locale au cadre de recrutement prévu par le statut… Si le droit de cuissage n’existe plus, attention, CAP 22 est passé par là !

S’agissant des managers, là non plus CAP 2022 n’est pas en reste. On aura compris que le comité n’est pas que composé d’agents publics, peu nombreux effectivement et surtout en marche incontestablement, y compris nos quelques chef·fe·s de bureau de la DGFiP gentils partenaires contributeurs ! Au moins, la diffusion du rapport a eu un intérêt majeur pour nous qui les côtoyons, la levée de l’anonymat !

Attention, danger, le recours à une variété d’expériences croisées est attendue. Expériences croisées État/ collectivités territoriales/ Privé.

Revenons un peu dans le détail de ce que sera le « service public augmenté »

La DGFiP est largement visée dans le rapport, comme administration disposant de données (personnelles, fiscales et sociales) qui permettraient de révolutionner les pratiques en matière de service public.

A cela s’ajoute la question de la proximité des agents publics. Le constat de CAP22 : actuellement, chaque réseau dispose de sa propre offre, basée ils semblent l’oublier de par leur méconnaissance, sur nos missions, nos technicités, nos champs et domaines d’intervention ! ! ! Or le comité dans sa sagesse d’un autre âge, veut faire disparaître chacun de ces réseaux pour développer un accueil unique via les maisons de services aux publics (MSAP).

Proposition 15 et suivantes ! La mort de la DGFiP ou presque sur fond d’inepties et contre vérités

Des préconisations d’experts, pour la plupart issus de think-tank libéraux comme l’IFRAP, du MEDEF et de cabinets privés de conseils, de management... tout sauf uniquement des fonctionnaires et agents publics qui savent analyser l’action publique et cela avec impartialité et neutralité, un devoir du fonctionnaire !

Leur base, notre administration qui s’est dotée et s’est voulue numérique, là n’est pas le sujet ! Mais, le numérique révolutionne le traitement du recouvrement, exemple phare de la mort annoncée d’une des missions régaliennes qui était la nôtre et pour cause : l’impôt, l’État, son fonctionnement…

Objectif affiché par CAP22, le faire passer uniquement via des plateformes de données et un système unique, automatisé, tourné directement vers l’usager. Cette réforme reposant elle-même sur des propositions structurantes :

  • Simplification de la fiscalité, entre autres suppressions de certaines niches fiscales (non citées on se doute pourquoi) et par la suppression de petites taxes ; là encore on voit celles qui, allez on se lance, freinent l’investissement, la compétitivité et l’entreprenariat, non ???
  • Renforcement de l’efficience des « organismes » de recouvrement pour tendre vers un acteur unique, pas nous ! Puisque qu’est clairement signifié ici l’objectif pour la DGFiP de voir baisser ses effectifs et une réorientation de ses missions par transferts.
  • Aller vers un recouvrement 100 % numérique et automatique directement géré par l’usager. Mais tout ceci connaît aujourd’hui un obstacle majeur : la CNIL… dont il conviendra de faire évoluer la réglementation dans un « sens plus favorable » aux échanges de données personnelles entre administrations… La CNIL elle-aussi freine l’efficience, tout ça à cause de la protection des citoyens, c’est pas bien ça ! Se pose, pour Solidaires Finances Publiques, une question lourde de conséquences autour de la confidentialité et la sécurité des données actuellement détenues par la DGFiP qu’elle devrait, devra communiquer, livrer ?

Comme si le chantier du recouvrement ne suffisait pas nous concernant, CAP 22 compte aussi réformer le contrôle fiscal, en l’automatisant… Bien sûr, c’est bien connu, on limite la fraude et on l’éradique par un bon algorithme.

Non content des futurs PAS et suppressions de la TH, le comité prévoit déjà leur réussite pour rationaliser et réaliser des gains d’efficience, mais c’est sans compter les biais et flous autour de ces chantiers majeurs.

Quand CAP22 estime une efficience du recouvrement de l’impôt en l’externalisant, il avoue clairement son manque d’objectivité mais au-delà, et c’est plus grave, sa méconnaissance des résultats de l’action de la DGFiP et son incompétence à formuler dès lors toute préconisation ! Epargnez-nous, et révisez vos données doctes « experts » !

Autre proposition qui là encore prouve leur méconnaissance concernant la DGFiP, celle relative au Zéro Cash ! Inepte au regard des publics que la DGFiP accueille au quotidien dans ses services et pour lesquels il est impossible de payer autrement qu’en espèces !

On vous laissera savourer à sa juste valeur la petite phrase qui énonce que la dématérialisation intégrale des paiements à l’horizon 2020 permettra de lutter contre la fraude fiscale ! Là encore, elle se trompe d’adversaire.

Enfin, dernier chapitre mais non des moindres :

Éviter les dépenses publiques inutiles

« Qui est le plus outillé et le plus légitime »… non non ce n’est pas une petite phrase de Solidaires Finances Publiques mais bien écrit dans le rapport ! Donc tout un programme. L’État est prié d’abandonner tout ce qui est décentralisé. Conjointement, bien sûr, il est chargé de décentraliser encore plus, bref lui-même se désaisit de ses champs d’interventions au profit de gestions locales qui aggraveront les inégalités entre territoires. Des exemples à foison : l’énergie, l’environnement, les transports [on aura une pensée pour nos camarades du Rail] mais aussi l’éducation, la culture, le sport et l’animation… Bref tout ce qui cimente la société du vivre-ensemble.

On ne vous parlera pas de la fonction comptable qui partirait par monts et par vaux, vous ne nous croiriez pas… et pourtant !! On vous le dit, le comptable public de la DGFiP est mort ce 20 juillet, date à laquelle en responsabilité Solidaires Finances Publiques a divulgué le rapport !

Le voilà, le rapport CAP22 !