Le 5 mai, se tenait un groupe de travail "Cadastre" présidé par le Directeur Général en personne.

Les évolutions envisagées sont claires dans leur principe : les géomètres devront se consacrer à la partie "fiscale" de leurs missions, et pour dégager du temps la DG n'envisage rien moins que la "suspension des levés du bâti" ! Comment cela se traduira concrètement ? Rien n'est vraiment clair ni précis. A commencer par la solution "miracle" du report des orthophotos, qui pose techniquement de nombreuses difficultés, y compris avec des éléments de haute précision...

 

La durée du dispositif est également très aléatoire ...

Par ailleurs, le flou régnant sur l'avenir de la RPCU, l'état de la révision des locaux pros (qui se fait sur la papier mais en pratique c'est une autre musique) et les grandes incertitudes sur le devenir de la révision foncière des locaux d'habitation (se fera ? se fera pas ? quand ?) ne donnent pas de vision claire des missions foncières et cadastrales, c'est le moins qu'on puisse dire !

Dans ces conditions, Solidaires Finances Publiques est totalement opposé à ce qui ne serait qu'une totale désorganisation du travail des géomètres et des agents du Cadastre et du foncier.

Liminaire

Monsieur le Directeur Général,
Si nous nous limitions aux titres, nous ne pourrions que souscrire au nécessaire renforcement en matière de FDL, que nous appelons simplement service public, et donc à une sollicitation plus importante des géomètres sur la mission fiscale du Cadastre.
Mais de la même manière que nous avions dénoncé le désengagement opéré depuis 15 ans, nous ne pouvons pas approuver le revirement brutal d'aujourd'hui. Les missions cadastrales, topographiques, foncières, ne sont pas concurrentielles et opposables. Elles sont indissociables et complémentaires.
Il ne fallait pas faire CDI – CDIF,
il ne fallait pas abandonner la formation initiale des contrôleurs au foncier,
il ne fallait pas geler en l'état une situation à mi-chemin,
et il ne fallait pas poursuivre avec SIP – CDIF, même si les conditions n'étaient plus identiques.
Il faut reconstruire un service foncier, sur la base de ce qui a toujours fait son efficacité : la compétence et la technicité des agents. Aujourd'hui, cette technicité est éclatée entre différents services : SDIF, SIP, PELP, SFDL, ... et PTGC. La DGFiP ne peut se passer d'aucun d'entre eux, mais ce n'est pas en explosant les pôles topo PTGC pour les surajouter au puzzle que l'on va répondre aux enjeux des bases locales. En revanche, on va affaiblir la mission topo !
La dégradation du service public rendu aux collectivités est hélas ancienne, durable, et ne tient pas qu'à la fiabilité des bases. Cela fait bien longtemps que nous dénonçons les dérives vers un service public à deux vitesses. Secteur public local, publicité foncière, consultation domaniales et service foncier, remaniements, tournées et commissions, toutes ces missions ont subi des réorganisations qui ne sont pas sans conséquences. Qu'elles soient directes ou indirectes, sur le maillage et l'implantations des services, en terme de présence, en matière calendaire, c'est l'accumulation de ces conséquences qui alimente l'insatisfaction des élus, le sentiment d'abandon des zones rurales ou périphériques, cette France à 2 vitesses qui parfois va jusqu'à se sentir en marge de la République. Comme d'autres services publics, la DGFiP a, ni plus, ni moins, contribué à ce repli.
Ce n'est pas en délaissant d'autres missions ou d'autres composantes de la mission que la DGFiP retrouvera la cohérence nécessaire. Ce n'est pas non plus en ressortant de vieilles ficelles qui n'ont pas fonctionné : référents, conventions de partenariat, ... que l'on résoudra l'équation. Les référents, il faut les trouver, les former, et leur dégager le temps nécessaire. Les conventions, il faut les respecter !
Pour que l'intention devienne volonté, il faut une colonne «moyens» face à la colonne «action».
Ne changez pas d'erreur, changez de méthode !
L'exigence des collectivités locales en matière de fiabilité des bases n'est pas nouvelle. Il y a plus de vingt ans que certains cabinets privés font leur beurre avec le manque à gagner, souvent exagéré, parfois artificiel, mais de plus en plus souvent avéré, que génèrent les écarts et retards de mises à jour. La mise en place chahutée de la CET a rendu les élus peu enclins à assumer les hausses de taux ou les conséquences prévisibles de la révision foncière. Le retard chronique des délais de publicité foncière a accru la difficulté. La pression budgétaire imposée par l’État n'a fait que rendre ce problème plus impérieux. Solidaires Finances Publiques n'acceptera jamais que les agents soient rendus responsables de cette situation. La DGFiP paye aujourd'hui le poids des 46 % d'emplois supprimés en publicité foncière, et du tiers de ceux qui l'ont été au Cadastre. Ceux qui restent ont été et sont encore excessivement sollicités, tant dans les SPF que, révision foncière oblige, dans les CDIF, SDIF, SIP, PELP, SFDL, et à GF3A. Soyez en conscients !
La suspension des travaux de levé du bâti est un choix périlleux, totalement incompréhensible.
Car si le taux de couverture s'est améliorée, au péril du fiscal d'ailleurs, ces progrès sont relatifs et surtout réversibles. L'érosion continue des effectifs de géomètres hypothèque lourdement la force de travail pour l'ensemble des missions.
Nous ne pouvons pas laisser dire que la représentation du bâti sur le plan n'aurait plus d'utilité fiscale ! Le cadastre est un inventaire complet des propriétés bâties et non bâties, dans leur consistance, leur évaluation et leur rattachement à un propriétaire. Les mises à jour doivent être concomitantes. La DGFIP en est responsable de par la Loi ainsi que le décret de 1955; il est nécessaire aux évaluations d'office.
Les conventions stipulent, notamment en contrepartie des engagements des départements sur la numérisation et la vectorisation, que les directions s'engagent à livrer, annuellement aux communes un plan cadastral mis à jour. Et de toute façon le travail qui ne sera pas fait, il faudra bien le faire un jour ! Et le travail mal fait, il faudrait le refaire !
Le Plan Cadastral, les bases foncières, ont déjà fait les frais de la mise en œuvre systématique de procédés cherchant à gagner du temps. On a surtout beaucoup perdu en qualité. Il est certes des situations dans lesquelles l'utilisation des orthophotos peut être pertinente. Il est une grande majorité de situations où ce n'est pas le cas. L'impact du relief, la manière de pratiquer les levés à partir des orthophotos, entraînent de multiples aléas, vont générer des contentieux et une perte accrue de niveau de précision. Existerait-il une version moderne de l'avion renifleur de parcelles ?
La fiche qui nous est soumise omet d'intégrer de nombreuses charges de travail. Il faudra bien répartir le travail entre la manière allégée ou non.
Quel serait le niveau « acceptable » d'altération de la représentation du réel ?
Comment se ferait le « report centralisé » ? En local, en national, en externalisé, par un logiciel automatique ?
Si on fait le lien avec certaines revendications des géomètres experts, on ne peut qu'être inquiets.
A ce stade, ce qui est clair c'est l'atteinte à l'intégrité des missions topo, ce qui est flou c'est la mise en œuvre du dispositif et son efficacité.
Pour Solidaires Finances Publiques, il n'est pas envisageable de gérer les attentes et contraintes, qui ont été d'ailleurs largement générées par les choix stratégiques de la DGI puis de la DGFiP, en procédant à un nouveau revirement sacrificiel. Il est nécessaire de renforcer, dans la perspective de la RPCU, la fiabilisation du Plan, et cela passe par les remaniements.
La DGFiP dispose encore en matière cadastrale de ressources internes permettant par exemple de recaler tous les îlots et de pratiquer des déformations élastiques.
Il faut certes redonner aux géomètres toute leur place en matière d'expertise, de liens avec les communes et les élus, notamment au travers des CCID. Mais on ne peut pas leur demander de suppléer à la carence de techniciens générée par l'abandon de la formation initiale des contrôleurs et par la suppression de ceux qu'on appelait les B terrains !
Les géomètres ne doivent pas devenir des renforts à la carte, même sous les titres galvaudés et jamais reconnus de « référents » ou de « tuteurs ». Ils avaient une place essentielle dans la dimension fiscale de leur métier, dans la continuité de leurs attributions.
Il faut redonner du sens et de l'équilibre à la sphère cadastrale et foncière dans son ensemble, et non pas tomber dans un nouveau déséquilibre.
Solidaires Finances Publiques est prêt à s'inscrire dans une véritable reconstruction durable des missions foncières, mais n'acceptera jamais que ce soit par une désorganisation précipitée et au prix de la technicité et de la doctrine d'emploi des géomètres et des agents du Cadastre.