L'ordre du jour du CTR du 6 octobre prévoyait la mise au vote de l'extension de l'expérimentation des Centres de Gestion Financière (CGF) à 6 autres directions pour le 1er avril 2021. La création de ces nouvelles structures résulte de la fusion des centres de services partagés (CSP) relevant de l'ordonnateur et des services facturiers (SFACT) sous l’autorité du comptable. Face à nos interrogations dues à l'absence de documents suffisants et à l'issue de nos interventions, l'adminisitration a accepté l'organisation d'un groupe de travail dédié pour nous présenter plus d'éléments de fond et reporté le vote de ce sujet au CTR du 9 novembre.

La liminaire de ce groupe de travail est en accès libre et le compte-rendu en accès adhérent (n'oublie pas de te connecter avec tes identifiants pour le voir apparaître !)

 

Liminaire

Pour Solidaires Finances Publiques, l’expérimentation du rapprochement CSP/SFACT constitue l’étape supplémentaire logique de l’intégration de la chaîne de la dépense publique et de la finalisation des services facturiers.

Derrière les mutualisations, simplification ou modernisation se cachent souvent des abandons de tâches, des régressions de la qualité du service public et des dégradations de l’exercice des missions. Nous prenons donc cette énième réforme avec circonspection.

Les Centres de Gestion Financière constituent des entités globales qui demain pourront quitter la DGFiP pour rejoindre les services de l’ordonnateur. Ces CGF concernent certes pour le moment les services des ministères de l’État. Mais qu’en sera-t-il quand vous étendrez cette organisation aux services facturiers dans le secteur public local comme vous le faites pour toutes les réformes des chaînes financières ? La question se pose d'autant plus que certains professent l’abandon du principe de séparation des fonctions, parce qu’ils considèrent que l’exécution de la dépense publique ne présente aucune spécificité.

La remise en cause du principe de séparation ordonnateur/comptable, c’est la banalisation de l’utilisation de l’argent public. La séparation ordonnateur/comptable reste un principe essentiel dans une démocratie moderne. Sa remise en cause est une atteinte au contrôle démocratique opéré sur l’exécution de la dépense publique.

L’ordonnateur, rappelons-le, n’est que l’exécutif, parfois l’exécutant d’une autorisation budgétaire délivrée par une assemblée, le Parlement pour l’État et ses établissements publics nationaux, les assemblées délibérantes pour les collectivités territoriales. Le contrôle du comptable public porte notamment sur le respect de la régularité formelle de l’autorisation budgétaire. C’est donc un contrôle de l’exécution d’une décision démocratique. Certes, il ne s’agit que de régularité formelle et non substantielle. Mais la démocratie, c’est aussi le respect de règles formelles et de procédures.

Solidaires Finances Publiques est attaché, vous l’aurez compris, au principe de séparation ordonnateur/comptable. Nous pouvons regarder et accepter le déplacement du curseur entre l’ordonnateur et le comptable, mais les fonctions de chacun doivent demeurer distinctes et indépendantes. L’exécution de la dépense, tout comme le recouvrement des recettes, ainsi que la tenue de la comptabilité, doivent demeurer à la DGFiP.

Le respect de la séparation ordonnateur/comptable, comme la pérennité des missions de la DGFiP, constituent pour nous une ligne rouge.

Vous souhaitez supprimer les contrôles redondants ? Pourquoi pas !

Mais c’est de la nature même du contrôle que de revenir sur quelque chose qui a déjà été fait. Les contrôles de l’ordonnateur et du comptable sur la dépense ne portent ensuite pas tous sur les mêmes aspects, y compris pour les contrôles de payeur…

L’expérience montre par ailleurs que, trop souvent, l’élimination des contrôles redondants aboutit à éliminer tout contrôle…

Enfin cette volonté affichée de supprimer les contrôles considérés comme redondants a de quoi faire sourire quand l’administration multiplie par ailleurs à l’envi les contrôles dit internes en noyant les responsables de service sous des contrôles qui pour le coup sont souvent redondants ! Alors quelle est la cohérence ?

Ce groupe de travail, non prévu dans le calendrier initial, a été programmé suite à notre demande de précisions lors du CTR du 6 octobre dernier.

Au 1er janvier 2019, l'expérimentation du rapprochement CSP et SFACT a commencé dans 2 structures. Au 1er janvier 2020, 6 autres structures poursuivaient cette expérimentation pour le bloc 3 (dépenses des ministères économiques et financiers, sociaux et de la culture).

A ce stade, le bilan du rapprochement CSP/SFACT que vous présentez est positif.

Au cas particulier du rapprochement CSP « bloc 3 » et SFACT « bloc 3 » au sein de la DRFiP 35, nous avions souligné que cette expérimentation s'est conduite avec des moyens humains et matériels adéquats. Les agentes et agents ex-CSP et ex-SFACT ont travaillé en binôme afin de mutualiser leurs connaissances. Le temps consacré à la formation leur a permis une maîtrise de la chaîne de travail et leur a apporté une vision d'ensemble.

Par ailleurs, nous avions également souligné que le contexte local était favorable à un rapprochement naturel de ces deux entités : les agents se connaissaient déjà et travaillaient déjà en étroite collaboration. Cette nouvelle structure leur a permis d'y trouver un enrichissement fonctionnel en appréhendant la mission avec un plus large spectre dans un contexte serein.

Au passage, nous vous rappelons que Solidaires Finances Publiques a toujours souligné et attaché de l'importance à ce que les agents connaissent la globalité de la chaîne de travail dans laquelle ils évoluent.

Tous les pré-requis de cette expérimentation ont été réunis pour permettre le bon fonctionnement de ce nouveau service. Comme quoi, quand la temporalité et les moyens suffisants sont fournis, une évolution peut être positive.

Cependant, nous avions ajouté que ce résultat positif ne préjugerait pas de la réussite de toutes les créations de ces nouvelles entités. Les moyens disponibles et la formation des agents demeurant la condition sine qua none du succès.

Et, après avoir pris contact avec d'autres structures de la 2ème vague, le constat n'est effectivement pas le même. Sans citer de département, nous avons eu connaissance de difficultés dans ce rapprochement.

La plus grande difficulté a été l'absence de communication claire sur les modalités de ce rapprochement qui, du coup, a été vécu comme une absorption du CSP par le SFACT plutôt que comme un rapprochement. Les agent·es du CSP, non informé·es par leur hiérarchie des modalités de transfert, l'ont subi avec une certaine violence. A titre d'exemple, ces agent·es ont été informé·es de leur déménagement le jour même ! Par ailleurs, la formation n'a pas réellement été efficace. En l’absence de soutien hiérarchique, les agents se sont sentis livrés à eux-mêmes. Cette adaptation a été plus complexe pour ceux du CSP qui sont passés d'un travail de masse à des tâches nécessitant plus d’expertise.

De plus, à ces difficultés s'est ajoutée la période de confinement qui a accentué des difficultés pré-existantes et la Covid-19 n'est pas la source de tous les maux, ni le pangolin par ailleurs !

C'est pourquoi nous rappelons que toute nouvelle expérimentation doit être anticipée et préparée bien en amont. Un accompagnement des directions locales est nécessaire. L’expérimentation ne peut pas être décidée sans tenir compte de la conjoncture. Parfois elle devra être repoussée, en particulier si les services rapprochés connaissent une forte rotation des personnels.

Lors du CTR du 6 octobre dernier, nous vous avons interrogés sur plusieurs points :

  • Quelle est la nature du conseil supplémentaire apporté à l’ordonnateur ?
  • La fluidité alléguée de la fin de gestion ne résulte-t-elle pas plus d’une amélioration de la communication que de la réforme de structure proprement dit ? Les contrôles comptables sont-ils effectifs en la matière ?
  • Qu’entendez-vous par le repositionnement des contrôles en amont de la chaîne ?

Les fiches préparatoires à ce groupe de travail répondent en grande partie à cette première série de questions.

Il aurait été au passage préférable d’en disposer avant le CTR…

  •  Nous voudrions par ailleurs connaître la charge travail/emplois avant et après la fusion CSP/SFACT.

A l’exception du dernier point pour lequel nous ne disposons pas d’éléments chiffrés, nous reviendrons sur ces points dans l'examen des fiches que vous nous avez fournies.

Nous ne résistons pas à l’envie de reprendre les expressions figurant dans la fiche de présentation du CGF et à les rapprocher d’autres réformes en cours dans le secteur public local:

Vous évoquez ainsi :
- « une amélioration du service rendu aux services prescripteurs et aux fournisseurs qui ont désormais un interlocuteur unique » ;
- ce rapprochement apporterait « une fluidification de la chaîne de la dépense» ;
- « une meilleure compréhension de la chaîne de la dépense » par les agent·es de bout en bout ;
- « un enrichissement des missions des agent·es qui bénéficient d'une vision globale de la chaîne de la dépense en traitant un dossier de bout en bout » ;
- « cela permet une meilleure circulation de l’information ». Jusqu’ici, les deux services répondaient aux interrogations des ordonnateurs, parfois sur les mêmes dossiers, pouvant amener des réponses différenciées. Dorénavant un seul service est saisi, disposant d’une vision complète à la fois outil et réglementaire, garantissant une réponse adaptée aux services prescripteurs. La mise en œuvre d’un CGF limite ainsi les risques d’interprétations divergentes et permet d'harmoniser les positions. De plus, les ordonnateurs n’ont plus à s’interroger sur le service à saisir alors qu’auparavant, il fallait pour certaines questions, posséder une connaissance approfondie des circuits de la dépense pour déterminer le bon interlocuteur. »

Si la réforme aboutit vraiment à cette amélioration, nous ne pourrions que partager votre enthousiasme…

Pourquoi dès lors la DGFiP s'évertue à casser d’autres chaînes de travail qui sont aujourd’hui pleinement intégrées ?

Pour ne s’en tenir qu’à la seule Gestion publique et éviter une longue litanie, pourquoi supprimer l’interlocuteur unique des collectivités locales et rompre le lien indissociable entre le conseil et la gestion avec la création des SGC et des CDL ?

Quand la teneur de ces propos (les vôtres) nous conforte, la teneur des actes de la Direction Générale nous échappe…