Le nouveau Président de la République, Emmanuel Macron, a porté comme idée pendant sa campagne électorale la volonté de supprimer la taxe d'habitation pour 80 % de la population. Cette Taxe d'habitation est jugée très variable suivant la commune, inéquitable et pesant lourd sur les ménages. La limite d’exonération serait fixée à 20 000 € de RFR par an et par part. Ainsi un couple sans enfant ne serait plus soumis à la TH si son RFR est inférieur à 40 000 €...

Analyse :

Toucher à la taxe d'habitation est une question complexe sous plusieurs aspects. Elle représente à elle seule plus de 28 % du revenu des communes et des intercommunalités soit un peu plus de 22 milliards euros en 2015.

Son assiette est basée sur des valeurs locatives, elle-même établies en 1960 pour le foncier non bâti et 1970 pour le bâti. La révision générale engagée en 1990 n'a jamais abouti. Malgré des coefficients d'actualisation plus ou moins pertinents et arbitraires, les règles demeurent anciennes, obsolètes et injustes. Le processus de révision des bases, très long, demeure en cours...

Rappelons que globalement les impôts locaux ont eu tendance à augmenter ces dernières années sous l'effet de plusieurs facteurs :
- transfert de compétence de l'état non intégralement compensé,
- réduction des dotations de l’État,
- hausse des besoins économiques et sociaux.

Exonérer 80 % de la population représenterait un manque à gagner de 10 milliards pour les communes... Bien évidemment, une telle somme devra être compensée d'une manière ou d'une autre. Dans son programme, le Président de la République donne peu de pistes. Le seul engagement pris indique que l'Etat prendrait à sa charge le différentiel à l'euro près sur une base des taux de 2016. En dehors du fait que cette compensation peut toujours être revue à la baisse sous prétexte d'une rigueur budgétaire accrue, il faudra bien que l’État trouve, au moins dans un premier temps, ces 10 milliards d'Euros. Ceux-ci peuvent être financés par : une hausse des impôts, une baisse des dépenses ou ces deux options combinées. Notons que devant ce dilemme, une autre piste bien que non évoquée, pourrait être envisagée : rendre payantes des activités proposées aujourd'hui gratuitement par les communes ou en augmenter le reste à charge pour les citoyens... En clair, tout le monde contribuerait...

Outre que l’exonération n'impacterait pas les personnes les plus modestes, le fait que seuls 20 % de la population paieraient cette « nouvelle » taxe d'habitation pourrait avoir un effet délétère sur le consentement à l’impôt et provoquer un vif ressentiment pour les personnes encore touchées par cette taxe.

Pour Solidaires Finances Publiques, une telle exonération massive n'est pas une solution. Nous portons la demande d'une remise à plat des bases de calculs via une révision des valeurs locatives, avec la mise en place d'une taxe progressive et plafonnée en fonction des revenus. De même, un meilleur équilibre devra être trouvé entre la CFE payée par les entreprises et les particuliers. À l'heure actuelle, après 35 000 suppressions d'emplois, penser que l'on puisse mener à bien cette révision foncière relève de la plus grande utopie. D'où l'absolue nécessité de donner à la DGFiP tous les moyens humains et budgétaires pour mener à bien ce travail de longue haleine, en lien avec les collectivités territoriales, un travail indispensable à une plus grande équité et à une meilleure acceptation de l’impôt.