Après s’être fait attendre depuis le 26 mars dernier, le courrier de M. Darmanin est enfin (sic) arrivé dans les boîtes des organisations syndicales représentatives.
Le Ministre, dans sa missive, fixe le cadre de plus en plus restreint de la future DGFiP. Les objectifs affichés ne relèvent pas d'une primeur puisque le Ministre a d'ores et déjà fait des annonces médiatiques et malheureusement nos analyses se confirment :
- une présence territoriale modifiée et amoindrie,
- des services délocalisés,
- des changements d'orientation et l'externalisation de certaines missions,
- de nouvelles organisations de travail,
- et bien sûr pour accompagner le tout un suivi personnalisé et collectif des agents dans leur mobilité fonctionnelle ou géographique…
Il ne s’agit pas là de spéculation mais bien d’une réalité, celle d’un projet porté politiquement qui aura des conséquences concrètes sans tarder pour les agent.es et les missions de la DGFiP...
Focus sur chacun des items ministériels :
- La présence territoriale de l'administration : avec la « déconcentration de proximité » ou « géographie revisitée », la conceptualisation de M. Darmanin est, du moins officiellement, d'offrir aux concitoyen.nes un service public spécifique et approprié dans les territoires ruraux ou socialement en difficulté. Cela se décline selon le Ministre par une forme rationnelle et non traditionnelle du service humain de proximité avec la densification des accueils de proximité. Ceci passera par le développement de l’accueil sur rendez-vous, des permanences, mobiles et fixes, avec une structure par canton et un accès à moins de 30 minutes, mais la possibilité de transformer les trésoreries en maisons « France Services ». Sur ce premier point, le Ministre confirme des choix déjà effectifs comme l’accueil sur rendez-vous. Il remet en place les permanences dans les collectivités locales qui existaient autrefois quand les effectifs permettaient de les assurer. Quant à la possibilité pour les trésoreries d’accueillir les maisons « France services », il est tentant de lui répondre : « s’il faut accuellir ces services au plus près de nos concitoyen.nes, cela veut donc dire : maintenons et renforçons le réseau de proximité de la DGFiP et stoppons les fermetures ».
- Sur la délocalisation de certains services, et donc de certains agents, des métropoles vers les territoires ruraux, M. Darmanin confirme son annonce du 8 mai sans donner plus de précisions sur le type de service et le nombre d'agents si ce n’est que cette délocalisation serait rendue possible par le télétravail et le travail à distance.
- Concernant les missions, il annonce la réflexion bien avancée, pour ne pas dire aboutie, du transfert de la mission cadastrale vers l'IGN. L'évolution du contrôle fiscal vers une mission de conseil est confirmée, l'unification du recouvrement fiscal et social est en cours de réflexion, les services de publicité foncière allégés via la dématérialisation des échanges entre les services et les notaires semblent bien engagés. Pour les missions de la gestion publique, il entend poursuivre les expérimentations du compte financier unique et les agences comptables tout en maintenant la séparation ordonnateur-comptable (au risque de se bercer d’illusions…) mais en ayant une réflexion sur la responsabilité de l'ordonnateur et de la responsabilité personnelle et pécuniaire (RPP) du comptable public. Tiens tiens...
- Enfin, M.Darmanin aborde le volet social qui doit permettre aux agents de s’adapter à ces transformations profondes de notre administration. La partie indemnitaire est mise en avant avec la mise en œuvre de l'indemnisation des mobilités géographiques et la garantie du maintien de la rémunération, un accompagnement en termes de formation professionnelle de haut niveau. Les conditions de travail semblent avoir une attention particulière de la part du Ministre, sur ce sujet il semble que le baromètre social y soit pour quelque chose ! Cette approche nous rappelle d'autres temps : un autre Ministre qui avait lui aussi une ambition libérale pour Bercy, déclarait « il n'y aura pas de perdant dans les réformes » et chaque agent.e a vu au cours de ces années passées où cette « ambition » nous a menée.
En conclusion, dans cette lettre de cadrage, il n'y a pas de nouveauté même s’il reste à préciser ce que veut dire dans l’esprit du ministre l’accueil de maisons France service par les trésoreries... Mais une chose reste certaine : seule une mobilisation d'ampleur portera une autre ambition, celle d'une administration de missions, de plein exercice avec un réseau et des moyens renforcés et des conditions de travail et des rémunérations dignes des agent.es et des missions qu'ils exercent au service de l’intérêt général.
Bien sûr, tout cela se fait dans un cadre de concertation élargie : organisations syndicales, élu-es et préfets. Les syndicats devront rendre leurs observations dans le délai d'un mois ! Inutile de dire que les nôtres seront très éloignées de celles du gouvernement… mais qu’elles défendront sans relâche les agent.es et les missions de service public !