Les révélations sur les paradis fiscaux ne font malheureusement que confirmer ce que de plus en plus d’observateurs et de citoyens savaient ou supposaient : ces territoires offrent non seulement une fiscalité faible voire nulle (surtout pour les non-résidents) mais aussi une opacité juridique et financière qui bénéficient aux fraudeurs fiscaux, à ceux qui se livrent au blanchiment d’argent et également aux spéculateurs.
En la matière, le bilan de l’action des États est désastreux :
- affaiblissement du consentement à l’impôt,
- distorsions de concurrence entre acteurs économiques honnêtes et fraudeurs,
- pertes de recettes publiques se traduisant en dégradation de l’action publique et en report de la charge fiscale sur les contribuables qui paient leur impôt…
Au cours des années 2000, la « liste noire » établie par l’OCDE s’est vidée sans qu’aucun progrès en termes d’efficacité contre la délinquance économique et financière n’ait été constaté.
En effet, dans le même temps, de nombreux États :
- se sont engagés dans la concurrence fiscale,
- ont « oublié » d’adapter la fiscalité aux enjeux (en matière d’économie numérique notamment,)
- ont protégé les paradis fiscaux dont ils étaient proches
- ont mis en œuvre des possibilités d’échapper à l’impôt, dans certaines conventions fiscales bilatérales et dans leurs régimes fiscaux (avec une profusion de régimes dérogatoires)
- et ont réduit les moyens humains, juridiques et matériels de leurs administrations fiscales.
La défense des personnes et entités concernées consiste surtout à dire que leurs montages sont légaux. Mais outre que ceux-ci cachent parfois une réelle fraude, c’est un fait que la législation fiscale est parfois inadaptée, ou plutôt, est adaptée à l’évitement de l’impôt. Cette affaire montre que les possibilités d’éviter légalement l’impôt sont désormais illégitimes et que l’évitement illégal demeure important.
Pour en finir avec ce phénomène, il y a urgence à agir en adaptant la légalisation fiscale et de renforcer le contrôle fiscal.
Certains chantiers intéressants ont récemment été engagés tels que :
- le plan « Beps » de l’OCDE et ses 15 mesures qui consistent à imposer la richesse là où elle est créée : il faut désormais le mettre effectivement et efficacement en œuvre.
- au niveau européen, l’harmonisation de l’impôt sur les sociétés doit être une priorité, elle doit aussi comporter, contrairement au projet de l’assiette commune et consolidée de l’impôt sur les sociétés, une neutralisation de la course des taux à la baisse.
- enfin, un renforcement des moyens des administrations fiscales, douanières et judiciaires engagés dans la lutte contre l’évitement de l’impôt est indispensable.