Les récentes annonces du Premier Ministre concernant la fonction publique confirment les craintes que les fonctionnaires et leurs représentants avaient déjà : le gouvernement entend imposer une profonde remise en cause d’un des piliers du «modèle social» qui, malgré les affirmations péremptoires du discours «anti-fonctionnaires», a historiquement fait ses preuves.

Après des mois d’atermoiements, Édouard Philippe avoue finalement qu’il s’appuiera sur le rapport du comité action publique 2022 qu’il avait choisi de ne pas rendre public mais que Solidaires Finances Publiques, qui se l’était procuré, avait publié en juillet dernier. Ce rapport, de facto à charge, constitue un plan d’attaque frontal et global des principes et du fonctionnement de l’action publique. Prévisible dans son idéologie sous-jacente, il a perdu toute crédibilité du fait de son caractère systématique.

Ses préconisations ne répondent qu’à une orientation qui confine à l’obsession : le recul.

  • recul de l’action publique au profit d’acteurs privés (qui ne travailleront pas gratuitement...),
  • recul de la présence territoriale du service public : la présence territoriale voulue par le gouvernement ne constitue qu’une vitrine ; elle n’offrira pas les mêmes compétences qu’actuellement (c’est particulièrement vrai pour la DGFiP),
  • recul des droits des fonctionnaires pour qui la mobilité forcée devrait singulièrement s’accroître avec les restructurations (de fait, l’accompagnement des agents se fera par une agence qui ne sera qu’un « pôle emploi » de la Fonction publique),
  • recul en matière de rémunération (la perte du pouvoir d’achat est une réalité, l’individualisation fera une immense majorité de « perdants » et sacrifiera la coopération à la compétition) et de promotions et ce, malgré la hausse réelle des qualifications,
  • recul pour celles et ceux qui voudront intégrer la Fonction publique avec la montée en puissance du contrat, qui ajoutera à la précarité ambiante,
  • recul sur les moyens, humains et matériels, etc.

A ces reculs synonymes de provocation, le Premier Ministre ajoute même le cynisme en présentant comme un droit nouveau la possibilité de bénéficier de l’assurance chômage (un nouveau droit est donc né : celui d’être au chômage !) et en réclamant de la transparence de l’État (or, il suffit de lire l’ensemble des rapports et travaux annexés à la loi de finances pour voir que l’État est plus transparent que les acteurs du secteur privé)… De fait, il s’agit bel et bien du plus vaste « plan social » jamais mis en œuvre en France.

Certaines vérités, systématiquement occultées par le gouvernement et le discours «anti-fonctionnaires», doivent être rappelées. La Fonction publique exerce des missions pérennes et durables au service de l’intérêt général, ce qui justifie des garanties (un statut) aux fonctionnaires et des moyens pour les effectuer. Son «poids» rapporté au produit intérieur brut (PIB) n’est pas plus élevé que dans les autres pays européens (entre 13 et 14 % du PIB). C’est la dépense sociale, qui répond à de vrais besoins sociaux, qui fausse les comparaisons internationales en matière de dépense publique car dans d’autres pays, les dépenses relevant de mécanismes privés ne sont jamais pris en compte dans les comparaisons. Son rôle économique et social est déterminant : il amortit les chocs, investit sur le long terme, limite la hausse des inégalités et soutient la demande, source de croissance… Précariser les fonctionnaires n’améliorera pas la situation des salarié.é.s du secteur marchand, au contraire. Organiser le recul de l’action publique pénalisera l’ensemble des citoyens, l’activité économique et la prise en charge de besoins (sociaux, économiques, environnementaux...).

Les fonctionnaires et les usagers seront toutes et tous les victimes de ces choix qui n’ont rien de pragmatiques mais tout d’idéologiques et que Solidaires Finances Publiques dénonce et combattra sans réserve.