Le ministre de l’action et des comptes publics a annoncé, par voie de communiqué de presse du 19 janvier dernier, vouloir retarder et préciser l’application des nouvelles dispositions en matière d’abus de droit.
Envisagée et votée fin 2013 dans le projet de loi de finances 2014, la réforme assouplissant la notion d’abus de droit s’était alors heurtée à la censure du Conseil constitutionnel fin décembre 2013. Cette réforme a cependant été votée dans le cadre portant sur la loi de finances pour 2019. Le Conseil constitutionnel l’a, cette fois, validée.
L’esprit du texte est le suivant : il permettrait à l’administration fiscale de remettre en cause, sous conditions, certains montages dont l’objectif principal, et non plus exclusif comme auparavant, est d’éluder l’impôt. Cette réforme est importante puisque l’administration fiscale pouvait difficilement actionner l’abus de droit avec le texte précédent. Certains montages avaient pour objectifs d’éluder l’impôt mais aussi de procurer un meilleur rendement financier et échappaient ainsi à l’abus de droit puisque éluder l’impôt n’était pas leur objectif « exclusif ». Son assouplissement voté fin 2018 a eu donc le mérite de permettre à l’administration fiscale de sanctionner à l’avenir davantage de montages qui, de fait, relèvent de la fraude fiscale.
Le gouvernement vient donc cependant de décider de reporter son application du 1er janvier 2019 au 1er janvier 2020. Ce retard est dû à la pression de lobbies défendant des intérêts particuliers. Ce report est de plus annoncé comme devant permettre à l’administration, et curieusement pas au législateur, de préciser les contours précis de cette réforme. Une consultation avec les « professionnels » (avocats fiscalistes, conseils en gestion de fortunes…) est organisée à cet effet.
Il y a de quoi être surpris par le report unilatéral d’une décision votée par le parlement et inquiet sur ce que seront les conclusions de la consultation qui vient de s’ouvrir. Il faut en effet éviter que l’assouplissement voté par les parlementaires ne devienne inapplicable dans les faits une fois la consultation achevée et les « contours » précisés…