Le ministre de l’action et des comptes publics a annoncé hier soir un report au jeudi 6 juin à minuit de la limite de déclaration des revenus de l’année 2018. Cette annonce fait suite à l’indisponibilité du site dans la soirée du 3 juin.
Les explications invoquées par le ministre sont les suivantes. Le système de la Direction générale des finances publiques (DGFiP) se serait « protégé » devant un nombre très important de connexions simultanées (entre 3 et 4 millions sont évoquées), rendant par conséquent impossible une connexion durant de longues heures et ce, à 24 heures de la date et de l’heure limite initiales.
Ce « pic » était prévisible pour deux raisons.
1/ Depuis que la déclaration en ligne existe, des flux importants sont constatés durant la courte période qui précède une date limite.
2/ La déclaration en ligne a été rendue obligatoire par paliers (en fonction du revenu fiscal de référence) : en 2019, tous les foyers fiscaux doivent déclarer leurs revenus en ligne (à de rares exceptions près : zones blanches, foyers non équipés, tolérance pour les personnes âgées, invalides, handicapées ou dépendantes).
D’autres raisons expliqueraient-elles cet afflux ? L’impact du climat n’est pas négligeable : mais, plus que le « week end ensoleillé » avancé par le Ministre qui aurait retardé de nombreux contribuables dans leur démarche, il faut se tourner vers le climat budgétaire qui, lui, n’est pas au réchauffement à la DGFiP. Le rapport de la Cour des comptes consacré aux systèmes d’informations de la DGFiP d’avril 2019 tombe de ce point de vue à pic, si l’on ose dire.
Selon la Cour, les dépenses d’informatique de la DGFiP ont baissé de 8 % entre 2012 et 2017. La DGFiP n’a en outre pas été autorisée par le ministère à utiliser ses maigres marges de manœuvre budgétaires pour financer des dépenses pourtant utiles. De surcroît, la proportion de dépenses consacrées à l’informatique est beaucoup plus faible que dans les administrations fiscales étrangères et les entreprises du secteur privé. Enfin, les effectifs alloués aux services informatiques sont également insuffisants.
Dans la période récente, la priorité a été donnée à la mise en œuvre du prélèvement à la source. Les agents des finances publiques affectés dans les services informatiques ont donc été mis sous forte tension pour le réaliser tout en assurant par ailleurs leurs missions de maintenance et d’exploitation. La gouvernance informatique interne et l’exercice de ces misions ont été par conséquent particulièrement contraints.
Ce « bug » intervient dans une période sensible. Le service public n’avait pas besoin de cela… Compte tenu du caractère sensible des données et de la technicité fiscale requise pour maintenir et développer des systèmes informatiques adaptés aux missions fiscales, foncières et financières de la DGFiP, le gouvernement serait bien inspiré de revoir sa copie budgétaire. Et ce, pour que la DGFiP ait les moyens d’assurer pleinement ses missions et qu’elle en conserve la maîtrise (ce constat est d’ailleurs valable pour l’ensemble des missions…).