Des résultats du contrôle fiscal qui nous ramènent dix ans en arrière

Les résultats du contrôle fiscal de l’année 2018 sont connus. Ils sont à nouveau en baisse sensible pour la 3ème année consécutive. Ces résultats nous ramènent au niveau de ceux de l’année 2009 ! L’évolution au cours des dernières années est la suivante (montants en milliards d’euros).

  2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018
Résultats 15,15 16 16,4 18,13 18 19,3 21,19 19,46 17,9 15,2

Cette baisse est inquiétante et ne traduit nullement une baisse de la fraude

Notre organisation le relève dans ses travaux (voir par exemple notre dossier de juin 2017, « Résultats du contrôle fiscal de 2016, une baisse inquiétante » ) : la hausse des résultats du contrôle fiscal observée durant quelques années a été favorisée par la mise en place du service de traitement des déclarations rectificatives (STDR) et plusieurs affaires exceptionnelles. Dans la période, il y a donc eu un effet conjoncturel mais pas d’amélioration structurelle.

On ne peut sérieusement prétendre, comme le fait le ministre de l’action et des comptes publics, que cette baisse serait une bonne nouvelle en ce qu’elle montrerait l’efficacité des mesures prises ces dernières années. La lutte contre la fraude fiscale s’accorde mal avec ce genre de pirouette qui laisse supposer, à tort, que la fraude baisse.

Les déclarations du ministre interrogent car elles montrent l’empressement du gouvernement à minimiser la fraude fiscale pour justifier d’une part, la baisse continue des moyens humains alloués au contrôle et d’autre part, ses dispositifs (contenus notamment dans la « loi Essoc »). Ceux-ci visent notamment à réduire la place du contrôle fiscal, à privilégier l’accompagnement et le « partenariat » sur le contrôle et à confier aux commissaires aux comptes le soin de délivrer un certificat de conformité fiscale à leurs clients, les entreprises, dans un dangereux mélange des genres. Notre organisation reviendra régulièrement sur les travers de ces mesures.

Si la France n’est pas une exception dans le monde, toutes les estimations disponibles montrent qu’en France, la fraude est très élevée. La multiplication des affaires (de type cum cum ex) montre d’ailleurs qu’elles se sophistiquent et qu’elles demeurent extrêmement coûteuses. Les mesures prises au cours des dernières années sont loin d’avoir produit leurs effets. Si certaines se sont avérées intéressantes, d’autres sont longues à mettre en œuvre voire peu ou pas efficaces. Surtout, la fraude continue d’évoluer et de se développer. Le retard des États est très loin d’être comblé.

Il faut aussi relever que les effectifs du contrôle fiscal baissent depuis plusieurs années, ce qui se traduit par une baisse du nombre de contrôles et, par conséquent, par une baisse des résultats du contrôle fiscal (voir notre rapport de septembre 2018, « Quand la baisse des moyens du contrôle fiscal entraîne une baisse de sa présence »). Selon le rapport de la Cour des comptes de juin 2018, « La DGFiP, dix ans après la fusion », les effectifs du contrôle fiscal ont d’ailleurs baissé de 1 733 agent.es en « équivalent temps plein » entre 2012 et 2016, ce qui représente 11 % des effectifs.

Il y a donc véritablement de quoi s’inquiéter : cette nouvelle baisse est révélatrice de l’affaiblissement de la capacité de l’État à combattre le non respect du droit fiscal. De ce point de vue, le renforcement des moyens juridiques, humains, budgétaires et organisationnels demeure plus que jamais une très forte attente des personnels.