Le ministre des Comptes publics, Gérald Darmanin a déclaré le mercredi 23 octobre que l'État a engrangé 5,6 milliards d'euros de recouvrement d'impôts sur les neuf premiers mois de 2019, contre 4 milliards d'euros sur la même période en 2018 parmi lesquels 640 millions d'euros grâce au «data mining». Cette déclaration a de quoi étonner.

De quoi parle-t-on ici ? Faute de précision apportée par le Ministre, il est en réalité très difficile de répondre à cette question…

En effet, selon le dernier rapport d’activité de la Direction générale des finances publiques (DGFiP), le recouvrement effectif de sommes dues suite au contrôle fiscal s’est élevé à 9,4 milliards d’euros sur l’année civile 2017 et à 8,7 milliards d’euros sur l’année civile 2018.

Or, le Ministre s’est borné à annoncer deux chiffres :

  • l’État aurait récupéré 5,6 milliards d’euros sur les neuf premiers mois de l’année. A moins que ces 5,6 milliards d’euros correspondent à autre chose que le recouvrement effectif de sommes dues suite à contrôle fiscal (tel qu’il figure dans les rapports d’activité de la DGFiP), si l’on fait un calcul prorata temporis, il s’agit en réalité d’une somme en baisse sensible par rapport aux années précédentes,
  • 640 millions proviendraient du « data mining » : cette somme représente 11,4 % des sommes recouvrées, sachant que le « data mining » était à l’origine de 13,85 % des contrôles fiscaux en 2018.

Ces données sont les seules disponibles à ce jour sur la période récente, la publication des résultats complets du contrôle fiscal de l’année 2018 étant pour la première fois absente des documents annexés au projet de loi de finances 2020. Les députés sont donc en pleine discussion budgétaire sans avoir cette information.

La communication gouvernementale mérite pour le moins d’être précisée. Elle s’appuie sur un manque étonnant de données qui, jusqu’ici, ont toujours été publiées. Elle oublie également de revenir sur le trouble suscité par la loi « Essoc », la baisse des moyens humains (3000 emplois supprimés dans les services de contrôle depuis le milieu des années 2000, une baisse qui explique à elle seule la baisse du nombre de contrôles et celle du rendement du contrôle fiscal) et les déclarations d’Emmanuel Macron à l’adresse des chefs d’entreprises (celui-ci ayant de facto laissé croire que les agent·es prennent un certain plaisir à appliquer des pénalités alors qu’ils appliquent le droit dans des conditions de plus en plus difficiles). Des oublis qui fâchent les agent·es des finances publiques, tous grades confondus...

Entre communication gouvernementale et réalité, le fossé aura décidément rarement été aussi grand...