Ce mercredi 26 octobre 2022, la commission des finances du sénat publie un rapport d’information relatif à « La lutte contre la fraude et l’évasion fiscales ».

Cette mission d’information intervient près de 4 ans après l’adoption de la loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude et a pour ambition d’en établir un premier bilan.

Invité à participer à une table ronde au Palais du Luxembourg en juillet dernier, Solidaires Finances Publiques, premier syndicat de la DGFIP, a rappelé son estimation de la fraude (entre 80 et 100 milliards d’euros par an) et martelé la nécessaire adéquation des moyens aux enjeux.

Notre syndicat regrette par ailleurs que la commission des finances du Sénat ait occulté le changement de philosophie du contrôle fiscal engendré par la mise en place de la loi ESSOC du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance. Même si les approches sont différentes, la loi fraude et la loi ESSOC constituent dorénavant les deux piliers de la mission contrôle fiscal. Plus qu’un état des lieux, Solidaires Finances Publiques revendique un bilan exhaustif de ces deux lois.

Une première lecture rapide de ce rapport laisse entrevoir un exercice d’autosatisfaction de la part du Sénat, qui reconnaît avoir initié la réforme du « verrou de Bercy » et introduit plusieurs dispositions de lutte contre la fraude à la TVA. Il n’est pas facile d’être juge et partie!

Parmi les 20 recommandations mises en avant par la commission des finances du Sénat, notre syndicat partage l’idée d’une évaluation sérieuse de la fraude à l’instar de ce qui existe dans d’autres pays. Pour notre syndicat, cette évaluation nécessite une communication transparente des données et des travaux menés par différentes administrations selon des méthodologies variées.

Solidaires finances Publiques partage également l’idée d’une nécessaire et meilleure coopération des services de la DGFiP avec le ministère des Douanes et celui de la Justice.

En revanche, s’agissant du dispositif Convention Judiciaire d’Intérêt Public (CJIP), notre syndicat se montre beaucoup plus réservé et alerte sur les dérives possibles de son utilisation. En effet, ce dispositif, par le paiement d’une amende, permet d’échapper à un procès et à une condamnation pénale. Par ailleurs, le montant d’une telle transaction peut paraître important mais au final se révéler bien moindre que le préjudice subi pour les recettes de l’État. A noter également que la CJIP peut engager l’État sur les années à venir !

De la même manière, Solidaires Finances Publiques appelle à la prudence sur les chiffres mis en avant dans le rapport relatif au nombre de dossiers transmis au Parquet. Si nombre de dossiers sont transmis de manière automatique à la justice, reste à déterminer le traitement qu’ils recevront suite à leur transmission à une instance qui manque aussi de nombreux moyens. Notre syndicat réclame une attention particulière et un bilan précis sur le devenir des dossiers ainsi transmis.

Par ailleurs, notre syndicat dénonce la rapide analyse effectuée par la commission des finances du Sénat pour laquelle la baisse constatée des effectifs est compensée par l’arrivée de nouvelles technologies. Si Solidaires Finances Publiques n’a pas d’opposition de principe aux outils de ciblage de la fraude (mission requêtes et valorisation), il réaffirme la nécessité de prendre garde à l’introduction de biais algorithmiques dans la sélection des dossiers, et que rien ne remplace la connaissance du terrain, un maillage territorial renforcé et la technicité des agents de la DGFIP.

Enfin, Solidaires Finances Publiques ne partage pas la conclusion du rapport lorsque ce dernier juge robuste l’arsenal normatif mis en place par la France pour lutter contre la fraude. Face à la diversité des schémas de fraude, et à l’internationalisation de la fraude et de l’évasion fiscales, il est aujourd’hui indispensable d’avoir une amélioration des moyens juridiques et législatifs mais aussi d’obtenir plus de moyens humains et techniques si nous voulons pouvoir lutter réellement, sur le terrain, contre la fraude fiscale. Ce ne sont pas les mesures d’ajustements préconisées par la Commission qui le permettront.

Si le rapport du Sénat ne propose pas de « Révolution fiscale », il est évident pour notre organisation syndicale qu’une remise à plat de la fiscalité s’impose : pour laisser place à la Justice et l’Équité fiscales, nécessaires au consentement à l’impôt, et pour enfin lutter efficacement contre la fraude et l’évasion !