Nous voici revenus à la case départ. Une nouvelle période de confinement s’ouvre avec son lot de difficultés humaines, sociales, économiques.

Le président de la République, dans son allocution du 28 octobre, a justifié ses choix et en quelque sorte atténué la responsabilité du gouvernement et plus largement celle des pouvoirs publics dans le rebond de la pandémie. La société tout entière est renvoyée à sa responsabilité collective, chacun à sa propre responsabilité. Penser à soi, mais surtout penser aux autres… Comment un tel message peut-il être audible pour un corps social qui a été gavé durant des années par l’injonction, toute libérale et capitaliste, du « chacun pour sa gueule ». Les « relâchements » coupables auxquels nous avons assisté au moment du déconfinement et tout au long des derniers mois ne sont en rien étonnants. Ils ont aussi été en quelque sorte encouragés par les contradictions patentes, par les mensonges des responsables politiques et par la polémique scientifique.

Cette crise est décidément et définitivement révélatrice de bien des maux.

Ceux d’une société malade, au sens clinique du terme. Les personnes obèses, hypertendues, diabétiques, les premières et les plus frappées, apparaissent comme légion. Si on rajoute les handicaps de l’âge et de la position sociale, du handicap tout court, cela nous renvoie au sens des politiques de santé publique, aux manques de la médecine de prévention, aux déserts médicaux, aux questions des pollutions diverses, aux perturbateurs endocriniens, à la mal-bouffe, aux problématiques environnementales, à celles de la prise en charge de nos anciens… Et au sens des politiques économiques, budgétaires et fiscales, à leurs conséquences notamment sur notre système de santé.

Le gouvernement a mis sur « la table » 100 milliards et des brouettes pour soutenir les secteurs en difficulté. Ce chiffre peut paraître colossal aux yeux du commun des mortels. C’est à quelques dizaines de millions près le montant des revenus annuels de Jeff Bezos, patron d’Amazon. Cette société qui engrange d’encore meilleurs bénéfices dans la période et qui fait tout pour échapper à l’impôt en France, quand elle ne maltraite pas ses salariés. C’est aussi à 80 millions près le montant estimé de la fraude fiscale… Celles et ceux qui se réjouissent de payer moins d’impôts et de cotisations, qui vénèrent les politiques, et ceux qui les conduisent, visant à la baisse des prélèvements obligatoires, des charges comme ils disent, auront-ils enfin un brin de lucidité devant la déliquescence du système hospitalier public (royalement doté de 8 milliards annuels), des services publics, de la société en général ? Celles et ceux qui font de la fraude, de l’évasion et de l’optimisation fiscales un sport de compétition, un brin de remords ? Pas certain malheureusement ! Quant aux pouvoirs publics, ils ont raison, point barre. Toute contestation de la doxa capitaliste pourrait être assimilée à du séparatisme.

En 1989 déjà, les infirmières, qui campaient devant le ministère de la Santé, peut-être avenue de Ségur, et le milieu hospitalier réclamaient plus de moyens… Et nous nous battions, nous, déjà pour plus de justice fiscale au profit de la justice sociale et réclamions les moyens de faire mieux notre travail au service de l’intérêt général.

Faire société autour d’un ou de projets alternatifs au capitalisme prédateur est une impérieuse nécessité. Si nous voulons que ça bouge et que ça change, sortons de nos bureaux, descendons de nos balcons, serrons les dents et formons le poing.