Après des mois d'annonces plus ou moins précises, le Ministre de la Fonction Publique vient d'ouvrir la "concertation" sur le nouveau projet de loi fonction publique. Ci-dessous la déclaration liminaire de Solidaires Fonction Publique.

Monsieur le ministre,

Après des mois de propos dans les médias, d’annonces floues, et de décalages vous ouvrez donc le chantier du projet de loi fonction publique.

Commençons par la forme… Vous avez transmis hier un document. A 16h30. Cela n’est pas admissible. Sur ce sujet, comme sur les autres, nous ne pourrons travailler de cette manière. Nous ne pouvons travailler et intervenir, nous l’avons déjà dit à de multiples reprises, que si nous travaillons avec des documents transmis bien en amont. Il en va du respect que nous devons toutes et tous aux agent·es publics.

Par ailleurs, 5 réunions celle-ci comprise pour la concertation sur ce projet de loi… autant dire rien ou presque. Vous voudriez nous faire comprendre que nous n‘avons que des détails à discuter, vous ne vous y prendriez pas autrement. Pour Solidaires, cela n’est pas admissible là non plus. La méthode doit changer.

Au-delà de la forme…

Solidaires Fonction Publique rappellera en premier lieu qu’elle n’est pas demandeuse d’une nouvelle loi fonction publique qui va attaquer une fois de plus les droits des agent·es publics et en conséquence les services publics qu’ils et elles servent.

Solidaires rappelle même ici solennellement sa revendication d’abrogation de la loi d’août 2019 dont les conséquences ont été désastreuses notamment en ce qui concerne le développement de la contractualisation dans la fonction publique.

Depuis des mois dans les médias, vous dites vouloir travailler à l’attractivité de la fonction publique. C’est effectivement une nécessité.

Parce que les agent·es subissent ce manque d’attractivité de multiples manières. Tout d’abord parce que leurs salaires ont décroché depuis bien longtemps. Vous leur refusez des mesures générales salariales en 2024 alors même que les dernières revalorisations ont été ridiculement basses par rapport à l’inflation et ce après 10 ans de gel du point d’indice.

Pourtant, l’attribution de points d’indice pour toutes et tous, la revalorisation du point et l’indexation sur l’inflation sont indispensables.

Ensuite, parce que ce manque d’attractivité, ce sont des emplois non pourvus dans les services et donc des conditions de travail qui se dégradent partout.
Des services d’urgence fermés la nuit, des classes sans enseignant·e n’en déplaise au Premier Ministre et aux promesses faites aux parents et aux élèves. Les exemples sont nombreux dans tous les services.

Ce manque d’attractivité c’est bien donc aussi en conséquence une dégradation constante de la qualité des services publics rendus à la population.

Bien entendu… les annonces récentes de 10 milliards de coupes sur le budget de l’Etat dont 780 millions d’euros sur les salaires de l’emploi public faites par le ministre de l’Economie vont aggraver encore ce manque d’attractivité de par les perspectives qu’elles entrainent.

Concernant la dégradation des conditions de travail, Solidaires en profite pour dire ici que l’expérimentation de la semaine en 4 jours que vous avez lancée alors même qu’aucune concertation n’a eu lieu et qu’aucune réduction du temps de travail hebdomadaire n’est envisagée s’inscrit bien dans cette dégradation constante.

Si nous souhaitons toutes et tous parler d’attractivité, nous ne pouvons le faire sans parler clairement d’augmentations de salaires via des mesures générales pour toutes et tous. Pourtant vous vous refusez à le faire.

Autant dire que tout cela c’est donc parler dans le vent.

Accroître la part du mérite dans la rémunération des agent·es publics, pour Solidaires, c’est une ligne rouge, alors même que la rémunération au mérite est déjà bien trop développée.

Elle place les agent·es en concurrence, aux prises avec l’arbitraire hiérarchique là où les collectifs de travail ont besoin de cohésion et de soutien. Les agent·es publics, qui sont attaché·es à l’exercice de leurs missions ne méritent pas le sort qui leur est fait.

Ils et elles ont été remercié·es pendant la Covid, ils et elles assurent leurs missions sans faillir, sont présent·es pour faire tenir les services publics notamment pendant toutes les crises.

Depuis des semaines, ils et elles entendent leur ministre parler de “celles et ceux qui se décarcassent”, “de leur absentéisme”... et même dans ce document comme dans la presse, de l’insuffisance professionnelle… Non vraiment, les agent·es publics ne méritent pas ça.

Les conditions de travail n’ont cessé de se dégrader, en grande partie du fait des restrictions de postes, des fermetures de services. C’est ce qui explique l’augmentation des arrêts maladie. C’est cette situation qui devrait être traitée de toute urgence.

Solidaires Fonction Publique tient à affirmer fermement que doivent enfin cesser les attaques contre le statut de la fonction publique. Pour assurer leurs missions, les agent∙es publics doivent demeurer neutres et impartiaux∙ales, ils et elles ne doivent pas être soumis·es aux pressions politiques et économiques. Il en va du respect de l’intérêt général et seul le statut leur garantit cette position.

Dans cette logique d’indépendance, la garantie de l’emploi des fonctionnaires doit être maintenue.

Les carrières des agent·es doivent connaître une progression constante, garante de l’équité entre agent·es quelle que soit la nature de leur mission. L’accès toute au long de la carrière à des formations qualifiantes doit être assuré, comme la reconnaissance de ces qualifications dans les déroulements de carrière.

Nous nous opposerons à toute volonté d’individualiser la rémunération des agent·es publics, d’autant plus lorsqu’elles se basent sur des critères aussi opaques que subjectifs.

Nous ne partageons rien des pistes et lignes posées. Nous ne laisserons pas passer un projet de loi qui sera pour nous une nouvelle fois synonyme de dégradation de la situation des agent·es publics.