Un CTR dense...mais qui poursuit la destruction de la DGFiP.

Liminaire

Monsieur le Président,

Ce CTR est le dernier du quinquennat et Solidaires Finances Publiques, comme il le fait sur les dispositions fiscales prises durant la mandature, va vous soumettre au travers de cette liminaire son bilan de cette période de la DGFiP. Ce bilan ne sera pas exhaustif car on sait que votre temps est compté, aussi nous reprendrons les faits marquants.

La DGFiP a connu entre 2012 et 2017 deux directeurs généraux aux personnalités différentes mais à l'objectif commun, celui de démanteler de façon déterminée et incessante cette administration. Administration à laquelle Solidaires Finances Publiques est attachée pour les missions qui lui sont dévolues mais aussi pour les agents de tous grades confondus qui la composent, que nous appelons le collectif de travail.
Les missions sont marquées par la démarche stratégique initiée par Monsieur Bézard, que vous avez poursuivie en l'agrémentant de vos lignes directrices qui pour nous sont destructrices. A la fin de ce quinquennat administratif, aucune mission n'aura été épargnée : mesures de simplification, des restructurations, des fusions, des concentrations, des suppressions de service. Aucune direction n'est passée au travers de vos objectifs et l'ordre du jour de ce CTR en atteste.
La DGFiP est un service public et vous poursuivez l'objectif de déshumaniser l'accueil, à l'éloigner de celles et ceux qui le sollicitent, à contre-courant de leurs besoins, de leurs attentes, de la réalité. Au passage, vous ajoutez l'inégalité numérique à l'inégalité territoriale que subissent les citoyens des zones rurales et/ou péri-urbaines. Nous ne pouvons que vous rappeler notre demande d'information actualisée sur le niveau d'implantation des services de la DGFiP en fonction de la taille des communes dans lesquelles sont installés nos services Vous disposez bien des éléments pour nous répondre, puisque cette information figurait dans un document de travail datant de 2014 et qu'il vous suffirait de l'actualiser. Comment devons-nous interpréter votre absence de transparence en la matière ?
La dématérialisation, qu'elle concerne la transmission de documents nécessaires à l'assiette, à la gestion, au contrôle fiscal ou de la dépense, au recouvrement, ou qu'elle concerne les relations entre la DGFiP et les usagers, n'est pas sans conséquence notoire.
Nos bases de données, élément central de nos activités, sont-elles exhaustives, fiables et stables ? Pourquoi est-il nécessaire de les fiabiliser presque chaque année ? La réponse est dans la question.
Comment la dématérialisation des échanges entre les contribuables et l'administration inter-agit-elle en matière de respect des procédures, dans un contexte de baisse continue des effectifs et des moyens ?
Quel est l'impact de la « digitalisation » sur les doctrines d'emplois des agents, sur leurs qualifications, sur leur technicité ?
Excepté si on se penche sur les aspects philosophiques, sociologiques ou politiques de l'informatisation à outrance de nos sociétés, le problème à la DGFiP ne réside pas dans le déploiement et l'usage massif des TIC. Toute organisation de la taille et de l'importance de la nôtre qui prétend avoir une « ambition numérique » doit au préalable à toute évolution adapter son système d'information. Or cette adaptation est concomitante, ce qui génère un nombre incalculable de problèmes, source de stress et de perte de temps pour les personnels. Cette adaptation, comme les évolutions numériques, sont de la pleine compétence des informaticiens de la DGFiP. Le SSI regorge de talents dont les capacités et l'engagement sont très largement sous-estimés et surtout bridés par les contraintes temporelles qui leur sont imposées. Parallèlement les bases de données auraient dû être, en amont, fiabilisées et surveillées. Or ce n'est pas le cas !
Nous ne parlerons pas ici de la sécurité desdites données. Si celles et ceux qui nous les confient savaient...
L'accueil, la gestion... Et le contrôle ?
Cette mission, contre-partie du système déclaratif en ce qui concerne la sphère fiscale, gage de démocratie et de transparence en ce qui concerne la dépense, est elle-aussi dénaturée, avec les mêmes impacts. Le rôle et la place du comptable public sont désormais totalement ou presque perdus de vue, au profit des ordonnateurs, dont on ne peut pas affirmer qu'aucun n'a jamais illégalement profité des deniers publics. Quant au contrôle fiscal, si ses résultats sont remarquables au regard des moyens faméliques qui lui sont octroyés, il est aujourd'hui loin de remplir ses offices. Et ce ne sont pas les restructurations que vous mettez en œuvre qui vont améliorer les choses. Au contraire !
La fraude fiscale, qui prive le budget du pays de 80 milliards d'euros, au bas mot, par an a encore de beaux jours devant elle. Tout autant que la corruption et les détournements de fonds publics.

Alors que le bilan de la fusion des deux administrations DGI/DGCP n'a jamais pu être fait de façon contradictoire, les réformes de tous ordres se sont poursuivies mettant à mal les différentes chaînes de travail. Solidaires Finances Publiques vous rappelle sa revendication, qui n'a rien d'extraordinaire, de faire une pause qualité. Votre entêtement inconsidéré sur ce sujet nous est incompréhensible.
Vous nous présentez la dématérialisation comme un outil de simplification des tâches alors qu'elle devrait être au service des missions et des agents. Elle n'est qu'un moyen pour éloigner de façon physique les usagers du service public. Elle est présentée comme un outil d'aide en direction des agents et des usagers mais elle est avant tout un palliatif d'une déficience.
Déficience de notre administration due à la réduction continuelle des moyens tant budgétaires qu'humains. Solidaires Finances Publiques rappellera juste qu'au cours des 5 dernières années, notre administration a perdu 9 634 emplois .
Au niveau budgétaire, la DGFiP a connu au cours de ce quinquennat une baisse de 600 millions d'euros de sa dotation budgétaire (moins 200 millions d'euros sur la masse salariale, moins 400 millions d'euros sur le fonctionnement).
Pour en terminer sur le sujet des missions, Solidaires Finances Publiques ne peut passer sous silence la mise en œuvre du chantier colossal du prélèvement à la source, même si ce dernier était l'objet du CTR précédent, CTR au passage quelque peu censuré dans son expression, Conseil d’État oblige. Sans revenir sur le fond de cette réforme du recouvrement de l’impôt, Solidaires Finances Publiques réitère ses inquiétudes et son alerte sur d'éventuels risques de type industriel au vu de la situation de la DGFiP que l'on pourrait imager comme le colosse aux pieds d'argile.
Les réponses apportées par la DG se voulaient rassurantes en nous déclarant que tout était sous contrôle. Au vu des différents programmes présidentiels qui expriment pour certains d'entre eux la suppression pure et simple du PAS et pour un autre d'avoir une phase expérimentale, nous ne sommes pas rassurés si l'administration n'a pas réfléchi à de telles éventualités. A moins que vous vous refusiez à nous communiquer vos pistes de repli.
Mais ce qui nous préoccupe le plus, c'est la situation à laquelle vont se trouver confrontés les services, dès la semaine prochaine et jusqu'à la fin de l'année 2017 dans un premier temps, puis les années suivantes, au moins jusqu'après la sortie des rôles 2019.
La plus belle et la plus efficace des communications ne suffira pas à calmer l'incompréhension et la colère des contribuables, confrontés concrètement aux différents aspects de cette réforme. Aspects que l'administration ne leur aura pas bien expliqués, voire pire, leur aura cachés. Nous ne ferons pas ici la liste de ces infimes problèmes qui vont arriver dès ce mois d'avril. Mais qui va devoir essuyer reproches, réprimandes, insultes, voire violence : pas vous, mais les agent-e-s en contact avec le public, que ce contact soit physique ou dématérialisé.
Si le PAS échoue, vous serez regardé comme responsable et coupable. Mais votre responsabilité et votre culpabilité rejaillira sur l'ensemble de la communauté de travail, qui elle n'avait rien demandé.
Concernant le collectif de travail, la régression des droits et garanties des agents se décline dans tous les domaines et on assiste à une remise en cause systématique des garanties obtenues lors de la fusion. Vous faites fi des engagements de vos prédécesseurs, engagements qui avaient pour finalité de donner aux agents de la lisibilité sur le long terme. Méprisez-vous autant les agents de cette administration, et vos prédécesseurs, pour détricoter peu à peu leurs règles de gestion ? Nous donnerons quelques exemples de régressions : délais de séjour imposés à un grand nombre d'agents dont les inspecteurs vérificateurs et les agents en 1ère affectation, départs forcés déterminés par un bilan de compétence pour les inspecteurs de centrale et de l'ENFiP initialement recrutés au choix, fusion des RAN, changements d'affectations arbitraires par exemple pour les évaluateurs Domaine, les B SPF basculés en Fiper,...
Sur le volet formation, là-aussi nous aurions beaucoup à dire. La valeur ajoutée des agents de la DGFiP est leur niveau de technicité forgé notamment tant par leur formation initiale théorique et pratique que par leur formation en cours de carrière. Dès lors, le chantier sur la formation professionnelle que vous ouvrez nous inquiète à plus d'un titre : une formation initiale réduite au seul premier métier sans établir de bilan sur les actions de formation, la réduction programmée de la formation initiale des A et des B alors que la logique voudrait qu'elle soit renforcée et donc allongée notamment sur sa partie pratique, le refus de repenser les cursus de formation continue et notamment d'offrir aux agents de réels droits en matière d'expression de leurs besoins de formation et d'accès à la formation, le développement de l'e-formation qui n'est pas satisfaisante.
Concernant les promotions internes, la baisse du volume et la limitation de passer des concours sont autant de régressions pour les personnels dans le cadre de leur évolution de carrière et un très mauvais coup porté à la lutte contre les inégalités femmes-hommes.

Les agents qui ont assumé des réformes continuelles ont besoin de repères et de perspectives, or aujourd'hui c'est le contraire qui se met en œuvre.

Quant aux rémunérations, le drapeau est en berne et ce n'est pas PPCR et l'augmentation ridicule du point d'indice de l'année 2016 qui vont redonner du pouvoir d'achat aux agents.

Pour en terminer sur ce bilan, nous aborderons succinctement le dialogue social car Solidaires Finances Publiques s'est exprimé sur le sujet au dernier CTR mais nous serons perspicaces et tenaces face aux attaques sur l'exercice du droit syndical en cours de mandat.
Les remises en cause que vous faites sont des attaques inacceptables vis-à-vis des représentants des personnels et à travers eux à la représentativité légitime donnée par les personnels aux organisations syndicales du fait d'une participation de 85 % aux dernières élections professionnelles. Représentativité qui est par ailleurs confirmée tous les ans dans les écoles et votre obstination à entraver le travail des élus stagiaires, démontre que le fait syndical est à vos yeux un ennemi à abattre ! Et pourtant, le fait syndical est un vecteur essentiel de la démocratie ! Démocratie qui visiblement vous dérange !

Solidaires Finances Publiques arrêtera là son développement sur le bilan administratif du quinquennat et interviendra dans le débat au moment de l'examen des fiches et des textes soumis à avis à l'ordre du jour de ce CTR.