Malgré l'absence de réelle volonté de la Direction Générale de mettre en place une politique ambitieuse pour améliorer les conditions de travail des agentes et agents et d'un dialogue social dégradé voire inexistant, Solidaires Finances Publiques a décidé de siéger à la FSR du 8 avril car pour nous cette instance est d'une nécessité aboslue.
liminaire
Madame la Présidente,
Lors de la précédente FSR, vous nous avez montré une fois encore, toute la considération que vous avez de cette instance et de ses représentant·.es du personnel.
Si nous sommes devant vous aujourd’hui, c’est parce que pour Solidaires Finances Publiques, dans un contexte de dégradation sans précédent de nos conditions de travail, de mal-être et de perte de sens au travail, cette instance est d’un nécessité absolue. Nous ne perdons pas espoir que la DGFiP prenne ces sujets à bras le corps et initie une réelle politique de prévention.
La dégradation de nos conditions de travail, le mal-être au travail seront amplifiés au vu du budget d’austérité adopté et qui une fois encore sacrifie la DGFiP, avec 550 nouvelles suppressions d’emplois sans oublier la revue des missions du 1er ministre qui en supprimera sans aucun doute un certain nombre.
Et que dire de la volonté du Gouvernement de « punir » les fonctionnaires ayant la malchance d’être malades en minorant de 10 % leur rémunération pendant les congés ordinaires maladie en lieu et place de se questionner sur les causes des arrêts maladies.
Autre actualité des plus alarmantes, comment ne pas s’inquiéter des attaques contre l’État de droit. Elles viennent de partout, au niveau international, comme au niveau national. Quand des politiques remettent en cause l’application du droit, quand un Premier Ministre se dit « troublé » par une décision de justice, comment rassurer nos collègues sur l’exercice de nos missions : ne sommes-nous pas là pour garantir l’application du droit ? Quel soutien avons-nous face à des contribuables qui viennent remettre en cause notre action ? Alors que la campagne déclarative d’impôt sur le revenu commence, le bilan Sign@lFiP pointe un nombre de signalements d’incivilités, d’agressions et de menaces en augmentation. Dans les directions locales, face à l’inquiétude des agentes et agents, les demandes portant sur le recours aux vigiles dans nos accueils sont bien souvent mises en suspens, car les moyens budgétaires sont trop contraints. Mais jusqu’à quand ? Faut-il attendre qu’un incident grave se produise ?
D’ailleurs, le nombre de suicides et tentatives de suicide sur ce 1er trimestre 2025 est alarmant. Si vous vous targuiez Madame la Présidente d’une « tendance baissière » entre 2023 et 2024, l’année 2025 semble bien mal engagée. Que fait la DGFiP pour se mobiliser sur le facteur qui lui incombe : le travail ? Que fait la DGFiP pour améliorer les conditions de travail des personnels ? Tous les indicateurs ont viré au rouge cramoisi depuis longtemps (observatoire interne, etc.) et rien ne se passe. Il est grand temps que la DGFiP se dote d’un politique SSCT ambitieuse. . Que nous ayons dû batailler pour que ce point soit à l’ordre du jour de cette instance montre votre légèreté en la matière. Mettre ce sujet sous le tapis n’est pas la solution, il faut y faire face !
Nous ne pouvons ignorer les drames humains survenus depuis ce début d’année : cinq suicides et deux tentatives de suicide au sein de la DGFiP. Ces événements tragiques rappellent l’impératif d’agir. L’administration, quant à elle, renvoie systématiquement la responsabilité de ces faits à une prétendue fragilité individuelle, dégageant ainsi toute responsabilité de l’employeur. Cette posture est indigne d’une administration publique. Elle traduit un refus d’assumer ses obligations en matière d’organisation du travail et de prévention des risques psychosociaux, préférant individualiser ces drames plutôt que d’interroger leur origine professionnelle.
Un suicide ou une tentative sur le lieu de travail ne peut être déconnecté du contexte professionnel. Et même lorsqu’un tel acte a lieu en dehors du lieu de travail, il revient à l’employeur de ne pas s’exonérer d’un examen rigoureux des causes possibles, y compris celles liées à l’activité professionnelle. Nous exigeons une réponse à la hauteur des enjeux : reconnaissance, enquête approfondie, mise en place de véritables mesures de prévention et transformation des conditions de travail. Il en va de la dignité des agentes et agents, et de la prévention de nouveaux drames.
Mais l’action de cette instance ne peut être cohérente que si elle s’inscrit dans un cadre stratégique fort. Or, nous constatons que la DGFiP poursuit une politique de fragmentation, avançant seule sur des dossiers structurants. La mise en place unilatérale du mouvement au fil de l’eau en est une illustration préoccupante. Sans concertation, sans débat en groupe de travail, la Direction Générale a supprimé les mouvements locaux des inspecteurs et introduit des procédures opaques, en rupture avec les lignes directrices de gestion pourtant adoptées en CSA. Ce dispositif, dérogatoire et arbitraire, remet en cause les priorités légales, le droit à la formation, l’égalité de traitement et la conciliation des temps de vie. Il institutionnalise l’opacité, accroît les risques de discriminations et alimente le sentiment d’injustice et de défiance dans les collectifs de travail.
Ce type de décision unilatérale entre en contradiction totale avec les objectifs portés par la FSR. Comment bâtir une politique cohérente de santé, sécurité et conditions de travail, si des logiques individualisantes défont dans le même temps les repères collectifs et fragilisent les collectifs de travail ? Comment prétendre prévenir les risques psychosociaux sans interroger les effets délétères de ces réformes sur les trajectoires professionnelles, le sentiment d’abandon ou l’isolement croissant des agents ?
Solidaires Finances Publiques réaffirme que la santé au travail ne se décrète pas. Elle se construit dans la durée, à partir d’une politique nationale forte, cohérente et assumée. La FSR doit en être le levier structurant. Elle ne peut se contenter de compiler des bilans d’activités. Elle doit incarner une volonté : celle de faire du travail un espace soutenable, structurant et émancipateur.
Nous défendons une autre vision du travail, loin des logiques de rentabilité et de contrôle, dans laquelle celui-ci ne serait pas un facteur de souffrance mais un vecteur de développement, de reconnaissance et de pouvoir d’agir. Le travail peut et doit être un lieu où les individus se construisent, se réalisent et participent activement à une œuvre collective. Cela suppose que chacun et chacune dispose des moyens d’agir, de penser son activité, de débattre d’un travail qui fait sens. L’organisation du travail doit cesser d’être pensée comme un simple outil d’exécution pour devenir un cadre vivant, ajustable, porteur de coopération et de dignité. Ce que nous portons ici, c’est une ambition : transformer le travail pour qu’il contribue à la puissance des collectifs et à la liberté des individus.
La santé au travail ne peut se résumer à des outils ou des procédures. Elle repose avant tout sur la manière dont le travail est organisé, sur la capacité des agentes et des agents à réaliser leurs missions dans des conditions qui favorisent leur autonomie, la coopération et la maîtrise des moyens mis à disposition. Cela suppose également des effectifs suffisants pour garantir une charge de travail soutenable. Or, aucune réflexion approfondie n’est menée aujourd’hui sur l’organisation du travail, alors même qu’il s’agit d’un levier fondamental pour prévenir les risques psychosociaux.
Le télétravail, les réorganisations, les outils numériques transforment en profondeur les collectifs. Quels en sont les impacts réels ? Quelles mesures sont mises en place pour anticiper et accompagner ces évolutions ? Les quelques outils disponibles, comme les guides ministériels dont le dernier issu des travaux de l’ANACT « Agir sur les transformations du travail », sont peu animés, peu suivis, rarement adaptés. Ce manque de pilotage interroge la volonté réelle de l’administration de faire du travail un objet de réflexion, d’analyse et de transformation.
Solidaires Finances Publiques demande que le travail soit replacé au centre des politiques SSCT. Cela implique l’écoute des collectifs, l’accompagnement des acteurs de prévention, la reconnaissance des tensions vécues dans les services. Cela suppose de réintroduire partout des moments et des lieux d’échange sur le travail et son organisation afin que les équipes puissent proposer des améliorations, confronter leurs points de vue et agir collectivement pour retrouver du sens à leur travail.
En outre, vous nous avez fait parvenir un plan d’actions qui correspond un peu plus à nos demandes, mais sans aucune discussion préalable avec les représentants de la FSR. Ce changement de philosophie nécessite une discussion avec les représentants de la FSR. Nous exigeons l’organisation d’un GT. D’ailleurs, nous réitérons notre demande d’avoir des réunions préparatoires à la FSR, avec un temps adapté, afin de pouvoir analyser et discuter des sujets de manière sérieuse.
Nous le répétons : la FSR n’est pas une simple chambre d’enregistrement. Elle doit être un levier stratégique, pour construire des politiques ambitieuses et structurantes, à la hauteur des enjeux de santé, de justice et de dignité au travail.
Nous ne lâcherons rien.