Déclaration Liminaire
Madame la Présidente,
La dernière fois que nous nous sommes vus dans cette instance de dialogue social, vous avez refusé d’écouter trois des organisations syndicales représentatives. Un tel mépris envers les représentantes et représentants des organisations syndicales est une grande première dans notre administration. Sachez Madame, qu’en méprisant les représentantes et représentants du personnel, vous méprisez une fois encore l’ensemble des agentes et agents de la DGFiP.
Ce mépris se manifeste également dans la gestion de notre administration où désormais l’égalité entre les agentes et agents sur l’ensemble du territoire n’existe plus. Vous en doutez ? Quelques exemples alors :
- Nous venons de subir un épisode caniculaire de grande ampleur sur l’ensemble du territoire. Des préconisations nationales ont été rappelées mais en laissant toute la latitude aux directions locales comme nous l’a indiqué la présidente de la FSR le 1er juillet. On a donc vu des directions locales qui ont accordé des aménagements horaires mais souvent annoncés très tardivement et soyez rassurée toutes ont précisé que les agentes et agents devaient rattraper leurs heures. Une chose est certaine quand il s’agit de ne pas accorder des « cadeaux » aux personnels, les directives nationales sont suivies à la lettre sur l’ensemble du territoire. De nombreuses directions ont également accordé du télétravail temporaire comme le permet, dans des situations exceptionnelles, l’accord ministériel.
Nous devons toutefois dénoncer toutes les autres directions, beaucoup trop nombreuses selon nous, qui ont refusé le télétravail pendant cette séquence caniculaire considérant que la situation n’était pas exceptionnelle, ou encore celles qui ont fait preuve d’une souplesse très relative en accordant seulement aux agentes et agents de partir à 15h30 au lieu de 16h... Pour Solidaires Finances Publiques ce n’est pas acceptable et en « donnant toute latitude aux directions locales », vous permettez de tels écueils. Nous vous rappelons, qu’en tant que Directrice Générale, vous être responsable de la santé, de la sécurité et des conditions de travail de l’ensemble des agentes et agents de la DGFiP.
Les vagues de canicule ne seront désormais plus exceptionnelles en période d’été et elles sont donc, en ce sens, désormais prévisibles. Un risque prévisible est un risque qui peut être anticipé, un risque qui doit être prévenu pour peu qu'on y mette les moyens ! Un mail de rappel des consignes est très insuffisant et en définitive, peu d'agentes et d’agents usent des possibilités d'horaires aménagés ou du télétravail surtout quand celui-ci est refusé par les directions locales. Par ailleurs, pour Solidaires Finances Publiques, le télétravail ne peut être la solution miracle face aux vagues caniculaires. Pour Solidaires Finances Publiques, la DGFiP doit s’engager sur des solutions durables comme la rénovation /adaptation des bâtiments.
– Puisque nous parlons télétravail, voilà un autre exemple concret où là encore les directions locales ont toute latitude de faire comme bon leur semble lors qu’un accord ministériel encadre précisément cette organisation du travail pour l’ensemble des personnels. Ici ou là nous avons des directions qui décident de réduire de façon unilatérale le nombre de jours de télétravail, d’imposer des jours flottants ou encore qui considèrent qu’un agent prenant deux jours de congés par exemple dans la semaine ne peut pas être en télétravail cette semaine-là, car cela dérogerait au principe des 3 jours en présentiel…
– Dernier exemple et pas des moindres : l’affectation locale des cadres A au fil de l’eau. Vous avez décidé de modifier unilatéralement les LDG pour continuer d’étendre les postes aux choix et à l’ensemble des emplois de catégorie A. Ainsi, la dernière mesure généralise cette pratique au mouvement local des inspecteurs et le fil de l’eau est un supplément d’âme que les directeurs locaux peuvent appliquer ou pas. Une fois encore, vous laissez les directions locales faire comme elles veulent et une fois encore cela se fait au détriment des agentes et agents. Aucune direction ne fait la même chose et, comme nous l’avions craint, les premiers retours sont catastrophiques : délais non respectés, postes pourvus avant publication des fiches de postes, pressions hiérarchiques, agentes et agents sans affectation... Tous les ingrédients sont là pour faire de ce mouvement le summum de l’injustice et des inégalités. Vous pressentez peut être déjà ces difficultés ce qui explique peut être que dans l’urgence, sans échanges avec les organisations syndicales, vous avez envoyé le 25 juin un questionnaire aux cadres A. Mais un simple état des lieux ne permettra en aucun cas d’améliorer les choses.
Si nous avons mis en avant ces 3 exemples concrets (mais ce ne sont pas les seuls), c’est pour vous démontrer qu’aujourd’hui plus que jamais, les agentes et agents de la DGFiP, ne sont plus traités de la même façon sur l’ensemble du territoire. Cela crée des inégalités, des injustices, mais aussi de la concurrence et de la division dans nos collectifs. Cela accentue le mal-être au travail et la perte du sens au travail. La direction générale n’est plus qu’une façade. Elle affiche, elle diffuse mais elle ne pilote plus rien.
Sur ce point, nous voulions une fois encore vous alerter sur la situation des agentes et agents de la DGFiP. Nul ne doit et ne peut désormais ignorer que le mal être est de plus en plus grandissant. Nul ne peut et ne doit ignorer le nombre important de suicides et de tentatives de suicides (10 suicides, 8 tentatives depuis le 1er janvier) dans notre administration. Nous le répétons, nous savons que ces drames sont dus à de multiples facteurs mais, pour notre part, nous considérons que chaque cas, que l’événement se soit déroulé sur le lieu du travail ou en dehors, doit conduire à une réunion exceptionnelle de la formation spécialisée puis, si les représentants des personnels la votent au regard des circonstances, faire l’objet d’une enquête pour s’assurer que le travail ne soit pas l’un des facteurs ayant conduit au passage à l’acte.
Vouloir écarter d’office la responsabilité de l’administration en partant systématiquement du principe que le suicide ou la tentative de suicide ne relève que de raisons personnelles ou à des facteurs liés à une pseudo-fragilité des agentes et agents n’est pas acceptable. Pour Solidaires Finances Publiques, le refus dogmatique de vouloir rechercher les causes pour identifier si elles sont liées ou pas à l’organisation du travail et au travail lui-même signifient la banalisation du suicide. Or, il faut, sans aucun tabou, questionner le travail, son organisation, mettre en débat le management et trouver des pistes pour que ces drames humains ne se produisent pas. Il y va de votre responsabilité Madame le Directrice Générale, un simple courrier sur vos inquiétudes n’y suffira pas, d’autant que son prisme est déformant.
Solidaires Finances Publiques et l’ensemble des organisations syndicales représentatives, face à l’augmentation de ces drames, ont demandé une réunion spécifique sur le sujet. Vous y avez répondu favorablement et, sans doute dans un sursaut d’optimisme, nous avions imaginé que la Direction générale avait enfin décidé de prendre à bras-le-corps ce sujet. Mais à la réception des documents pour préparer cette réunion du 9 juillet et à la vue de l’ordre du jour : c’est l’incompréhension la plus totale. Comment sur un tel sujet pouvez-vous nous envoyer pour seul document une synthèse des statistiques sur le nombre de suicides en France ? Rien sur les RPS qui demeurent le risque majeur à la DGFiP, augmentant à chaque exercice de recueil des risques et dépassant de très loin les taux au MESFIN ou à la Fonction Publique d’État. C’est tout simplement honteux ! Un suicide est un suicide, peu importe qu’il fasse baisser ou monter la stat !
Comment prétendre agir sur la prévention des actes suicidaires en refusant d’assumer les responsabilités structurelles de l’administration ? À cette question, la DGFiP oppose une stratégie limpide : l’individualisation à outrance. Si l’on souffre, c’est qu’on ne sait pas gérer son stress. Qu’on s’organise mal. Qu’on a, au fond, des fragilités personnelles. Le problème, c’est l’agent — jamais le travail, jamais son environnement, jamais le management. Pendant la FSR, la Directrice des Ressources Humaines assurait que l’organisation du travail serait mise sur la table. Mais à la lecture de l’ordre du jour et des documents transmis pour la réunion du 9 juillet, c’est une autre réalité qui s’impose : on esquive, on évite, on recule. La question du travail est soigneusement contournée. Voilà comment on fait porter à l’agent ou à l’agente des Finances publiques le poids de ce qu’on lui fait subir. Voilà comment on transforme un scandale social en affaire privée. Un drame collectif en événement statistique. Un suicide ne déclenche plus de remise en question, il alimente une ligne du prochain RSU. Ce n’est pas que vous ne voulez pas voir. C’est que vous avez décidé d’éteindre la lumière. C’est pourquoi, très solennellement à ce CSAR, Solidaires finances publiques vous alerte sur cette situation hautement inquiétante et dramatique pour notre collectif de travail.
Autre sujet d’inquiétudes pour les agentes et agents de la DGFiP : le futur budget 2026. Et ce que nous avons entendu de la part de la Ministre lors du CSAM du 4 juillet ne nous a pas rassurés, loin de là. Les suppressions d’emplois vont continuer et aggraveront une fois de plus les conditions de travail des agentes et agents mais également l’exercice de nos missions. Une fois de plus cela va conduire à aggraver les disparités territoriales et sociales en matière d’accès au service public DGFiP. Depuis 2008, notre Direction Générale encaisse des suppressions d’emplois à grande échelle. A chaque fois, la même promesse : la dématérialisation, la numérisation et désormais l’Intelligence Artificielle nous permettront de faire face et nous aideront au quotidien. En réalité, ce sont les personnels qui encaissent : charges accrues, injonctions contradictoires, perte de sens, isolement. Tout se disloque : les conditions de travail et l’exercice de nos missions. Aujourd’hui chaque poste supprimé déstabilise un service. Nous sommes à l’os. Le budget 2026 avec 40 milliards d’économies supplémentaires et son idéologie de ne réduire que les dépenses publiques en lieu et place de trouver des recettes, ne sera pas un tournant mais une bascule.
Concernant nos missions, nous sommes également très étonnés que lors de la présentation des missions essentielles de notre Administration au niveau ministériel, la DGFiP ait oublié en tant que tel le contrôle fiscal, noyant ce dernier dans la gestion fiscale. Est-ce à dire que sur ce sujet vous partagez désormais les propos du 1er président de la Cour des Comptes, M. Moscovici, indiquant que sur la fraude fiscale, il n’y aurait plus de grain à moudre ? Est-ce à dire que nous ne serions plus une administration de contrôle ?
Comme nous l’avions soulevé lors du Comité de suivi sur l’accord concernant l’engagement des personnels, nous vous redemandons officiellement de vérifier l’intégralité des conditions statutaires avant le passage des épreuves orales d’admission et non après la publication des résultats définitifs.. Nous avons également démontré ce jour là que l’administration ne sature pas l’intégralité des promotions existantes pour les changements de grade au sein de la catégorie B via les concours ou examens professionnels. Nous affirmons que l’administration est en mesure de ne perdre aucune possibilité de promotion tout simplement en constituant des listes complémentaires sur les concours professionnels pour changer de grade au sein de la catégorie B.
Nous profitons également de cette déclaration liminaire pour vous alerter sur la volonté de l’extrême-droite libertarienne et par la droite anti-impôts de s’attaquer aux agentes et agents des Finances publiques, de pourfendre le consentement à l’impôt à travers une campagne « C’est Nicolas qui paie ». tout en avançant des poncifs xénophobes. Cette campagne prend de l’ampleur en particulier sur les réseaux sociaux mais pas seulement. En effet, cette campagne est relayée par les médias de Bolloré (Europe 1 et C News mais aussi RMC) et depuis ce week-end par Le Figaro qui a publié une chronique de Mathieu Bock-Côté , anti-impôts où il écrit entre autres« L’État a ses hommes de main. Le contrôleur fiscal est un animal froid, qui approche sa proie en sachant d’avance qu’elle ne pourra pas s’en sortir, et qui se permet de la dévorer lentement, sans même l’anesthésier ». Cette nouvelle campagne que nous pouvons définir comme « poujadiste n’est pas isolée, ici où là des groupes de « citoyens souverains »ont déjà envahit nos services comme cela a été le cas au SIP de Béziers en début d’année. Face à cela, Solidaires Finances Publiques vous demande d’agir avec une très grande fermeté !
Nous ne pouvons terminer nos propos liminaires sans réitérer notre total soutien à notre collègue stagiaire qui a été agressée et à l’ensemble des stagiaires et personnels de l’ENFiP, choqués par cette agression.
Compte-rendu
En cours d'écriture