La Direction Générale vient de diffuser sur Ulysse une actualité sociale tentant d'expliquer les biens fondés du projet de réforme de la formation professionnelle. Elle précise également que celui-ci n'est pas finalisé à ce jour.
Ce communiqué de la DG met en évidence deux aspects :
- la volonté de l'administration de réformer le parcours de formation initiale,
- le fossé d'incompréhensions tant sur le fond et le forme qui la sépare des organisations syndicales et des personnels.
Une nécessaire réforme de la formation initiale.
Solidaires Finances Publiques dénonce depuis la mise en œuvre des scolarités fusionnées le caractère imparfait de celles-ci. Nous avons plus particulièrement identifié une perte d'expertise et de technicité qui conduit les futurs cadres A et B à n'avoir qu'une vision sommaire des missions qu'ils ou elles seront amené(e)s à exercer au cours de leur carrière. Nous constatons par ailleurs que la formation est trop dense, ceci étant dû au fait qu'elle a été élaborée sur la base des durées qui pré existaient dans les anciens statuts A et B des ex DGI et DGCP.alors que l'enseignement théorique couvre désormais l'essentiel des missions dévolues aux deux ex-réseaux. Ainsi, l'administration a fusionné deux cursus très spécifiques en un seul, sur une durée globale (stage pratique compris) inchangée et pour y arriver elle a notamment condensé et reformulé certains messages, élagué certaines matières, réduit les temps d'appropriation personnelle...
Depuis la création du conseil de promotion (instance de dialogue au sein de l'ENFIP réunissant des élus stagiaires et l'administration) les représentants élus de Solidaires Finances Publiques ont mis en avant que la scolarité est insuffisamment professionnelle dans son contenu, avec des outils pédagogiques souvent inadaptés qui ne permettent pas toujours de percevoir les liaisons entre les services ainsi que les chaînes de travail.
Plus globalement, il apparaît évident que la durée globale de la formation initiale (théorique et pratique) est sous-dimenssionnée par rapport aux savoirs indispensables pour permettre un bon exercice du métier de cadre A ou B. Nous jugeons nécessaire de proposer aux stagiaires une formation statutaire qui leur permette notamment d'acquérir le socle commun indispensable à l'exercice de leurs fonctions et d'acquérir un niveau de connaissances suffisamment étoffé, permettant des mobilités fonctionnelles réussies et basées sur le libre choix.
Pour Solidaires Finances Publiques, des ajustements majeurs doivent émerger afin de renforcer le corpus professionnel des agents accédant à la catégorie A et B. Ceci doit s'appuyer sur un projet ambitieux conduisant à renforcer le contenu des savoirs, des savoir-faire et des savoir-être. Bien entendu ceci n'est pas possible en conservant la durée actuelle des formations initiales qu'il faut détendre en allongeant notamment la durée globale de la formation et plus particulièrement la partie post formation théorique en école. Cette partie devant plus exactement conduire le stagiaire sur un chemin de praticité lui permettant de confronter l'essentiel de ses connaissances théoriques de cadre A ou B à la réalité du réseau et des missions et d'évoluer par pallier à l'acquisition des savoirs pratiques qui lui seront nécessaires lors de sa prise de poste effective. L'idée d'améliorer l'accompagnement à la prise de poste nous convient parfaitement car elle répond à notre demande, mais le projet de l'administration dénature tout la mécanique globale de la formation initiale qui ne peut se réduire à la prise de poste.
Nous ne développerons pas ici notre projet revendicatif en matière de formation initiale, mais il vise avant tout, à permettre aux futurs cadres A et B, toutes voies confondues d'accès au grade, de pouvoir prendre pleinement pieds dans leurs habits d'inspecteur des finances publiques ou de contrôleur des finances publiques et de pouvoir disposer de savoirs initiaux solides et transverses leur permettant de pouvoir aisément accéder aux parcours de formation en cours de carrière qu'ils souhaiteront notamment à l'occasion de mobilités fonctionnelles librement choisies.
Un fossé d'incompréhensions
En réponse à ces constats et aux revendications portées, l'administration met en avant un projet de réforme qui vise à préparer les inspecteurs stagiaires (la formation initiale des cadres B étant ciblée dans un second temps) aux métiers qui seront les leurs à leur sortie d'école. Elle précise que ce projet s'appuie d'une part sur un cycle de discussions initié lors du CTR de janvier 2017 après la tenue d'un GT de cadrage en avril 2016 et d'autre part sur des réflexions conduites par la centrale en lien avec des cadres supérieurs du réseau.
Nous ne reviendrons pas ici sur ce que nous avons pu dire suite à ces différents rendez-vous, mais nous nous souvenons que le GT d'avril 2016 avait laissé à l'ensemble des organisations syndicales un sentiment étrange, celui d'une direction générale en questionnement. L'administration à l'époque évoquant le fait qu'aucune piste stratégique n'était arrêtée et que les discussions devaient être nourries sur ce point. Et pourtant elle nous présente désormais ce rendez-vous d'avril 2016 comme un GT de cadrage alors que les pistes avancées n'ont jamais été confrontées à un débat de fond. C'est pour le moins hallucinant.
Il est également hallucinant que l'administration s'appuie sur des réflexions conduites avec des cadres supérieurs du réseau sans mettre sur la table la nature plurielle de celles-ci. Par le passé, les réformes majeures s'appuyaient généralement sur des missions d'audit, faisant l'objet de rapport soumis au débat contradictoire. Ici il n'en n'est rien. Alors que les évaluations des formations initiales démontrent que le réseau est plutôt satisfait de ce qui se fait, alors que les évaluations à froid confortent plutôt l'administration dans son analyse que la formation actuellement dispensée est satisfaisante, contrairement à ce que nous pouvons affirmer, il est surprenant de constater que certains cadres supérieurs du réseau soient persuadés que rien ne va dans le cursus actuel ! Mais nous ne savons rien de ce qui ne leur va pas, ni si les pistes avancées ne sont pas forgées d'arrières pensées bien éloignées du sujet de la formation !
Autre incompréhension, la Direction Générale forge sa réforme sur l'amélioration du niveau de compétence des stagiaires en sortie d'école au regard des métiers qu'ils vont exercer en prise de poste. C'est un point de désaccord majeur. Rien dans le projet présenté par la DGFiP nous permet d'avoir la certitude que le futur cadre A ou B sera en capacité d'organiser librement et de manière optimale son parcours de carrière. Bien au contraire, on entrevoit un probable enfermement fonctionnel des agents dans des approches micros métiers qui auront probablement un impact négatif sur les évolutions de carrière et sur le droit à la mobilité choisie.
Le projet de réforme exposé dans le communiqué du 31/7 remet en cause la notion même de formation statutaire. Nous sommes fermement opposés à cela et nous demandons à la Direction Générale qu'elle construise un parcours de formation initiale qui soit en phase avec la doctrine d'emploi du cadre A ou B et ce conformément à son positionnement statutaire.
Incompréhension également sur l'esprit de la formation socle. Pour la DG, celle-ci correspond à la formation carrière actuelle. C'est pour partie inexact, mais passons. Ce qui est choquant c'est que l'administration estime que cette partie sera de nature à permettre au futur Ifip de pouvoir prendre connaissance précisément des métiers de la DGFIP alors que les fiches remises pour les GT parlent seulement de fournir des repères. Nous constatons à ce stade et à regret que le cursus proposé est plus proche de la sensibilisation que de la construction d'un savoir précis en la matière.
Incompréhension également sur la durée du cursus. Nous affirmons à raison que la formation des Ifip va être ramenée de 18 mois à 12 mois. alors que la centrale soutient que la durée demeure inchangée, mettant en avant le passeport de formation qui sera mis à place à l'issue des 12 mois. Ceci n'a rien à voir et le constat est clair, nous passons d'une formation théorique de 11 mois à une formation théorique de 7 mois et d'une formation pratique de 6 mois à une formation pratique de 4 mois (formation pratique devenant probatoire par ailleurs, ce que nous condamnons fermement).
Enfin, incompréhension autour de la notion d'expertise. De toute évidence, l'administration se focalise sur une micro expertise et conçoit le réflexe métier en lien avec une fonction bien précise, alors que nous portons une approche plus large et plus en phase avec la réalité du métier d'inspecteur des finances publiques, à savoir un expert et un cadre, qui soit en capacité d'avoir une vision étendue et pro active de ces fonctions de cadre A et en capacité de monter très vite en puissance et en savoir sur de nouvelles compétences ou fonctions.
Un non-dit éloquent
Curieusement dans son communiqué la Direction Générale n'évoque pas l'effet kiss-cool de son projet : la remise en cause du principe érigé lors de la fusion par l'administration de l'époque et qui a conduit à affecter les stagiaires en sortie d'école dans le cadre du mouvement général et sur la base de l'ancienneté administrative en catégorie A. Le projet de scolarité réformée remet en cause ce principe et conduit à affecter les stagiaires Ifip dès leur nomination dans le grade, soit en tout début de scolarité théorique mais également à les exclure du mouvement général en les affectant sur des postes demeurant vacants à l'issue du mouvement général des titulaires. Si cette piste devait être retenue cela conduirait à instaurer une règle de gestion pire que celle héritée des deux anciens réseaux. Sur ce point, le désaccord est total entre l'administration et Solidaires Finances Publiques et aucune garantie n'a été avancée à ce jour pour préserver les droits des futurs stagiaires.
En conclusion, la Direction Générale réaffirme qu'une formation de qualité est un enjeu décisif pour la DGFiP, ses agents, ses missions. Nous partageons sans réserve cet objectif et nous portons notamment la revendication de renforcer l'offre et le contenu de la formation initiale et de la formation en cours de carrière. Malheureusement, le projet mis sur la table par la Direction Générale est à l'opposé de ce principe. Il est dès lors nécessaire d'avoir sur ce sujet, comme sur bien d'autres, un dialogue social constructif et qui ne soit pas seulement une étape alibi permettant d'habiller un faux semblant de discussions.