Ce mardi 23 février 2021 s’est tenu le comité national de suivi des conditions de vie au travail (CNS CVT) de la DGFiP. Il n’avait pu se tenir l’année dernière en raison de la pandémie et nous avions boycotté le précédent. Cette réunion s’est tenue sur la journée avec 7 points à l’ordre du jour dont un sur l’avancement des projets lancés avec l’Agence Nationale de l’Amélioration des Conditions de Travail (ANACT).

liminaire

Nous commencerons nos propos liminaires par reprendre les données que nous avons exposés lors du dernier CTR sur la santé au travail des agents et agentes des finances publiques :

Santé au travail / Bilan social

Nous ne ferons pas de rappel sur la volumétrie des jours CET (1589 ETP) ni des heures écrêtées (256ETP) qui démontrent, si il en était besoin, de l’intensité de la charge de travail qui reposent sur les agents de notre administration.

La santé des agents se dégrade. Quelques chiffres que nous vous donnons à ce titre sur le nombre d’AS/MP et le nombre de jours consécutifs :

 

2018

2019

évolution

En %

Nb d’AS/MP

1 329

1 413

+84

+ 6 %

Nb de jours AS/MP

66 146

80 924

+14 778

+22 %

Nb de jours par AS/MP

49,8

57,3

+7,5

+15 %

C’est donc le nombre d’AS/MP qui croit mais leur gravité aussi. Si nous regardons les ratios de COM, CLM, CLD, CGM, ils sont aussi en augmentation. D’ailleurs cela n’est pas sans lien avec la mise en place de la journée de carence qui génère du présentéisme et de ce fait augmente la durée des arrêts maladie. D’ailleurs à ce titre, il serait plus intéressant d’avoir le ratio du nombre de jours par agent en congé maladie que rapporté à l’effectif global.

Un autre phénomène qui doit nous alerter, le nombre de temps partiels thérapeutiques. Il est passé de 439 en 2015 à 819 en 2019. Il a doublé en 4 ans.

Le bilan social est le miroir des effets délétères des réformes et restructurations diverses que subissent les agents et agentes des finances publiques. Les réorganisations, les changements technologiques, les évolutions législatives, l’accumulation des tâches nouvelles, la baisse des effectifs ont des effets sur la santé des agents et leurs conditions de travail.

Par ailleurs, dans le bilan social, il y a un point sur les entretiens réalisés avant ou retour des congés liés à l’enfant. Mais mis à part une présentation du dispositif, il n’y a aucune donnée sur le nombre d’entretiens réalisés ni de bilan. C’est d’ailleurs bien là toute la difficulté c’est que nous ne sommes pas certains que ce dispositif soit réellement mis en œuvre de manière systématique. Nous vous en demandons donc le bilan.

Télétravail

Nous connaissons déjà votre réponse sur ce point mais nous le porterons chaque fois que le point sera abordé. Il devient urgent que la DGFiP travaille à une indemnisation des frais générés (fluide, chauffage, énergie...) par le travail à domicile. Il revient à l’employeur de donner les moyens à ses salariés d’exercer ses fonctions. Le travail à domicile à temps plein pénalise financièrement l’ensemble des agents et particulièrement celles et ceux aux revenus les plus modestes.

Au vu des risques que le télétravail fait porter en termes de TMS, fatigue musculaire et de toutes les formes d’algies (lombalgies, douleurs cervicales, etc), il est indispensable d’équiper les collègues télétravailleurs et télétravailleuses d’un poste complet de travail (écran, chaise, souris, clavier…).

La dimension santé et sécurité est très peu présente. L’impact sur les collectifs de travail et sur le travail lui-même sont abordés de façon très succincte. Le droit à la déconnexion est un vœu pieu. Il ne peut être envisagé de déploiement massif d’une modalité de travail qui se ferait au détriment de la santé des personnels ou qui viendrait à déstabiliser les collectifs de travail. Nous ne voulons pas d’un télétravail « low cost ».

Depuis le premier confinement et particulièrement après le deuxième, le télétravail n’est plus du tout vécu de la même manière. Ce qui était accepté sur une période provisoire dont on pensait voir la fin n’est plus tout perçu de la même manière. Nous y reviendrons en détail lors de la présentation de la fiche en question. Mais il est indispensable que l’administration prenne la mesure de ce qui remonte du terrain. Des tensions émergent entre agents en télétravail et en présentiel. Dans un certain nombre de services, les agents en présentiel ont l’impression d’avoir à gérer les tâches ingrates (courrier, appels téléphoniques, prise de rdv…). Une réflexion doit être portée pour assurer un équilibre dans la répartition des tâches. Un agent en présentiel doit aussi avoir des moments d’isolement pour gérer des dossiers plus complexes, ne pas avoir à répondre au téléphone, ne pas gérer de rendez vous.

Une vigilance particulière doit être portée sur la situation des personnels qui sont en télétravail et/ou ASA depuis mi mars. Ce sont des personnels qui n’auront pas vu les services depuis presque un an. Les personnels en ASA depuis mars sont à peu près 250. Vous est-il possible de nous donner la volumétrie des agents en télétravail à temps plein depuis cette date? Ce sujet rejoint celui du retour au poste après une absence prolongée.

Fiche de signalement

Vous présentez une rénovation de la fiche de signalement. Nous reviendrons en détail sur le dispositif et nos attentes mais nous voudrions que le nombre de fiches de signalement et une analyse détaillée soit faite et pourrait être intégrée au sein du bilan social. Même s'il y a toujours une sous-déclaration des phénomènes, l'analyse détaillée de ces fiches permettrait de percevoir une tendance des différentes violences que subissent les agentes et les agents au sein de notre direction et peut être de déterminer des axes de prévention en la matière.

Les formations CVT

Vous faîtes un détail des formations CVT proposées, et nous n’avons pu nous empêcher de faire le lien avec un élément présent dans le bilan social sur la formation des membres CHSCT qui est mise à 100 %. Les retours que nous avons le sujet ne vont pas dans ce sens là. La direction n’a fait aucun retour sur le sujet et nous portons l’idée qu’il faudrait établir un véritable programme de formation de l’ensemble des acteurs de la prévention dont les AP, les chargés de missions CVT et les représentants des CHSCT.

Sur la prise en compte des CVT dans la conduite de projet

En effet la Note d’Orientation ministérielle 2019 insistait à nouveau sur le fait que les services devaient se saisir de ce guide afin de prendre en compte la santé, la sécurité et les conditions de travail à chaque réorganisation/regroupement de services. Si effectivement l’ensemble des éléments à fournir aux représentants des personnels paraissent plus consistants et plus complets qu’auparavant, il n’est pas certain que les directions s’en emparent et présentent des dossiers complets au CHSCT, et tout particulièrement sur la dimension conditions de travail.

La DGFIP a réalisé pour les directions locales un modèle de dossier de présentation des réorganisations reprenant les têtes de chapitre du document ministériel. Ce document comprend trois parties : la 1ère décrit le projet, la 3ème traite des différentes dimensions de la conduite de projet dont les modalités d’association des agents au projet (élément essentiel) et la 2ème intitulée « conséquences sur les conditions de travail ». Il est essentiel que dans cette partie la direction décrive de façon détaillée les conséquences sur les procédures de travail, la nature des activités, les évolutions des compétences, l’environnement de travail. Force est de constater que souvent les dossiers présentés sont un copier coller du projet national. Souvent la partie sur les conditions de travail est la moins bien détaillée.

Le guide insiste à plusieurs reprises sur la nécessité de préparer très en amont le projet pour prendre en considération la dimension conditions de travail au sens large dans chacun des projets envisagés. Si nous ne pouvons que partager ce point de vue, il en va tout autrement sur le terrain. En effet, la plupart des projets sont très souvent présentés au CHSCT à peine dans le délai de 15 jours, avec une approche des conditions de travail la plupart du temps indigente et un CT consulté pratiquement le lendemain de la tenue du CHSCT, voire même avant celui-ci ! Il est impossible d’associer les acteurs de la prévention, faute de documents et de temps, ni même de permettre le lien entre les différentes services RH. Nous vous invitons à initier des RETEX sur le sujet pour faire le bilan des TOPS et FLOPS de la prise en compte des CVT dans les projets de restructuration.

Évaluer les risques pour les prévenir

Le premier point mis en avant dans la note d’orientation 2021 porte sur l’évaluation des risques professionnels. La démarche d’évaluation est centrale dans les démarches de prévention mais la crise sanitaire nous a démontré que l’Administration était plus dans une gestion du risque que dans une démarche de prévention. L’encadrement supérieur est loin d’avoir acquis la démarche et pour s’en convaincre il n’y qu’à regarder comment les DUERP ont été mis à jour pour l’occasion.

La démarche d’évaluation nécessite de sortir de la logique gestionnaire du risque. Il ne s’agit pas de remplir un tableau et d’affecter des niveaux de priorité. L’enjeu est d’identifier des risques pour déterminer en face quelle mesure mettre en œuvre pour l’éviter, en diminuer les effets quand il ne peut être supprimé à la source. Les assistant·es de prévention sont au cœur de cette démarche mais encore faut-il qu’ils aient les moyens d’exercer leur mission. Trop d’AP sont à temps partiels. Que dire des chargés CVT !

Placer l’organisation du travail au cœur de la démarche de prévention est une approche particulièrement mal comprise par l’administration. Alors que les directions se contentent de placer des agent·es en télétravail, ou de lever la plage fixe, ce qu’il faut c’est ouvrir des discussions service par service avec les personnels concernés pour décider collectivement de l’organisation à mettre en place. Il s’agit d’une démarche qui se décline service par service pour définir une organisation de travail en fonction des impératifs, des contraintes locales pour supprimer un risque donné ou alors d’en amoindrir les effets.

Imputabilité

En ce qui concerne le traitement des dossiers d’imputabilité il y a un réel travail de mise à jour à faire. Nous vous avons déjà interpellé sur la reconnaissance d’un avc sur le lieu de travail qui était refusé à un agent mais grâce à votre intervention il a trouvé une suite favorable mais elle démontre la méconnaissance des directions locales sur le sujet. Je cite également un directeur local qui renvoie pour recours au CSRH. Nous avons déjà échangé sur le sujet mais il souligne la méconnaissance des directeurs sur l’obligation de sécurité  et ce qu’elle implique dans la gestion des dossiers d’imputabilité. Nous revenons encore sur le sujet pour citer l’argumentaire de SRH1 dans un mémoire en défense en la matière en date du 25 janvier 2021 qui méconnaît la présomption d’imputabilité :

« De plus, il appartient au fonctionnaire « de rapporter la preuve de l’existence d’un lien direct et certain entre les troubles qu’il invoque et un fait précis ou des circonstances particulières de son service; que cette preuve ne saurait résulter de la seule circonstance que l’infirmité en cause est apparue au cours du service ou a été favorisée ou déclenchée par les conditions de celui-ci ( CE,07/07/2004, M. Fruh, n°246292 ) ».

Depuis l’ordonnance 2017-53 du 19 janvier 2017, il existe désormais une définition de l’accident de service avec une présomption d’imputabilité dès lors qu’il est survenu dans le temps et le lieu du travail, de l’accident de trajet ainsi que de la maladie professionnelle pour les fonctionnaires.

En ce qui concerne le traitement des procédures des reconnaissances d’imputabilité, nous voudrions revenir sur la demande de faire appel à un même expert pour des pathologies différentes, la convocation à des expertises sans en donner le motif.

Nous finirons donc cette liminaire sur une invitation à constituer des groupes de travail issus du CNS CVT sur les thématiques suivantes avec une demande d’un calendrier pour la fin du 1er semestre sinon début 2nd :

  • le retour au service après une absence prolongée pour raison de santé
  • l’imputabilité des AS et MP avec un focus sur les liaisons RH locales et CSRH

Ordre du jour du CNS CVT du 223 février 2021

Documents du CNS CVT du 23 février