A l’issue du bilan d’étape réalisée à la fin du 1er semestre 2019, la DGFiP comptait 3 367 agents et agentes en télétravail soit un taux de 3,2 % des effectifs (104 112). Après une pandémie dont le télétravail a été une opportunité de maintenir une activité distanciée face au risque de propagation et de contamination à la COVID-19, le sujet a pas mal évolué au sein de notre administration et du monde du travail en général. Au point qu’aujourd’hui cette modalité concerne plus du tiers des effectifs (entre 32 997 et 50 546).

liminaire

Si les revendication précédentes de Solidaires Finances Publiques étaient pertinentes à l’époque, elles sont encore plus d’actualité. A de tels niveaux, les enjeux à la fois politiques et d’organisation du travail ne sont plus les mêmes. Si cette modalité de travail répond à des attentes légitimes des collègues, les défis pour les collectifs de travail sont nombreux et nous y reviendrons tout au long de ce groupe de travail.

Tout d’abord, le télétravail est encore bien souvent appréhendé comme une modalité de gestion du temps de présence, un peu comme les demandes de temps partiel relevant d’une demande d’un agent à son ou sa cheffe de service. Or le télétravail interroge de bien des manières différentes les manières de travailler, de s’organiser, de répartir les charges de travail, les activités non télétravaillables. Solidaires Finances Publiques depuis le début des groupes de travail sur le sujet revendique l’importance d’un débat au sein des services eux-mêmes sur la mise en œuvre de cette modalité. Les effets à long terme sur la santé des personnels mais aussi sur les processus de travail sont loin d’être évalués et perceptibles encore à ce jour. Ces enjeux essentiels ne sont absolument pas abordés dans les fiches de travail de ce GT.

De plus le télétravail se met en œuvre dans des environnements de travail non stabilisés dont les réformes sur les structures, les missions et les suppressions d’emplois sont toujours bien en cours. Le télétravail vient se rajouter à ces difficultés quotidiennes des agents et agentes mais aussi, et nous insistons, des cadres de proximité. Il vient exacerber les difficultés déjà présentes qui dans un contexte présentiel pouvaient se voir réguler par elles-mêmes.

Le télétravail vient renforcer l’individualisation comme norme de relation d’un agent avec son travail. Il est isolé des ressources que peut représenter le collectif face aux difficultés quotidiennes et enfermé dans une vision en silo de son travail. D’ailleurs de nombreux grands acteurs de la Tech reviennent sur leur enthousiasme à un modèle hybride de travail. Dans un rapport sur le sujet de mars 2021, Microsoft indique que les chefs d'entreprise doivent résister à la tentation de considérer le travail hybride comme une « activité habituelle » et soutient qu'il faudra repenser des hypothèses sur le long terme. « Les choix que vous faites aujourd'hui auront un impact sur votre organisation pour les années à venir. C'est un moment qui nécessite une vision claire et un état d'esprit de croissance », commente Jared Spataro, vice-président de Microsoft 365. « Ces décisions auront un impact sur tout, de la façon dont vous façonnez la culture à la façon dont vous attirez et retenez les talents, en passant par la façon dont vous pouvez mieux favoriser la collaboration et l'innovation », évoque ce dernier.

Au travers de ce GT sur un bilan du télétravail au sein de notre administration, nous ne pouvons que regretter le manque d’analyse qualitative sur le sujet et le manque de perspective. Il n’est abordé à aucun moment le sujet central de l’organisation du travail et de très loin celui des conditions de travail. Nous sommes particulièrement contrariés de constater que la DG n’intègre même pas les données d’une expérimentation des travaux locaux qui se passe actuellement au sein de plusieurs directions sur le sujet. Il est anormal que rien n’apparaisse. Cela donne le sentiment que la DG avance seule sur le sujet sans se nourrir des retours terrain ni de l’expertise des personnels et de l’ANACT. D’ailleurs la DG ne questionne même pas ses agents et agentes directement sur le sujet, elle le fait par l’intermédiaire des référents télétravail. S’ils ont opéré les campagnes de déploiement du dispositif, ils ne sont pas au cœur des ressentis sur l’impact sur les collectifs de travail et peut-être eût-il été nécessaire d’y associer les ressentis des télétravailleurs et télétravailleuses, chef.fes de service ainsi que les collègues des services concernés. Nous rappelons ici le propos du Secrétariat général lors du GT ministériel du 22/09/2021 : le télétravail « est une opportunité pour l’encadrant d’associer les membres de son équipe à une réflexion collective sur l’adaptation et l’amélioration de l’organisation du travail ».

Pour Solidaires Finances Publiques, nous reprendrons ici les 5 grandes problématiques essentielles que la DGFiP doit traiter, qui sont d’ailleurs issus des travaux en Haute-Garonne avec la démarche en cours avec l’ANACT :

  • Comment trouver, organiser et maintenir l’équilibre entre le présentiel et le distanciel, entre les activités télétravaillables et les activités non télétravaillables ?
  • Comment soutenir la cohésion d’équipe et le travail collectif avec le télétravail ?
  • Comment communiquer et transmettre les informations à toutes et tous avec le télétravail ?
  • Comment assurer l’intégration des nouveaux arrivants avec le télétravail ?
  • Quelle évolution des pratiques managériales avec le télétravail ? Comment trouver le juste équilibre entre contrôle et suivi des activités d’une part, et autonomie laissée aux agents d’autre part ?

Nous reviendrons aussi sur le sujet essentiel des moyens matériels donnés aux collègues en télétravail, en constatant la grande hétérogénéité des pratiques selon les Directions. Pour notre part, nous considérons essentiel de prendre en compte les besoins constamment soulignés par les ISST pour une ergonomie suffisante : doubles écrans, téléphones, fauteuils, mallettes ou sac à dos…