Lorsque M. Bézard décida en 2012 de mettre en place un Observatoire interne destiné à mesurer le ressenti des agents, la situation était mauvaise. Pensait-il que cela ne pourrait plus tellement s'aggraver ? Sans doute ! Aussi, espérait-il que son action permettrait de la faire évoluer positivement... ou, a minima, inverser sa courbe à lui, celle du mal être au travail...


4 ans après, en décembre 2016, 46 673 agents de la DGFiP ont répondu à l'enquête, soit 44 % de participation. Elle s'étiole au fil du temps : 54 % en 2013, 49,5 % en 2015.
Ce baromètre semestriel, à l'aiguille bloquée sur tempête, ne devrait pas survivre à la transformation de l'enquête ministérielle annuelle (sondage sur 2 000 fonctionnaires de Bercy) en enquête annuelle ouverte à tous les agents de Bercy. Et la DGFiP sera sans doute trop heureuse de se débarrasser d'un thermomètre obstinément orienté à la fièvre.
Car les chiffres parlent : 63 % des agents sont pessimistes sur leur avenir au sein de cette administration (ils étaient 52 % en 2013), 73% affirment manquer de temps pour s'informer et 62 % pour accomplir correctement leur travail.
95 % (soit 5 % de plus qu'en juin 2015) ont le sentiment de travailler dans l'urgence !

Ils souffrent de plus en plus de stress, qu'ils évaluent sur une échelle de 1 à 10, pour 80 % d'entre eux entre 5 et 10, dont 56 % entre 7 et 10. Rien qu'entre juin 2015 et décembre 2016, ces chiffres ont augmenté de 2 points. La charge de travail en reste la cause essentielle (pour 64% contre 61 %).
67 % d'entre eux jugent le climat social mauvais ou très mauvais à la DGFiP (+ 6%). Ils sont aussi 29 % (+ 4 %) à le penser au sein de leur unité de travail, et 57 % (+ 10 %) sur leur structure de travail et la Direction.
Leurs attentes visent la rémunération, les conditions de travail, l'organisation interne et les méthodes de travail, qui constituent toujours les points sur lesquels les agents estiment qu'il faudrait agir en priorité.
Cartons rouges !
Ils sont 73 % à penser que la DGFiP n'évolue pas dans le bon sens (66 % en juin 2015), 78 % que l'administration ne les écoute toujours pas, et 71 % (+3 %) disent que l'attention portée aux conditions de travail est insuffisante.
57 % ne croient plus à l'allègement des tâches (53 % en juin 2015), qui était pourtant la grande promesse de M. Parent.
Entre un tiers et un quart des agents seulement fondent quelque espoir sur le numérique : 27 % seulement ont un avis positif sur le Wifip, et 36 % jugent positivement l'e-formation (46 % la jugent de façon négative).
Combien de baromètres faudra-t-il encore aux Ministres et responsables de la DGFiP pour prendre conscience du fossé grandissant entre leurs décisions, leurs orientations, et la réalité quotidienne ?
Le baromètre n'en parle pas... mais ...
Nous suggérons à nos élites déconnectées de la réalité d'interroger les collègues sur d'autres points :
8 milliards ont été dépensés en quinze ans dans le développement des « cathédrales numériques ». Un candidat à la présidentielle, favori des sondages, envisage même d'y consacrer la majeure partie des 5 milliards d'investissement qu'il prévoit... pour améliorer les conditions de travail !
Sur les 8 milliards dépensés, un tiers a été investi sur des projets finalement tombés à l'eau (Copernic, l'ONP,...), un autre tiers l'a été sur des projets qui rament ou sont toujours en chantier (Sirhen, Sirhius,...). Trouvez-vous ces dépenses : plutôt pertinentes ? plutôt désastreuses ?
Dans la période, le budget DGFiP a été amputé d'au moins 600 millions sur la masse salariale et sur le fonctionnement courant. Trouvez-vous ces économies : plutôt pertinentes ? plutôt désastreuses ?
Et maintenant ?

Les actions conduites dans le cadre du plan d'action pour l'amélioration des conditions de vie au travail ne sont perçues positivement que par 28 % des agents (contre 38 % en 2013). Et 66 % expriment un avis négatif (51 % en 2013). Même le sujet de la sécurité et de la protection, qui a fait l'objet d'une prise en charge et d'un suivi effectif, peine à convaincre. Ils ne sont plus que 47 % à le juger positivement (c'était 54 % en 2013), 42 % exprimant un avis négatif (contre 32 % en 2013).
Ces décrochages valident hélas totalement les critiques portées par Solidaires Finances Publiques sur ces dernières années, qui nous ont conduit (avec la CGT et FO) à claquer la porte du Comité National de Suivi. Nous refusons en effet de cautionner le vide.
En verrouillant totalement la porte à tout échange sur le rôle et la place de l'encadrement (jetant aux orties le rapport qu'elle-même avait commandé et payé à l'IRES !), sur l'impact des décisions en matière de pilotage des missions (chasse gardée, circulez il n'y a rien à voir !), en refermant sitôt entrouverte la discussion sur le poids des indicateurs, en interrompant dès 2012 les échanges sur la sécurité et la protection, la DGFiP porte l'entière responsabilité de l'échec du dialogue sur le sujet et des conséquences sur la santé et les conditions de vie au travail des personnels.
Au fil du temps, la prise en charge de ces questions essentielles a été transformée en un suivi purement administratif et formel. L'absence de volonté au plus haut niveau a fait le reste.
Que faut-il faire maintenant ?
Simplement, regarder la réalité en face, écouter les agents et leurs représentants, et prendre les décisions nécessaires pour casser la spirale du mal-être et de la négation de l'humain.