Dans le cadre de la cérémonie d'hommage à la mémoire de Ludovic Montuelle assassiné en novembre 2022 dans l'exercice de ses missions, Solidaires Finances Publiques s'adresse à la Directrice générale des Finances Publiques.
Madame la Directrice Générale,
Ce 6 juin 2024, se déroule à la Direction Générale une cérémonie d’hommage à la mémoire de Ludovic Montuelle, assassiné dans l’exercice de sa mission de contrôle fiscal. Nous avons également une pensée pour notre collègue séquestrée et violentée.
Il aura fallu ce nouveau drame pour que la DGFiP reconnaisse que ses agents et ses agentes sont régulièrement victimes de violences verbales et physiques.
Il aura fallu ce nouveau drame pour que la Direction Générale prenne conscience des nombreux dysfonctionnements et points de fragilité dans les dispositifs de sécurité et de protection des personnels.
Il aura fallu ce nouveau drame pour démontrer l’inutilité des outils d’alerte et de suivi des risques, notamment, psycho-sociaux lorsqu’ils ne sont pas accompagnés d’une réponse adaptée.
Se souvenir et rendre hommage sont des gestes forts et importants. Ils participent au nécessaire devoir de mémoire.
Ce devoir de mémoire nous oblige collectivement à faire en sorte qu’un tel drame ne se reproduise ni aucune autre violence, si minime ou anodine puisse-t-elle paraître.
Ce devoir de mémoire vous oblige et vous contraint à assurer la protection de tous les agents de la DGFiP.
C’est une obligation légale de l’employeur. C’est une obligation morale envers les agents placés sous votre responsabilité.
Alors que plusieurs dispositifs concernant la protection et la sécurité des personnels existent depuis des années à la DGFiP sans toujours être appliqués, au lendemain de l’assassinat de Bullecourt, l’administration a posé le « principe de tolérance zéro » et invité ses personnels à dénoncer toutes les incivilités dont ils sont victimes.
Libérer la parole et faire remonter la réalité du terrain étaient un préalable à toutes formes d’actions.
Dans un même élan, se sont mis en place des groupes de mutualisation, des groupes de travail et de réflexion.
Aujourd’hui, il nous importe de regarder ce qu’il reste de cette volonté et de l’application quotidienne du principe de tolérance zéro.
Oui des mesures importantes ont été prises, notamment la réécriture de l’art L13 du LPF.
Oui l’achat d’équipements de protection a été programmé,
Oui la réflexion sur la sécurisation des locaux et leur mise en conformité se poursuit.
À bien des égards cependant, ces mesures demeurent perfectibles et insuffisantes, voire inexistantes.
Faire vivre avec intelligence et sans défiance envers les agentes et les agents ces premières décisions, se révèle difficile. Ainsi, en est-il des entraves persistantes à la rédaction de fiches de signalement, de l’absence de leur prise en charge ou de l’obligation de remplir une attestation d’utilisation des véhicules de service. En insistant sur les sanctions disciplinaires encourues par l’agent utilisateur, cette attestation constitue un frein à l’utilisation d’une mesure de protection.
Il suffit de regarder les conditions de travail actuelles des agents et agentes en charge de l’accueil des usagers pour s’apercevoir que le chantier de sécurisation des points d’accueil relève davantage de l’euphémisme que de la réalité.
Il suffit d’écouter les agents en charge de la mission contrôle fiscal pour s’apercevoir que l’omerta et la loi du silence perdurent localement. Est-il aujourd’hui acceptable qu’un vérificateur ne soit pas clairement et réellement soutenu lorsqu’il reçoit une lettre de menace, voit ses pneus de voiture crevés, fait l’objet d’une plainte devant un tribunal ou encore reçoive la visite d’un contribuable à son domicile ?
Par ce courrier, Solidaires Finances Publiques vous adresse une alerte solennelle.
Le nécessaire devoir de mémoire va bien au-delà d’une nouvelle cérémonie d’hommage. Il doit irriguer toute la DGFiP et permettre aux agents et agentes de retrouver sécurité et sérénité au travail.
Nous insistons : ce sont vos obligations en tant qu’employeur.
Il vous appartient désormais de vous emparer de ces problématiques et d’assurer l’appropriation et le respect d’obligations légales dans tout le réseau.
Au principe de tolérance zéro, Solidaires Finances Publiques exige la mise en place d’un principe de transparence et d’accompagnement réel des personnels mis en difficulté et menacés.
Les questions de protection et de sécurité des agents relèvent des formations spécialisées (autrefois appelées CHSCT). Les représentant-es élu-es des personnels y sont membres de droit et doivent, à ce titre, être destinataires des fiches de signalement rédigées par les agents et s’assurer du suivi effectif desdites fiches.
Par ailleurs, le dispositif de protection fonctionnelle des agents est aujourd’hui obsolète et insuffisant. Solidaires Finances Publiques en demande des modifications substantielles. La DGFiP ne cesse de reporter ce chantier au motif que la Fonction Publique entend travailler le sujet.
Pour Solidaires Finances Publiques, cette attente n’a que trop duré. Il appartient désormais à la DGFiP d’impulser une véritable démarche et d’être force de propositions.
Ne doutant aucunement de l’intérêt que vous porterez à ce courrier, nous vous prions, Madame la Directrice Générale, d’agréer nos sincères salutations.
Pour Solidaires Finances Publiques
Anne GUYOT WELKE
Secrétaire générale
Lettre de Solidaires Finances Publiques à la Directrice Générale