Les résultats de l’Observatoire interne 2025 viennent d’être publiés. Derrière le satisfecit de la Direction Générale concernant le taux de participation et de certains indicateurs, la dégradation des conditions de travail, la perte de sens au travail, les difficultés d’exercice de nos missions sont une nouvelle fois criantes.
L’édition 2025 de l’Observatoire interne fait état d’une participation en nette hausse : 52 891 agent·es de la DGFiP ont répondu à l’enquête, soit 54 % de l’effectif, contre 47 % en 2024. A noter que pour atteindre ce chiffre, le délai du sondage a été allongé et de nombreuses relances ont été envoyées aux collègues les incitant fortement à y répondre. Ce chiffre, en soi, mérite qu’on s’y arrête. Il exprime un besoin d’expression toujours plus fort de la part des collègues, dans un contexte où les espaces de débat sur le travail réel se raréfient. Mais à y regarder de plus près, les résultats traduisent une réalité bien plus contrastée que ne le suggère la communication de l’administration. Par ailleurs, les résultats de l’observatoire 2025 amalgament une fois de plus toutes les catégories des personnels et toutes les structures de la DGFiP sans distinguo ne permettant pas ainsi une analyse fine et précise des réalités quotidiennes des agentes et agents selon leurs grade et services.
Certes, quelques indicateurs évoluent positivement. Les agents et agentes apparaissent un peu plus optimistes : 33 % se projettent favorablement dans leur avenir professionnel à la DGFiP, contre 30 % l’année précédente. Ce chiffre reste toutefois nettement inférieur à celui des autres directions ministérielles (40 %) et plus encore à celui de la Fonction Publique d’État dans son ensemble (67 %). Il s’explique peut-être par des vagues de réformes moins importantes et répétitives. Dans le même esprit, 51 % des agent·es déclarent une motivation stable ou en hausse contre 77 % à la Fonction Publique d’État. La qualité de vie au travail atteint son niveau le plus élevé depuis la création de l’enquête, avec une note moyenne de 6,2 sur 10. Là encore, cette progression reste en retrait par rapport à la moyenne ministérielle (6,4) et à celle de la Fonction Publique d’État (7,1). Enfin, les outils numériques, sont jugés plus adaptés aux différents modes de travail : 80 % des répondants les considèrent désormais comme satisfaisants.
Mais ces évolutions, si elles existent, ne suffisent pas à masquer les tensions profondes qui demeurent. Près d’un agent sur trois se déclare fatigué (33 %), 30 % se disent désabusés, 26 % inquiets, 7 % en colère. Sur chacun de ces items, les résultats sont plus dégradés que ceux observés en moyenne dans le ministère ou dans la Fonction publique. Le niveau de stress reste élevé, avec une note moyenne de 6,2 sur 10, et un tiers des répondants (34 %) évaluent leur stress entre 8 et 10 sur l’échelle. Dans ce contexte, seuls 23 % des agents de la DGFiP se sentent acteurs des changements qui les concernent, contre 52 % en moyenne dans la Fonction Publique d’État.
Le message est clair : les réformes se poursuivent, descendantes et imposées, sans réel espace de discussion ni de réappropriation collective.
La charge de travail reste un point de crispation majeur. Seuls 54 % des répondants s’en déclarent satisfaits. Les restructurations à répétition, les suppressions de postes et la pression sur les objectifs contribuent à désorganiser le travail réel. La reconnaissance, bien qu’en légère progression (47 % d’opinions favorables), demeure inférieure à celle mesurée en moyenne au ministère. Moins d’un agent sur deux se sent reconnu et valorisé dans son activité.
Le management, lui, est mieux perçu sur certains aspects : transmission d’informations, soutien à la cohésion d’équipe, accompagnement individuel. Pourtant, ce renforcement de la présence managériale ne s’accompagne pas d’une amélioration structurelle du fonctionnement. Seuls 59 % des agent·es estiment que leur service fonctionne efficacement et à peine 46 % jugent que la charge de travail est équitablement répartie. Autrement dit, le management semble présent mais sans levier collectif réel sur l’organisation. Le travail prescrit continue de primer et les tensions ne peuvent être abordées que sur le registre de l’ajustement individuel.
En matière de formation et d’accompagnement, la tendance semble aller vers du mieux, Cela étant, les évaluations à chaud et à froid de nombreuses offres de formation démontrent que tout n’est pas parfait et que les offres en formation ne couvrent que partiellement les besoins. Face à une question très orientée et limitée dans sa portée, il est difficile d’en déduire que les agents et agentes sont pleinement convaincus et satisfaits des possibilités de formation, de promotion….
Si l’on s’en tient aux moyennes, le tableau peut sembler s’éclaircir. Mais ce serait une lecture trompeuse. Derrière les chiffres, obtenus par le biais d’un questionnaire fermé, ce que les agentes et agents expriment, c’est moins une satisfaction qu’une lassitude persistante, un besoin de reconnaissance et une exigence de sens face à des transformations subies. La progression de la participation ne reflète pas une adhésion mais bien une volonté d’être entendus. Une volonté qui se heurte à un mur. Car, à la DGFiP, l’écoute reste trop souvent un simulacre : les enquêtes se multiplient, les indicateurs s’accumulent mais rien ne bouge sur le fond.
Ce que révèle l’Observatoire, c’est l’usure d’un mode de gestion autoritaire où les décisions sont prises sans les personnels, puis maquillées d’un vernis participatif. Un système où l’on consulte sans jamais vraiment tenir compte, où l’on affiche des chiffres sans jamais interroger ce qu’ils disent du vécu au travail et donc sans aucune analyse.
Alors oui, les collègues répondent. Mais ils répondent pour faire entendre ce qu’on refuse de voir : que les conditions de travail se dégradent, que les collectifs sont fragilisés, que le sens au travail se délite. La question n’est pas de savoir si les tendances sont "meilleures" mais de savoir quand la DGFiP mettra fin à cette logique de pilotage sourd et assumera enfin un véritable dialogue, une vraie politique de prévention sur la santé, la sécurité et sur l’amélioration des conditions de travail capable de transformer les conditions concrètes d’exercice des missions.