Le 6 juin dernier se tenaient à Bercy les 17èmes rencontres de la gestion publique sous l'égide de l'IGPDE . Le thème de cette réunion était : «  Quelle gouvernance de l'action publique à l'ère numérique ? »

Olivier Dussopt, secrétaire d'état auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics, a ouvert cette conférence avec un discours sur la nécessité du numérique dans l'administration, citant bien évidemment CAP 22 qui doit repenser les organismes publics. Des fois qu'on ne l'ait pas encore intégré !

Le secrétaire d'Etat a poursuivi son intervention en insistant sur la simplification et la modernisation pour répondre aux besoins des usagers, entreprises et particuliers, avec un forum de l'action publique dont le résultat est plutôt positif … Plus de 150 000 visiteurs dont plus de 5000 d'entre eux ont déposé des contributions. Une auto- satisfaction non dissimulée.

Pour Olivier Dussopt, il faut agir vite ! Mais attention, cet empressement ne détourne pas l'attention sur un public plus fragile.

Un discours qui se voulait rassurant, mais quand on connaît la réalité du terrain, rien n'est moins sûr !

Et au fil de la journée au fur et à mesure que se tenaient les ateliers et tables rondes, il n'y avait plus de quoi être sereins !

Pour le ministre, il y a une réelle volonté d'offrir aux fonctionnaires des 3 versants de la fonction publique un outil numérique performant. l'Etat a investi 700 millions d'euros dans le financement de cette modernisation et la révolution et la convergence numériques s'imposent encore plus dans le secteur des ressources humaines : chaque agent doit pouvoir avoir accès à son dossier et l'ensemble des responsables RH doit être libéré de certaines tâches chronophages. 1,5 milliards d'euros financeront cette réforme de l'Etat avec l'objectif de professionnaliser la fonction RH.

La Cheffe de projet « Digital Government and Open Data Team » auprès de l'OCDE a appelé l'attention de l'assemblée sur la confidentialité des données et la sécurité numérique du secteur public tout en soulignant que l'OCDE aide les gouvernements à pratiquer une bonne gouvernance.

Plusieurs intervenants ont fait part de leurs inquiétudes sur la gouvernance de l'algorithme, en particulier sur l'utilisation parfois abusive des systèmes prédictifs qui amènent à prendre des décisions ultérieures qui peuvent être discriminantes, parce qu'il ne faut pas oublier que derrière l'algorithme il y a de l'humain !

L'utilisation des algorithmes pour gérer l'individu n'est-elle pas dangereuse ? Le numérique nous permet de changer nos conditions de travail, de remplacer certaines tâches, mais ce devrait être pour pouvoir gagner du temps pour la rencontre et l'échange et mettre dans le tissu social autre chose que le numérique.

Ce n'est pas l'objectif de nos gouvernants qui voient dans cette perspective la possibilité de supprimer toujours plus d'emplois.

Le thème suivant portait sur l'expérience usager : connecter l'Etat et le citoyen.

D'emblée, le débat s'est orienté sur 2 échecs de la digitalisation qu'ont été France Immat et Parcours Sup. La digitalisation ne veut pas dire remplacer une zone d'accueil par un site sur lequel on perd le contact avec l'usager. L'intervenant principal, Kiane Goudarzi, professeur en sciences et gestion à l'IAE Lyon a souligné que la digitalisation posait des questions philosophiques. En effet les populations rurales et plus agées cherchent le contact humain, les populations « résistantes » ne veulent pas utiliser la numéralisation et à ces personnes-là précisemment l'administration répond : " vous êtes capables ! Allez sur internet ! "

Mais on ne peut digitaliser que si on a 2 élèments qui avancent : algorithmie et heuristique .L'enjeu n'est pas de choisir, mais de changer.

Dans cette optique d'appui à la digitalisation il a été question bien entendu des maisons de services publics. Pour nos administrations ce serait la réponse à une présence territoriale augmentée aux fins de toucher un plus large public et de sensibiliser des populations « ambivalentes ».

Le thème de l'après-midi abordait l'accompagnement dans la transformation des métiers (ou comment aider à la « mobilité forcée » des fonctionnaires (ndlr)).

La directrice adjointe des Affaires sociales de la fédération française de l'Assurance a présenté la conception et la création de la mise en place du processus de certification numérique pour l'ensemble des salariés du secteur de l'Assurance. Présenté comme une réussite, parce que la majorité des partenaires sociaux ont collaboré au projet et qu'il a été l'objet d'un dialogue social important, ce CDA atteste des compétences détenues par le salarié de l’assurance dans les domaines suivants : " l’ intégration de la numérisation des activités et les apports des outils numériques dans la pratique professionnelle " et la "maîtrise des outils du poste de travail connecté".

De quoi donner des idées à nos « managers » !

Cette journée s'est terminée avec l'intervention en plénière de la responsable de département auprès du Délégué interministériel à la Transformation publique, en charge de la performance des services publics et de la transformation numérique et managériale.

De performance et de management, il en a été question tout au long de la journée, mais il était difficile de se situer en tant qu'agent public dans ce contexte de transformation sociale avec en trame de fond la rentabilité, la coproduction du service public basée sur une relation uniquement financière public/privé.