Dans son rapport du 20 juin intitulé « La DGFiP, dix ans après la fusion, une transformation à accélérer », la Cour des comptes revient à plusieurs reprises sur le nombre d’implantations territoriales de la DGFiP. Le rapport affirme que ce réseau territorial est « dense » et qu’il n’a connu que « des évolutions limitées ». Dans ses préconisations, il souhaite le « resserrement » du réseau territorial, autrement dit l’accélération des suppressions de services locaux.

On rappellera que la DGFiP résulte de la fusion de deux directions générales (« impôts » et « comptabilité publique ») qui assuraient des missions différentes et disposaient chacune d’un réseau d’implantations qui lui était propre. Mais en 10 ans, le nombre de ces implantations a sensiblement baissé. Par ailleurs, les missions que chacune des implantations assuraient ont évolué dans le cadre de la fusion.

Le rapport se contredit de manière évidente lorsque :

  • d’une part, il constate les écarts en matière d’accueil physique, notant qu’il existe des situations « dégradées dans les territoires où résident les populations les plus fragiles » (« longues files d’attente », « délai supérieur à 3 heures », autant de constats que notre organisation dresse de longue date sans véritablement être écoutée...),
  • et d’autre part, il prône le développement du service en ligne et la réduction du nombre d’implantations, notamment du nombre de trésoreries de proximité et de services des impôts des particuliers et des entreprises (et ce, au détriment de la population et des PME).

Le rapport oublie de revenir sur certaines réalités administratives et sociologiques. Il en va ainsi du nombre et de l’implantation géographique des communes (plus de 36000 communes sur l’ensemble du territoire, soit le nombre le plus élevé en Europe¹) qui expliquent et légitiment une présence harmonieuse sur le territoire et des capacités d’accès au service public physique et numérique. En la matière, le manque de maîtrise de l’outil numérique est plus répandu que les pouvoirs publics ne veulent le croire. Il concerne notamment les populations fragiles, c’est-à-dire celles qui ont de plus en plus de difficultés à accéder aux services publics. « L’illectronisme » est développé : selon l’étude CSA, le quart des Français déclarent ne jamais se servir d’internet ou difficilement, plus de la moitié chez les plus de 70 ans. Mais en outre, les populations qui utilisent le canal numérique sont également des « utilisateurs » du canal de l’accueil physique… Cette analyse est absente du rapport.

La Cour admet qu’il y a eu une réduction du nombre d’implantations mais la minimise. Elle note qu’entre 2011 et 2016, le nombre de trésoreries a baissé de 9,1 %. Ce chiffre, déjà important puisqu’il signifie concrètement que des communes ont perdu leur trésorerie, mérite d'être précisé. En réalité, entre 2012 et 2016, le nombre de trésoreries mixtes a baissé de 20 % tandis que le nombre de trésoreries spécialisées a augmenté sous l’impact des restructurations de 6 %. Globalement, on est passé de 2 645 trésoreries (mixtes et spécialisées) en 2012 à 2 361 en 2016. Pour mémoire, on en dénombrait 4 000 en 2000…

Enfin, la Cour passe trop rapidement sur les fusions de services (qui ont explosé depuis 2014) et sur d’autres évolutions internes (la création de pôles, le regroupement de certaines missions au niveau départemental ou régional) alors que celles-ci ont des conséquences lourdes sur la qualité des missions et les conditions de travail des agents.

« Qui veut tuer son chien l’accuse d’avoir la rage » : ce vieil adage pourrait s’appliquer au rapport, en matière d’implantations ou sur les autres thèmes que notre syndicat continuera de traiter.

¹On dénombre ainsi un peu plus de 11 000 communes en Allemagne, 8 000 en Espagne et en Italie ou 9 500 en Grande Bretagne.