L’élection présidentielle a rendu son verdict. Emmanuel Macron est élu. Si les élections législatives seront décisives pour la constitution d’un gouvernement « durable », à l’heure actuelle, ce sont les orientations que M. Macron a portées durant la campagne électorale qui ont de grandes chances d’êtres mises en œuvre. Ses propositions appellent d’ores et déjà les commentaires qui suivent.
M. Macron propose l’instauration d’un prélèvement de 30 % (impôt sur le revenu et prélèvements sociaux compris) sur les revenus du capital (dividendes, placements à revenus fixes). Une telle mesure reviendrait sur l’alignement des revenus du capital sur ceux du travail. Les revenus du capital étant très concentrés sur le haut de la hiérarchie des revenus (lesquels sont imposés aux tranches supérieures du barème de l’impôt sur le revenu), une telle mesure procurerait une économie d’impôt substantielle aux contribuables concernés. Elle aura donc un coût budgétaire, non encore chiffré à ce jour et porte en outre le risque d’accroître la hausse des inégalités.
S’agissant des incitations fiscales, M. Macron souhaite maintenir celles qui sont orientées vers l’investissement en fonds propres : PEA, PEA-PME, réduction d’impôt sur le revenu liée à l’investissement dans les PME. Autrement dit, la baisse du niveau global d’imposition des revenus du capital qui serait permise par la mise en œuvre d’un taux unique à 30 %, couplée à la refonte de l’impôt de solidarité sur la fortune, n’empêchera pas la poursuite des stratégies de défiscalisation.
L’allègement de la taxe d’habitation proposé par M. Macron pourrait concerner 80 % des contribuables. Il pose plusieurs questions : la compensation qui serait versée aux collectivités sera-t-elle d’un montant équivalent ? Ne risque-t-elle pas de reprendre d’une main (via les impôts d’État notamment) ce qu’elle donne de l’autre ? Quid de la révision des bases en cours ?
M. Macron souhaite supprimer l’impôt de solidarité sur la fortune et le remplacer par un impôt sur l’immobilier. En clair, il s’agit de ne plus imposer la détention de titres et autres valeurs financières. Le rendement de ce nouvel impôt sera mécaniquement inférieur à celui de l’actuel ISF. Il enverra le dangereux signal qu’avec cette suppression et l’allègement de l’imposition des revenus du capital, une fiscalité à deux vitesses s’installe au grand profit de la « finance » : une orientation qui pose question en matière de rentrées budgétaires, dangereuse en termes de consentement à l’impôt et, au surplus, sans aucune garantie en matière de relance de l’activité économique.
Le taux de l’impôt sur les sociétés sera abaissé à 25 %. Rien n’est précisé en termes d’assiette de l’IS, déjà très étroite du fait de certaines déductions du bénéfice imposable (amortissements, provisions...) et des régimes dérogatoires. Les entreprises verraient le crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) transformé en allègement des cotisations sociales et bénéficieraient en outre de la baisse du taux de l’impôt sur les sociétés. Là aussi, le manque à gagner budgétaire risque de se traduire en baisse des dépenses publiques (donc en affaiblissement des services publics) et/ou en hausse d’autres impôts...
Le prélèvement à la source serait soumis à une phase d’expérimentation dont on ne connaît pas les contours exacts et reporté à une mise en œuvre effective au 1er janvier 2019 sans modifier la loi de Finances 2017 du précédent quinquennat. Cela reste flou pour une réelle projection !
En somme, l’orientation fiscale préconisée par le nouveau Président de la République consiste à alléger drastiquement la fiscalité pesant sur la finance, au risque d’alourdir celle d’autres « assiettes » comme l’immobilier par exemple. Ces propositions sont à mettre en parallèle avec la volonté affichée de mener des investissements publics (en matière de santé ou de transition énergétique par exemple) et de réduire la dette publique. Il est permis de se poser la question de l’efficacité et de la légitimité de ces propositions.
Communiqué de presse : Quelle fiscalité pour le quinquennat ?