Liminaire

Monsieur le Président,
Depuis plusieurs mois, la technostructure se penche avec attention sur le futur de la DGFiP à travers toute une série de rapports concernant nos missions. Le programme Action publique 2022 débouchera sur des décisions fortement (dé) structurantes pour la DGFiP. Nous ne sommes pas les seuls à le prédire, notre Directeur général ne le dément pas et notre ministre s'épanche très largement dans la presse.

La DGFiP constitue en effet pour nos responsables politiques un inépuisable réservoir de suppressions d'emplois. Là encore, nous sommes prévenus, y comprit et encore par le DG.
Ainsi, selon des sources bien informées, ce sont entre 16 et 18 000 emplois qui pourraient disparaître d'ici 2022 !
Un tabou est tombé, nos missions et leur périmètre sont sur la sellette. Aujourd’hui, plus personne ne garantit leur pérennité. Le comité CAP22 réfléchit notamment :
à la création d'agences comptables dans les collectivités dites importantes
à la fusion des SFACT (services facturiers) et des CSP (centres de services partagés), autrement dit sur la fin de la séparation de l'ordonnateur et du comptable.
à la généralisation des SFACT (services facturiers) dans la sphère territoriale,
à la centralisation du recouvrement tant de l'impôt que des cotisations sociales par un seul opérateur qui pourrait être les URSSAF.
À ce rythme, nous serons toutes et tous concernés.
Avec la réforme de la fiscalité locale, c'est peut-être la disparition de la mission foncière. D'ores et déjà, la fin annoncée de la TH, couplée avec le PAS et l'obligation totale de télédéclarer obère très sérieusement l'avenir de la gestion fiscale des particuliers et par voie de conséquence des SIP. La mission cadastrale a du plomb dans l'aile et une absorption par l'IGN ne relève pas seulement du fantasme syndical. La mission informatique, déjà gangrenée par l'intervention du privé pourrait subir une mutualisation ministérielle, voire interministérielle et le statut des personnels suivrait. Le risque d'une prise en main des Préfets sur les missions, leurs conditions d'exercice, les implantations, l'organisation structurelle et la gestion des personnels est réel. Enfin, le maillage et la présence territoriale de la DGFiP sont en perpétuelle réduction.
Pour clôturer le tout, les règles de gestion, le recrutement, les promotions internes sont passés au même tamis destructeur. C'est le sens des annonces du 1er ministre le 1er février : plan de départ volontaire, rémunération au mérite...
Pire, notre pouvoir d'achat continue de reculer, la CSG augmente, mais n'est que très partiellement compensée et le point d'indice est de nouveau gelé. Dans le même temps, nos débouchés fonctionnels s'obstruent, nos déroulements de carrière se réduisent et le jour de carence est remis en œuvre. Solidaires et l'ensemble des Syndicats de la Fonction Publique appellent à se mobiliser le jeudi 22 mars prochain pour faire entendre notre profond désaccord.
Dans le contexte actuel où la pensée ultra libérale domine, avec des conséquences irrémédiables sur l'ensemble de la société, sur nos concitoyens et plus particulièrement sur tous les services publics, notre administration devrait disposer de tous les moyens humains, législatifs et budgétaires pour redonner tout leur sens aux missions cadastrales.
Là encore, c'est tout le contraire qui est annoncé au vu des nouvelles perspectives du métier de géomètre. Alors que depuis vingt ans, la DGI puis la DGFiP n'ont eu de cesse d'éloigner les géomètres de la partie fiscale de leurs missions, l'administration opère aujourd’hui un spectaculaire revirement qui consiste à la suspension des levés du bâti en priorisant les travaux fiscaux.
Pourquoi une telle incohérence ?
Pour Solidaires Finances Publiques les missions fiscales, topographiques, foncières, ne sont pas concurrentielles et opposables. Elles sont indissociables et complémentaires. L'érosion continue des effectifs de géomètres hypothèque lourdement la force de travail pour l'ensemble de ces missions.
Nous ne pouvons pas laisser dire que la représentation du bâti sur le plan n'aurait plus d'utilité fiscale! Le cadastre est un inventaire complet des propriétés bâties et non bâties, dans leur consistance, leur évaluation et leur rattachement à un propriétaire. Les mises à jour doivent être concomitantes. La DGFIP en est responsable, comme le précise le décret de 1955.
Depuis, en contrepartie des engagements des départements sur la numérisation et la vectorisation, des conventions stipulent que les directions s'engagent à livrer annuellement aux communes un plan cadastral mis à jour et non un plan au rabais.
La suspension des travaux de levé du bâti est donc un choix incompréhensible, totalement inapproprié.
Et puis il y a la révision foncière: celle des locaux professionnels qui, au prix de conditions de travail souvent difficiles pour les agents, s'est mise en œuvre fin 2017 et celle des locaux d'habitation, plus lourde encore, qui est aujourd'hui en attente.
Enfin il y a la RPCU, qui a du mal à décoller, car l'IGN manque aussi de moyens et sollicite notre expertise afin d'améliorer le géoréférencement des plans cadastraux.
Solidaires Finances Publiques est prêt à s'inscrire dans une véritable reconstruction durable des missions foncières, mais n'acceptera jamais que ce soit par une désorganisation précipitée au détriment de la technicité et de la doctrine d'emploi des géomètres. Il faut redonner à ces derniers toute leur place en matière d'expertise, de liens avec les communes et les élus.
Ce n'est pas ce que fait la DGFIP qui navigue à vue sans perspective cohérente.
Concernant plus particulièrement l'ordre du jour de cette CAP, il y a beaucoup de sujets qui fâchent.
Tout d'abord, Solidaires Finances Publiques tient à rappeler son désaccord profond avec les décisions unilatérales du Directeur général de réduire le droit à la défense des agents, via la réduction des droits et moyens des élus. Si le temps imparti pour la consultation cette année est le même que celui de l'année dernière, il n'en demeure pas moins que ce temps est largement insuffisant pour préparer les dossiers. En effet, vous vous êtes exonérés cette année de communiquer le projet de mouvement 8 jours avant la CAP comme cela est prévu par le Règlement intérieur que vous avez vous-même imposé. Un délai restreint ne permet pas aux agents le temps de réaction nécessaire à la saisine de leurs défenseurs, surtout quand il s'agit d'une population non sédentaire qui est celle des géomètres.
Vous savez aussi ce que nous pensons des décisions du Directeur général de réformer en profondeur les règles de mutation des agents . Malgré l'habillage du discours, personne n'est dupe du fait que toutes ces mesures ne visent qu'à réduire les droits et garanties des agents pour accompagner les milliers de suppressions d'emploi annoncées à la DGFIP dans les 5 prochaines années. Dans ce contexte durci, les mutations vont être de plus en plus difficiles au détriment des conditions de vie des agents.
Déjà ce mouvement est annonciateur de l'amplification des difficultés : le déficit après mouvement du corps des géomètres et après prise en compte des suppressions d'emplois est de 74,6 soit près de 7 % des emplois implantés, ce qui constitue sans doute le record toutes catégories. Pour rappel nous avions déjà alerté l'année dernière alors que le déficit était à 56,1, ce qui était déjà considérable. Il y a deux ans, vous nous aviez annoncé un volume de recrutement conséquent lié à la pyramide des âges. Après une année à 46, la promotion des TG 66 qui s'installe n'est que de 36 stagiaires, ce qui ne comblera même pas la moitié du déficit actuel. Dans quelle situation sera le corps des géomètres dans les années à venir avec les départs à la retraite annoncés ?
Mais y aura-t-il encore des Géomètres Cadastreurs des Finances publiques, et pour quelles missions ?

Pour gérer cette situation déficitaire, la direction générale a décidé de geler des postes pour étaler la pénurie : 76 sur 49 directions, si nos comptes sont bons. Cette situation est inacceptable, car elle conduit à refuser des mutations ou des affectations à des agents qui les demandent. Les agents ne font pas du tourisme professionnel, ils ont des motifs personnels et familiaux pour solliciter ces postes. Vous le savez comme nous,les possibilités de mutations des géomètres sont compliquées vu le faible effectif et geler des postes peut reporter la mutation d'un agent pour des longues années. Cela conduit à des situations personnelles parfois très difficiles.
Par ailleurs, il ressort des documents communiqués que la population des géomètres est la seule qui ne bénéficie pas des règles communes, comme le taux de rapprochement à 50 %, ou l'application de la bonification d'un an en cas de rapprochement non satisfait.
De plus, comme nous sommes opposés au délai de séjour de 2 ans entre deux mutations, nous demandons qu'il ne s'applique pas aux géomètres, car rien n'est indiqué dans l'instruction à ce sujet.
À partir du 27 mars, commence théoriquement la consultation pour les tableaux d'avancement des géomètres. Or à ce jour, rien encore n'a été signé concernant les taux promus/promouvables. Aussi nous nous interrogeons sur la tenue de cette CAP dans ces conditions. Si cette CAP devait être reportée, nous souhaiterions que les élus en soient informés le plus rapidement possible et pas la veille pour le lendemain.
Nous profitons de cette CAP pour faire part de notre mécontentement sur la gestion de la liste complémentaire du concours de TG. En effet, à 2 jours près, quelqu'un est privé d'accéder à la carrière de géomètre suite à la renonciation d'une stagiaire prise sur la liste complémentaire du CIS. Nous souhaiterions plus d'attention de la part de la Direction générale sur ces sujets, compte tenu du faible volume de recrutement.
Nous terminerons en rappelant que Solidaires exige le recrutement à hauteur des vacances et en tenant compte des départs attendus à la retraite, gage de possibilités de mutation pour les agents.
Nous allons tenir cette CAP avec une méthode inédite que nous n'approuvons pas. Nous constaterons au moment des suites si véritablement le dialogue social et la situation des agents présentent encore un intérêt pour l'administration.