Liminaire

Monsieur le Président,

Nous ne pouvons ouvrir ce CTR sans évoquer la situation sanitaire, laquelle se dégrade et amène certaines régions à passer en zone alerte maximale et la mise en application de nouvelles mesures restrictives. Si nous savons que ce sujet fait l’objet d’audioconférence spécifique, il nous semble que la mise en application de certaines mesure telles que les aménagements d’horaires, la rotation des équipes et le télétravail doivent être favorisées tout comme la protection des personnes vulnérables en les plaçant en ASA. Il nous semble que le bon sens doit être à nouveau au cœur des prises de décisions nationales et locales pour protéger les agentes et les agents ainsi que le public…

 

De même, il est impossible de ne pas évoquer ici le projet de loi de finances pour 2021. Si le contrat d’objectifs et de moyens nous en avait déjà donné un avant-goût bien amer, il confirme nos craintes et infirme, au moins pour notre ministère, les promesses présidentielles de « jours meilleurs ».

L’action publique a révélé toute son utilité, l’argent public est plus que jamais au cœur de notre société, mais le nombre de fonctionnaires qui le gère quotidiennement diminue, encore et toujours. A la DGFiP, le monde d’après ressemble fâcheusement au monde d’avant. Au-delà des sempiternelles explications, l’obsession des pouvoirs successifs à affaiblir et déstructurer la DGFiP « coûte que coûte » vire à l’acharnement, elle en devient suspecte.

Mal aimée la DGFiP ? En toute objectivité, la question se pose. Fixons le cadre.

En 2021, le solde des créations et des suppressions d’emplois dans les services de l’État sera de -11 ETP. Un nombre certes négatif mais qui a de quoi faire rêver n’importe quel.le agent.e des finances publiques attaché.e au service public, à ses missions et ses conditions de travail. En effet notre ministère supportera 2 135 suppressions d’emplois en ETP, soit 200 de plus qu’en 2019 pour le ministère. Avec une part hélas prépondérante pour la DGFiP alors qu’elle en a pourtant supporté en 2018 et en 2019 respectivement 438 et 73 de plus que prévu. Combien de plus en 2020 et les années suivantes ? Rappelons que le contrat d’objectifs et de moyens mentionne que les chiffres annuels de suppressions d’emplois prévues pour les 3 prochaines années n’ont qu’une « valeur indicative ». Autrement dit, ce qui est prévu ne serait donc qu’un plancher.

S’agissant des emplois, ce n’est plus le Ministère des comptes publics, c’est celui du compte à rebours. Quant aux agentes et agents, leur sentiment est plus que jamais d’être les victimes d’une politique d’austérité qui vise à brader les services publics et d’une vision technocratique de ces derniers et de la gestion des personnels comme en atteste l’ordre du jour pléthorique de ce CTR.

Deux chantiers phare vont éclairer nos échanges, qui nous l’espérons seront nourris. Nous ne pouvons que l’espérer au regard de votre communication de la semaine dernière laquelle rend septique sur la qualité du dialogue social et le rôle que vous accordez aux représentants élus des personnels que nous sommes ! Nous nous expliquons, si votre communication bien naturellement s’est d’abord tournée vers les agents sur Ulysse, nous ne jugerons de sa teneur, quoique ! Considérant que ce ne soit ni le lieu ni le moment, elle s’est ensuite très promptement dirigée hors de la DGFiP vers acteurs publics avant de considérer les OS que nous sommes ici présentes. Il eut été de bon aloi que cette communication attende la fin de ce CTR dans la mesure où nous sommes enclins à débattre des sujets déflorés dans l’article. Ceci questionne doublement sur la valeur donnée par l’administration à cette instance et sur le sens donné au dialogue social. Nous ne reviendrons pas ici sur les propositions émanant de certain·e·s d’entre nous lors du CTR de l’été dans lequel nous avons émis plusieurs propositions novatrices en termes d’exercice du dialogue social. Mais nous tenons à vous rappeler, que nous sommes ici, des représentants du personnel, qu’au quotidien, comme cela a été démontré durant le confinement, le lien entre vous et nous est nécessaire et souhaitable pour le bon fonctionnement de la maison DGFiP. Maltraiter le dialogue social c’est donc maltraiter les agentes et les agents ! Mépriser l’intelligence du dialogue social c’est ignorer le sens de l’histoire. Mais l’histoire nous sommes en capacité de l’écrire, ensemble par le dialogue et l’écoute des revendications des personnels. C’est votre défi, Solidaires Finances Publiques continuera de vous faire la démonstration que votre projet n’est pas celui attendu par la population et par les personnels. Nous mettrons en relief les incohérences et les dangers que portent le NRP, la demetropolisation renommée relocalisation...l’approche réductrice des LDG.

Notre journée sera donc pimentée de débats, commençons par celui sur les lignes directrices de gestion que nous développerons au moment de l’examen de la fiche de travail. Avant cela quelques remarques :

I. LDG

La mise en œuvre des lignes directrices de gestion relatives à la mobilité découle de la loi n°2019-828 du 6 août 2019 relative à la transformation de la fonction publique. Concernant la mobilité mais aussi pour la promotion des agents, c'est purement et simplement la suppression de la compétence de la CAP pour ces actes de gestions.
Pour notre organisation syndicale, c'est un recul inacceptable pour la défense individuelle et collective des agents pour les actes de mobilité.

Nous estimons par ailleurs important de rappeler les principes fondamentaux de notre organisation en matière de mobilité. Pour Solidaires Finances Publiques le mouvement général du 1er septembre doit permettre une affectation nationale la plus fine possible (commune – mission/structure) sur la base de l’ancienneté administrative. Ce mouvement général doit inclure les mutations des titulaires ainsi que l’intégralité des demandes de premières affectations interclassées à l’ancienneté administrative reconstituée. Nous sommes opposés à tout délai de séjour ainsi qu’à tout recrutement basé sur le choix et le profil. Mais les règles de l’administration pour les personnels de la DGFiP s’éloignent chaque année des règles voulues et demandées par notre organisation syndicale.
Nous rappelons également que les règles permettent seulement de départager entre elles les différentes candidatures mais que la mobilité dépend uniquement du nombre de postes offerts sur chacun des départements. Pour les titulaires, chaque agent qui change de département libère une possibilité de plus au sein de son département de départ. Le « choc démographique » que va subir notre administration avec un nombre très conséquent de départs à la retraite représente une occasion rêvée pour l’administration de répondre pleinement aux aspirations de mobilité choisie de très nombreux collègues. Ce qui, mécaniquement, diminuerait le nombre d’agents insatisfaits, susceptibles de formuler un recours.
Ce rappel étant effectué, et pour rentrer plus en détail dans les LDG directionnelles, nous rappelons solennellement qu’attribuer une priorité ou critère subsidiaire à un collègue a une incidence bien évidemment pour le collègue concerné mais également un impact pour les autres collègues qui sollicitent le même département. Il est donc important donc que toutes les priorités mises en œuvre soient bien acceptées et intégrées par la communauté DGFiP. Nous développerons plus en détail dans le cadre de l’examen du point à l’ordre du jour.

II. Démétropolisation :

Après des mois de silence assourdissant, quelques voiles sont levés pour les agent.es. Mais le sujet brûlant des emplois, où quand et qui, relèvent encore du sceau du secret ou de l’inavoué, ce qui plonge le collectif DGFiP dans une attente anxiogène.
La démétropolisation se découvre sous un tout autre visage : celui d’un NRP national.
Au fil des jours et des communications, se dessine une restructuration majeure qui recompose le maillage, les structures, les emplois.
La démétropolisation n’affiche plus le visage qui était le sien en juin 2019, les mois passant ont généré une ambition quelque peu mortifère pour notre administration et ce ne sont ni le Contrat d’Objectifs et de Moyens ni le rapport d’activité qui rassureront les premiers de corvées de notre administration, elles et eux aussi sacrifié.es sur l’autel de la rentabilité et la gestion administratives. Le monde d’après a cela de singulier il est, en pire, le Monde d’avant en pire. Et pourtant, nous avons de ce côté de la table des idéaux, des valeurs et des réflexions qui pourraient transcender ce monde d’après !
Si le principe du transfert de 2 500 emplois de la DGFiP des métropoles vers les villes moyennes ou petites, demeure, les nouvelles modalités sont radicalement différentes, voire opposées à celles d'abord envisagées par le Ministre, et clamées lors d’une interview, un dimanche ...dans laquelle les fonctionnaires de Bercy, s’entendant administration centrale, allaient se verduriser. Vision de l’administration au demeurant un peu brutale et caricaturale ! Aujourd’hui aucun service exerçant des missions d’administration centrale n'est concerné, la contribution reposant intégralement sur les services déconcentrés des DDFiP-DRFiP .
Par ailleurs, la seule délocalisation de services complets réalisant exclusivement des missions de back-office, sans contact physique avec les usager·es, s'est avérée insuffisante pour satisfaire l'objectif quantitatif de la mesure.
Au-delà de certains services bancaires, de gestion des retraites et des payes des fonctionnaires implantés dans les métropoles qui seront intégralement délocalisés, ce sont également des missions ou des tâches relevant pleinement des chaînes de travail et du service public de proximité qui sont artificiellement extirpées de services qui demeureront donc, pour partie, toujours localisés dans les métropoles. Il en va notamment ainsi pour les SIE, les SIP, les SPF, SPFE, SDE, les PCRP...
Ainsi seront créés des services à compétence supra-départementale ou nationale, qui viendront en appui ponctuel ou exerceront certaines missions en lieu et place de services de proximité (de gestion ou de contrôle) au-delà du périmètre des métropoles.
Les implications de ces restructurations sont lourdes de conséquences tant pour l'exercice des missions que pour l'ensemble des agentes et des agents.
Monsieur le Président, quand dans votre communication, vous présentiez la démétropolisation comme une relocalisation fondée sur des nouvelles organisations de services et s'appuyant sur un savoir-faire éprouvé, le sentiment, au-delà du fait que vous vous trompiez, est celui que vous nous trompez !
Il ne s'agit nullement de relocalisations mais bien de délocalisations puisque les services concernés n'ont jamais été localisés dans les villes d'accueil. Délocalisation et non relocalisation puisque le service rendu ne bénéficiera en rien à la population locale.
Il ne s'agit ensuite pas d'une nouvelle organisation de service mais malheureusement de la poursuite de la distinction de l'accueil et de la gestion, de l'atomisation, de la parcellisation et de l'industrialisation des chaînes de travail, confirmant la rupture du lien pourtant indissociable entre le service public et son territoire. Ce processus déprécie la qualité du service rendu à l'usager·e, altère sensiblement l'intérêt du travail et in fine les conditions de travail des agent·es.
Enfin le savoir faire éprouvé de la DGFiP laisse songeur quand on pense à la constitution des centres de contact et des Centres de Services de Ressources Humaines (CSRH) pour ne prendre que deux exemples récents. L’inorganisation de l'articulation entre ces services et les SIP pour les premiers, les services RH pour les seconds, conduit encore aujourd'hui à de nombreuses difficultés pour l'ensemble des collègues et globalement à une dégradation du service de proximité rendu à l'usager. nous demeurons attachés à la présence, sur l'ensemble du territoire, d'un service public de proximité de qualité, seul à même de véritablement répondre aux besoins de la population.
Ce ne sont donc pas les seul·es agent·es qui exercent les missions délocalisées qui seront impacté·es par la démétropolisation mais l'ensemble des agentes et des agents qui exercent les missions concernées par la supradépartementalisation, les pôles nationaux d'appui ou de gestion et les usager·es…

La démétropolisation révèle désormais ses caractéristiques intrinsèques : éloignement, concentration, parcellisation, ultra-spécialisation, standardisation des tâches… Une taylorisation du service public qui ne dit pas son nom mais dont nous connaissons les effets délétères qu'elle produit sur la qualité du service rendu et sur les salarié·es qui la subissent… Une réforme supplémentaire qui s'inscrit dans une pseudo modernité déjà totalement dépassée…Cette démarchée liée au chantier des LDG ne sont en rien des remparts pour les agents, leurs droits leurs garanties et nos missions ainsi qu’à la qualité du service public rendu. Nous y reviendrons lors de nos interventions.

Enfin, si nous ajoutons à cela, le reste des points qui seront soumis à avis ou pour information lors de notre instance relatifs aux sphères « plus spécialisées » de notre administration, nous ne pouvons que conclure que contrairement à la communication « édulcorée » de la technostructure de Bercy, la DGFiP est à l’aube d’un danger mortel. En effet par vos réformes (démétropolisation, NRP, …) conjuguées à la force des mesures attentatoires aux droits et garanties des agent.es portées par la loi de transformation de la fonction publique, vous organisez de façon méthodique le délitement de notre administration. Et pourtant, l’appel républicain qui monte de l’opinion publique, qui fait écho à l’expression du suffrage universel (réf aux municipales) démontre une toute autre attente de nos concitoyens. Ils veulent plus de service publics, une autre ambition au service d’un État social, juste et Solidaires ! La DGFiP ne peut être en dehors de cette ambition car de par ses missions, fiscales, de dépenses publiques elle est au cœur du pacte républicain. Mais ce pacte républicain en êtes vous vraiment le garant ? Pour notre part, nous serons toujours au côté d’une vision juste et sociale de la société, et donc nous nous opposerons par nos propositions, nos revendications, nos actions, à celles et ceux qui privilégient l’opportunisme technocratique à l’intérêt supérieur de la nation et de la DGFiP.
C’est pourquoi Solidaires Finances Publiques dénonce la démagogie qui a présidé à cette nouvelle restructuration et qui va conduire, une fois de plus, à accentuer l'éloignement du service public de l'usager, à l'atomisation des missions au détriment de la qualité du service public et des conditions de travail des agent·es.