La DG a publié le 10 décembre dernier une note de cadrage portant sur les modalités de l’accueil des usagers dans notre administration. Cette note prend le relais des publications précédentes qui dataient de 2014 et 2019, et couvre l’ensemble des modalités d’accueil existantes (plates-formes téléphoniques, internet). Elle a vocation à souligner les grands principes en matière de réception du public et à donner un « cadrage » national aux directions locales.

Dans ce document, la Direction générale veut réaffirmer l’existence d’une vraie culture de l’accueil, une plus grande proximité avec les usagers, une meilleurs efficacité du service rendu aux usagers avec en parallèle la mise en place d’un dispositif de formation adéquat et une reconnaissance renforcée des agents d’accueil.

 « Les promesses ne sont que des mots en l'air, et le vent s'occupe de les souffler. »

Sur le fond, nous partageons très largement ces principes. Mais malheureusement ces grandes -et belles- idées se heurtent à la réalité de la faiblesse des moyens mis en place qui vont clairement à l’opposé des objectifs recherchés. En effet, pour nous, la note de la DG est avant tout un exercice de style, certes volontariste, mais qui va dans un sens contraire à la volonté affichée qui est toujours la présence d’une offre multicanale.

En effet si celle-ci est officiellement réaffirmée, un bémol est vite porté sur le fait que l’accueil physique doit être recentré sur les usagers qui en ont « réellement » besoin… On peut s’ interroger sur ce que recouvre le mot réellement pour la Direction générale. En réalité, à quel niveau se situe ce curseur ? Pour nous, filtrer les usagers en fonction d’un concept aussi flou est contraire au principe d’accessibilité et de liberté à l’information dont doivent bénéficier l’ensemble des contribuables.

L’objectif affiché et assumé est donc de pousser au maximum les contribuables vers les démarches en ligne et de limiter le plus possible l’accueil direct. Pour ce faire, une place prépondérante, voire prééminente, est donnée au site internet Impots.gouv.fr, et à l’espace numérique sécurisé (ENSU). A cette fin, l’administration prévoit de mettre à disposition un maximum d’applications et tous les formulaires ou imprimés dont ils auraient besoin. En parallèle, une publicité forte est faite sur l’espace sécurisé qui permet de prendre un rendez-vous et de consulter les horaires d’ouvertures des services.

Cet objectif passe aussi pour la Direction Générale par une « multiplication » des lieux d’accueils, par une augmentation de l’offre téléphonique, et par des innovations et améliorations informatiques : 

  • Sur « l’augmentation » des lieux d’accueils, la DG remet pêle-mêle sur le tapis à la fois son nouveau réseau de proximité, les FS (France Services), son partenariat avec les buralistes, les permanences dans les mairies...
  • Sur les accueils physiques, la DG envisage une modernisation de l’ergonomie des espaces réservés aux usagers afin de prendre en compte la généralisation de l’accueil sur rendez-vous et de l’accompagnement aux numériques. Des consignes à venir seront données aux Directions territoriales afin de normer l’aménagement des accueils existants et la rénovation de certaines CFP.
  • L’amélioration de l’offre téléphonique va reposer essentiellement sur les centres de contact (CC). Ainsi, la DG va continuer à accroître le nombre de CC avec la création d’ici à 2024 de 5 sites supplémentaires : Charleville-Mézières, Angoulême, Nevers, Lens, Vesoul. Ce sont ainsi près de 20 centres de contact qui seront opérationnels en 2024. Ces centres couvrent d’ores et déjà la France entière (y compris l’Outre-Mer) sur des plages horaires étendues (8h30-19h). En parallèle, la DGFiP veut accroître la capacité de réponses des services locaux. Un renfort pourra être fait entre agents des DRFiP/DDFiP et les CC si besoin.

  • Du côté des applications informatiques et du numérique, plusieurs aspects de l’application e-contact seront améliorés en 2021 comme la capacité à gérer de gros volumes de courriels, et des possibilités de tri sélectif plus efficace sans oublier l’amélioration du suivi statistique. Un chatbot (assistant virtuel) va être déployé à compter de la campagne déclarative 2021 permettant d’apporter à l’usager des réponses simples et il pourra également proposer aux agents des réponses types pour faciliter les traitements des courriels.

La « déclinaison opérationnelle » de cette mise en place va s’appuyer sur le nouveau référentiel de qualité des services publics « services publics + » qui reposent sur plusieurs engagements comme la bienveillance et le droit à l’erreur ou l’écoresponsabilité. Étant donné que l’administration précise qu’elle veille à adapter constamment son offre de service en fonction des attentes exprimées par les usagers… (sic)

Sur les modalités d’application au niveau local, une TRÈS grande souplesse est donnée aux directions locales en la matière, l’argument de la Direction générale étant qu’il est nécessaire que chaque direction soit dotée d’une marge de manœuvre suffisante pour répondre aux besoins des usagers. Dans le respect de ce cadrage, il est précisé que les directions locales peuvent s’organiser comme elles le souhaitent à condition que la prise en compte des attentes des usagers soit respectée…

- À la vue de ce principe, peu ou pas d’ élément contraignant : le volume d’ouverture hebdomadaire est ramené de 24 à 20 h pour les services situés dans des communes de plus de 10 000 habitants. Il demeure fixé à 16 h pour les communes de moins de 10 000 habitants. Des dérogations sont prévues lors des campagnes déclaratives ou avis.

- La quote-part d’ouverture des guichets exclusivement sur RDV doit représenter au moins 50 % du temps d’ouverture hebdomadaire hors cas particulier comme les SIE.

- Les horaires d’ouvertures des guichets peuvent être regroupés sur les seules matinées, les après-midis étant consacrés aux réponses courriels et RDV téléphoniques.

- Le décroché téléphonique doit être assuré tous les jours avec une durée minimale de 30 h par semaine, et le délai de réponse des courriels ne doit pas excéder une semaine.

Cette note confirme donc les craintes que porte Solidaires Finances Publiques depuis plusieurs années, à savoir la mise en place d’un accueil essentiellement dématérialisé dans notre administration, et une liberté toujours plus grande laissée aux directions locales sur ce sujet. Bien évidemment, nous réaffirmons encore une fois que cette vision étriquée et sans ambition n’est pas la nôtre. Solidaires Finances Publiques condamne sans réserve une telle organisation et combattra cette vision réductrice qui est pour nous fortement porteuse d’inégalités tant au niveau humain que géographique.

Pour nous, la future contrainte de recourir aux démarches en ligne ou téléphoniques va fragiliser une part importante de la population qui peut être amenée à renoncer à l'exercice de ses droits, face à la complexité des procédures. Lors du dernier GT accueil, nous avions porté une vraie ambition en ce domaine : l’administration ne doit ni contraindre ni obliger un contribuable à utiliser un mode de contact spécifique, mais doit faire en sorte que ce dernier puisse avoir librement et sans ambiguïté le choix de son mode de communication avec nos services. Si l’accueil sur rendez-vous peut être utile dans certaines situations très spécifiques (ce qui a d’ailleurs toujours existé dans notre administration), nous sommes et restons fermement opposés à sa généralisation obligatoire, surtout à marche forcée, comme c’est le cas actuellement.

De plus, le nouveau réseau de proximité et la relocalisation, ainsi que les réformes organisationnelles de notre réseau impactent fortement l’accueil au sens large. La création de 30 % de points contact supplémentaires vendus par l’administration auprès des collectivités locales, et la relocalisation de certains services à compétence nationale ou supra départementale tels que les centres de contact, notamment dédiés aux professionnels, ne sont pas les bonnes réponses aux attentes des contribuables particuliers et professionnels. Ceci n’est qu’illusion. Sur la reconnaissance et la valorisation des métiers de l’accueil, nous attendons toujours un acte fort et volontariste de l’administration.

Ainsi la proposition portée lors du dernier GT indemnitaire par Solidaires Finances Publiques de remplacer la prime accueil par l’ACF assistance aux usagers (1 100 euros brut annuels) a été balayée d’un revers de main par l’administration. Comment faire croire, dans ce cas, qu’on place l’accueil au centre des préoccupations de la DGFiP, quand rien n’est fait tant au niveau des agents que des contribuables pour favoriser un vrai accueil de proximité et technicien ? Une nouvelle fois, l’accueil dans notre administration va être sacrifié sur l’autel des économies et du dogmatisme politique et idéologique. Solidaires Finances Publiques continuera à dénoncer cet état de fait et combattra cette politique du moins-disant, ceci par tous les moyens possibles. Pour Solidaires Finances Publiques, la mission mérite mieux, les usagers méritent mieux, les personnels méritent bien plus.