Ce dernier comité technique de l'année pourrait facilement être rebaptisé Bilan statistique de la politique sociale de la DGFiP, puisque les deux points à l'ordre du jour ont trait au bilan social de la DGFiP et à celui, toujours très attendu, de la formation professionnelle. Nous interviendrons, et sans doute assez longuement, sur ces deux points. Nous regrettons cependant que l'examen du baromètre social ne soit pas également posé à l'ordre du jour de ce CTR.
Liminaire
En préalable nous tenons à signaler que la durée prévisible de cette séance ne peut constituer pour Solidaires Finances Publiques, un frein, voire une entrave, à l'expression des représentants des personnels (que nous sommes). En clair, nous demandons et ce, dans un délai raisonnable, un nouveau rendez-vous sous format CTR, dans l'hypothèse où nous ne pourrions pas terminer l'examen de ces deux points inscrits à l'ordre du jour.
Si nous vous alertons d'emblée à ce propos, c'est bien aussi, qu’au-delà de ces deux points, la période et le contexte nous conduisent à devoir aborder dans le cadre de cette présente liminaire des sujets et des questions qui ne relèvent pas forcément de l'exercice du bilan et qui attendent, cela va de soi, des réponses.
Venons-en donc au contexte. Rassurez-vous, nous n'entrerons pas ici dans une critique exhaustive de la politique actuelle notamment sur le plan économique, budgétaire et social, car cela pourrait conduire à minimiser certaines parts de responsabilité revenant à la haute administration.
Nous sommes bien loin du temps, où certains hauts fonctionnaires voyaient en l'administration un laboratoire social. Désormais, vous renvoyez les partenaires sociaux au respect aveugle des décisions du parlement, des orientations du gouvernement. Nous n'aurions pas d'autre alternative que de subir et de nous adapter à des réductions sans fin des moyens et des ambitions du service du public. Pire, certains acteurs de la haute fonction publique semblent vouloir aller au-delà de ce qui pourrait être pensé par les plus libéraux des lobbyistes, qui n'ont pour objectif que de tout marchandiser, y compris le service public. Ainsi, tous s'engagent dans des réflexions qui à court terme, viseront à privatiser à tour de bras avant même que la commission Cap 22 ne rendent ses conclusions. A la DGFiP, vous anticipez même certaines préconisations structurelles de la Cour des comptes, alors que souvent vous semblez vouloir afficher une distance notable avec la Cour.
En cette fin d'année, nous ne pouvons que faire le constat d'un dialogue social réduit à un alibi pour l'ex-parité administrative, qui ne le conçoit que comme un faire-valoir ou à défaut un passage obligé.
Alors qu'attendons-nous de nos « directeurs d'administration centrale » ? Qu'ils Refusent, comme le directeur du CEREMA, d'être complice de la destruction de la DGFiP ? Qu'ils s'opposent, comme l'ancien chef d’État-major des Armées, aux restrictions budgétaires ? Plus simple et moins téméraire ; qu'ils informent en amont de leurs décisions, de leurs choix et qu'ils les mettent en débat dans ce type d'instance. Nous appelons de nos vœux que vous renonciez à faire entrer le loup du privé dans la bergerie du service public. A la DGFiP, cela concerne d'abord l'accueil téléphonique des usagers particuliers, la privatisation rampante de la gestion publique, mais également les services informatiques !
Alors que nous sommes à une croisée des chemins, l'administration pourrait aussi tenir compte des remarques de la Cour des comptes et du Sénat, à savoir mieux mesurer et analyser l’impact prévisionnel des nouvelles technologies en termes d’économies, d’emplois et d’évolution des compétences des agents.
Plus que jamais, il serait nécessaire de présenter une organisation territoriale cible, adaptée aux besoins des usagers notamment en termes de proximité, plutôt que de laisser les directeurs locaux restructurer à grand coup d'opportunités, sans vision sur les moyens.
La prise en compte des zones mal desservies et l’accompagnement des populations qui n’ont pas accès (pour diverses raisons) aux nouvelles technologies, nous semblent devoir être une priorité dans le cadre des politiques de solidarités sociales et territoriales, notamment à travers l’élaboration, par les conseils départementaux et l’État, du schéma départemental d’amélioration de l’accessibilité des services au public (SDAASP) prévu en application de l’article 98 de la loi NOTRé du 7 août 2015.
En clair et en résumé, l'intérêt supérieur de la DGFiP voudrait que vous répondiez enfin et concrètement à nos demandes récurrentes sur la gestion des ASR, sur la mesure des impacts multiformes de la digitalisation, sur la mise en place d'un moratoire sur les restructurations. Cet intérêt voudrait également que vous abordiez autrement les questions du dialogue social, de l'amélioration des conditions de travail, des conditions de vie des personnels !
Parler du dialogue social, des conditions de vie et de travail, nous amène à la seconde partie de notre propos liminaire,
le bilan de la formation
Ce bilan 2016 de la formation est plus complet que ceux présentés les années précédentes. Il intègre certaines de nos demandes de précision et nous vous en remercions. Néanmoins, il présente une particularité troublante. Dans certains cas ce bilan est purement statistique évacuant l'analyse factuelle. Dans d'autre cas, l'aspect statistique est réduit à une simple information, complétée de commentaires d'une objectivité toute relative.
Pour Solidaires Finances Publiques, l'intérêt d'un bilan de la formation, qui par ailleurs est assez indissociable du bilan social, est de poser les termes du dialogue social sur la base de données pouvant être considérées comme un point d'ancrage partagé. La logique voudrait que toutes les parties prenantes au débat en retirent un éclairage instructif, leur permettant de jeter les bases d'une concertation sur les politiques à mener notamment en matière d'offre, d'accès à la formation et de moyens.
Or par le passé, tel n'a pas été le cas compte tenu notamment d'un examen trop rapide des éléments du bilan de la formation, car noyé dans d'autres thématiques et, du fait que celui-ci ne faisait état que de données partielles.
L'exercice du dialogue social est d'autant plus compliqué qu'il n'y a pas de groupe de travail préparatoire à l'examen de ce bilan. Groupe de travail qui pourrait s'appuyer sur des données plus exhaustives. C'est pourquoi, nous vous demandons pour le bilan 2017 et suivants, de réunir un GT préparatoire au CTR Bilan avec en documents de travail, l'intégralité des évaluations à chaud et à froid, les comptes rendus de conseil de promotion, les divers rapports DGFiP ayant pu être produits sur ces sujets, une synthèse des actions locales de formation organisées sur l'ensemble du territoire, un examen des fiches de signalement entourant les opérations de recrutement, etc.
Soyons clairs, le manque d'échange sur des éléments tangibles des différents bilans mais également sur les expressions portées par une majorité d'agents, pose un réel sujet de démocratie sociale. Il en est de même de vos revirements d'analyse au regard des données statistiques. Les mêmes données peuvent dans un premier temps nous être opposées car, elles constitueraient la clé de l'objectivité, et dans un second temps vous les marginalisez au profit d'arguments subjectifs et factuels.
Votre projet de réforme sur « la formation de demain » illustre parfaitement ce déficit de démocratie sociale mais également votre mécanique de construction d'une décision. Outre qu'elle fait abstraction des revendications des agents, elle instrumentalise les éléments de bilan objectif. Mais nous y reviendrons au cours de ce CTR.
Lors d'échanges bilatéraux avec toutes les OS, les services de la Direction Générale ont évoqué des éléments de contexte extérieurs qui obligeraient la DGFIP à se réformer, à renouveler son schéma de pensée. Mais là encore, votre approche est à géométrie variable, anticipant notamment sur des évolutions, qui pour l'instant ne sont le fait que de préconisations issues de divers rapports commandés notamment sous le gouvernement précédent. Dans les deux cas, vos décisions sont rarement favorables aux agents.
Par ailleurs vous laissez perdurer des disparités importantes dans les recrutements d'agent(e)s Pacte et de personnes en situation de handicap. Sur toutes ces questions, vos pratiques font le nid de l'arbitraire et de la discrimination, et ce ne sont pas les quelques classes préparatoires intégrées (CPI) qui permettent de corriger cette dérive, car en nombre trop restreint.
Nous imaginons déjà que pour tenter d'atténuer ce grief, oh combien fondé, vous allez sûrement faire état de l'engagement de la DGFiP dans la politique de lutte contre le chômage et de la précarité chez les jeunes, en vous appuyant sur votre bilan en matière d'accueil d'apprentis et de service civique. Sur ce point, nous ne vous donnerons pas de quitus, bien au contraire. Sur l'apprentissage, votre approche demeure très opaque et semble nourrir là encore bien des disparités. Concernant le service civique, nous sommes en présence d'une escroquerie sociale manifeste. Malgré le cadrage précis de l'agence du service civique, malgré des notes qui laissent entendre que la DGFiP s'inscrit dans ce cadrage, sur le terrain, la majorité des services civiques sont utilisés comme des emplois d'auxiliaires. Pire, certains se sont vus attribuer des habilitations plus larges que celles d'agents C. Ces dérives vous les connaissez et vous ne recadrez les directions que lorsque le sujet devient source de conflit ! De fait, vous êtes bien dans une approche utilitariste et dévoyée du service civique ! Solidaires Finances Publiques demande que deux groupes de travail soient réunis sans délais pour examiner toutes les pistes permettant de corriger toutes les dérives existantes. Il est par ailleurs indispensable de revoir la volumétrie de ces accueils qui, compte tenu de la situation des effectifs à la DGFiP, ne peuvent être accompagnés dans des conditions satisfaisantes.
Par le passé, le Directeur Général s'était dit prêt à ouvrir le débat de l'expertise. Finalement, ce débat nous ne l'avons jamais eu, mais cela ne vous a pas empêché d'en redéfinir les contours. Ainsi, vous vous employez à réduire la dimension d'expertise à une approche micro fonctionnelle, purement tayloriste. Comme jamais, vos orientations mettent à mal la fonction publique de carrière à la DGFiP au détriment de la fonction publique d'emplois !
Ce qui nous amène à exprimer de vives réserves sur les actions menées actuellement en matière de formation en cours de carrière. Si les évaluations sont satisfaisantes, démontrant la qualité du travail réalisé par les équipes pédagogiques nationales et locales, elles masquent un déficit criant d'accompagnement et de professionnalisation des parcours. Et ce n'est pas l'e-formation qui permet de suppléer à cela car, elle est loin de remporter le succès que vous lui prêtez.
Autre constat, le recensement des besoins de formation sont loin d'être tous satisfaits et lorsqu'ils le sont, ce n'est que partiellement. Pour nos collègues en changement de fonction, la formation dispensée est très en deçà de leurs attentes et pour beaucoup, elle ne tient pas compte des pré requis élémentaires. Pour Solidaires Finances Publiques, c'est toute l'architecture de la formation cours de carrière qu'il faut repenser. Nous le disons ici avec force, en aucun cas, le compte personnel de formation, ne peut être la réponse à l'accompagnement des agents de la DGFiP dans leurs mobilités géographiques et fonctionnelles.
Pour Solidaires Finances Publiques, la formation doit être au cœur du projet DGFiP, car il s'agit là d'un investissement fondamental dans l'avenir et pour l'avenir. Dès lors, l'accès à la formation doit être garanti et facilité. Pour cela, il faut rehausser le montant des indemnités permettant de couvrir les frais de mission et revaloriser les indemnités de scolarité.
Il est également indispensable que l'ENFiP soit renforcée dans sa dimension d'acteur 1er de la formation. Bien entendu, cela ne sera possible que si elle est à l'écoute de ses forces vives représentées notamment par les chargés d'enseignements et les permanents pédagogiques.
Venons en maintenant au bilan social relatif à l'année 2016.
Nous notons une amélioration quant à la complétude des données fournies avec enfin l'apparition d'un chapitre rémunération qui était absent du premier bilan social DGFiP 2015.
Pour autant, des indicateurs sont toujours manquants dans ce bilan. Par ailleurs, malgré des engagements répétés en CTR, nous n'avons jamais été destinataires d'une version complétée du dit bilan. Ce déficit de transparence est regrettable car outre le non-respect caractérisé des exigences réglementaires, il prive la communauté DGFiP d'une possibilité de suivi dans la durée de nombre d'éléments.
Toujours sur la forme, il est également regrettable que les chiffres et pourcentages apparaissent quasi-systématiquement sans la moindre contextualisation : les données DGFiP de l'année précédente (bilan social 2015) ne sont pas rapportées, la mise en regard des éléments DGFiP avec ceux du bilan social des ministères économiques et financiers est également absente, quant à une mise en perspective au regard des données fournies par le rapport annuel sur l’État de la Fonction publique, cela tient du doux rêve.
Bref, il semble que la Direction générale ait fait le choix du service minimum, avec une méthode expurgeant tout élément de contexte ou de comparaison, ce qui est pour le moins paradoxal au regard des pratiques habituelles en matière de rapport d'audit ou d'analyse financière… En clair, lorsqu'il s'agit de débattre avec les représentants du personnel vous aseptisez les données. Lorsqu'il s'agit d'outils internes, vous exigez des agents une rigueur d'une toute autre ampleur.
À titre d'exemple, et nous vous l'avions déjà fait remarquer dans le courrier que nous vous avions adressé le 28 novembre 2016, le bilan social du ministère de la défense est nettement plus complet. De même, et pour rester dans ce qui est comparable, celui de la seule Gendarmerie nationale avec plus de 150 pages offre lui, des données comparées dans le temps et mises en perspective.
Nous ne doutons pas, pour notre part, que la DGFiP soit capable d'élaborer un bilan social de ce niveau qualitatif pour peu qu'elle le souhaite...
Dans l'avant-propos de ce bilan social, vous qualifiez ce panorama chiffré de la situation sociale de la DGFiP, de « véritable outil du pilotage des ressources humaines ». Au regard de l'absence criante de commentaires tant analytiques que prospectifs, vous nous permettrez de considérer cette annonce comme bien présomptueuse. A moins que la politique de gestion des personnels ne soit pour vous que l'objet d'une gouvernance purement budgétaire et comptable ? Sur ce point, vous connaissez nos positions face à vos attaques sans précédent contre les règles de gestion et les droits des agents en terme de mobilité choisie. Nous ne le développerons pas ici, excepté le fait, que sur ce point encore, vous avez choisi d'avancer masqué. Pour preuve le rajout, en catimini, dans les projets d'instructions mutations 2018, d'une approche restrictive de l'examen des recours en CAP : «les agents mutés au projet de mouvement ne verront donc pas leur demande réexaminée dans le cadre de la CAPN pour satisfaire un vœu mieux placé ». Pour Solidaires Finances Publiques, cette approche est une remise en cause du rôle de la CAP, une réduction du champ de la défense des droits des agentes et des agents et notamment de l'ensemble des collègues en situation de première affectation (stagiaire, CIS ou liste d'aptitude). Nous demandons le retrait pur et simple de cette restriction.
Au final, au cours de ce CTR, les chiffres ne manqueront certes pas, mais où sera le social ? Dans la gouvernance de la DGFiP où est l'humain dans un tel bilan statistique ? Quelles analyses faites-vous de vos propres choix au regard des effectifs, de la carrière, de la rémunération, des mutations, des promotions, de l'égalité homme/femme, de l'action sociale, de la formation, etc ? Vaste sujet de débat !
Pour Solidaires Finances Publiques, ce bilan social est donc très loin d'être satisfaisant et il n'apportera que peu d'éclairage à ses lecteurs. Tous ces manques mettent en exergue le malaise de la Direction générale à commenter une politique ouvertement anti-sociale et contraire à l'intérêt des Agent(e)s depuis un moment, et en particulier au cours de ces 2 dernières années.
Qu'il s'agisse de ces deux documents, mais surtout des politiques sociales menées, nous vous invitons a réviser fortement et dans le sens de l'intérêt des agents les orientations néfastes prises jusqu’à alors.
En conclusion, pour Solidaires Finances Publiques, le bilan de la politique sociale à la DGFiP est pour le moins très inquiétant et le dernier baromètre social nous conforte dans cette certitude.