SOLIDAIRES FINANCES PUBLIQUES

Un GT moyens de paiement s'est tenu le 17 novembre.

Déclaration liminaire

Moyens de paiement : le grand retour en arrière !

Les documents du groupe de travail « stratégie en matière de moyens de paiement à la DGFIP pourrait se résumer en deux points : dématérialisation la plus poussée et entrave à l’usage des chèques.

 

Une approche exclusivement budgétaire au détriment des usagers

La volonté de restreindre l’utilisation du chèque est une décision politique, exclusivement motivée par une volonté d’économies budgétaires. Elle poursuit un objectif de rentabilité immédiate, sans soucis des territoires et de nos différentes missions.

Solidaires Finances Publiques réaffirme son attachement viscéral à un service public universel.

Il est curieux que personne à la DGFiP n’ait objecté à la ministre que la fin du paiement de proximité chez les buralistes et la réinternalisation des flux d’encaissements et de décaissements des régies rapporterait quasiment autant, au moins 30 millions d’euros, sans constituer une contrainte pour les usagers, voire une amélioration du service rendu aux régisseurs.

La restriction du recours aux chèques vise à rendre ce moyen de paiement plus difficile parce que l’interdiction du recours à ce moyen de paiement légal est inacceptable socialement pour une très grande partie de la population, surtout quand on lui interdit par ailleurs l’usage du numéraire.
Or, dans les pays où le chèque n’existe pas, l’usage du numéraire, y compris pour les fortes sommes, y est très répandu.

Après les nombreuses alertes du défenseur des droits, un rapport du Sénat du 16 septembre 2025 souligne que la dématérialisation est adaptée à un public autonome mais totalement inadaptée et sources d’angoisses pour un public défavorisé, accentuant un sentiment de déclassement social, de non accès aux droits et une source d’agressivité. C’est même une forte cause d’exclusion.

L’exclusion numérique n’est en effet pas en voie de régression. Selon l’ANLCI (Agence nationale de lutte contre l'illettrisme), 15 % de la population adulte âgée de 15 ans ou plus est en situation d’illectronisme en France et plus d’une personne sur 4 ont des capacités numériques faibles (c’est‑à‑dire qu’elles manquent d’une, deux ou trois compétences de base).

Les publics les plus touchés par la restriction de l’usage du chèque seront, une nouvelle fois, les plus isolés, les plus en marge de la dématérialisation. Le chèque est par ailleurs un moyen de paiement encore largement utilisé, car il permet aussi plus de souplesse de trésorerie.

 

Un nouveau recul du service public universel

Développer des alternatives modernes au chèque, et y inciter, nous paraît tout à fait acceptable et même légitime, au regard des évolutions de la société. Pour autant, cela ne doit pas se faire sous la contrainte, en abandonnant une frange de la population.

Certes, le flux de chèques aux finances publiques diminue chaque année, à l’instar des paiements dans l’ensemble de la société, mais il en reste près de 40 millions (41,6 millions en incluant le TIP). Loin d’être anecdotique, ce moyen de paiement est le seul dont la gratuité est garantie pour les utilisateurs par l’article L131-71 du code monétaire et financier.

 

Une nouvelle charge pour les services de gestion déjà exsangues

La restriction du chèque générera immanquablement une nouvelle charge, conséquente, pour des services de gestion.

Dans un premier temps, la fin du TIP va surtout conduire à réinternaliser le traitement des chèques dans les services de gestion.

Où est l’étude d’impact sur les services, SIP, SGC notamment qui vont voir affluer des chèques, parfois sans référence ? Quels sont les effectifs supplémentaires alloués à ces services déjà exsangues ? Quel sera l’impact de cette mesure sur les régies de recettes ?

La répartition des moyens d’encaissement varie en effet grandement d’un type de service à un autre.

Certains SGC voient la part des chèques et titres interbancaires de paiement être supérieure à 3 à 4 fois la moyenne nationale. Au total, la sphère SPL (dont secteur hospitalier) a concentré 64 % du nombre de chèques encaissés en 2024.

Les SIP ne seront pas en reste avec la fin des TIP. S’il reste déjà beaucoup de chèques pour les taxes foncières, la THS et les TLV, la fin des TIP va générer un afflux de paiements supplémentaires !

 

Et que dire de l’impact de la fermeture des centres d’encaissements pour les collègues qui y sont affectés. Ils vont d’abord subir une mobilité forcée. Ensuite pendant la période de transition, et alors que certains d’entre eux, seront déjà partis ou en tuilage dans leurs futurs services, celles et ceux qui restent jusqu’à la fin vont devoir absorber l’intégralité de la charge de travail à effectifs réduits...

En conclusion, si cette mesure générera quelques économies à long terme, elle ne prend pas en compte la dimension du recouvrement et fait excessivement peu de cas des usagers, singulièrement des particuliers, mais également des agentes et agents qui voient leur service fermé ou qui vont absorber la surcharge de travail immédiate. Elle apparaît enfin beaucoup trop précipitée.

La DGFiP n’a, ainsi, semble-t-il, tiré aucun enseignement d’autres expériences prématurées telles que GMBI et le transfert des taxes d’urbanisme dont on ne finit pas de ressentir, encore aujourd’hui, les impacts.